Montréal - Chaque début de championnat du monde, apporte son lot de "promus" au sein du club sélect des pilotes de Formule 1. Forts de leur jeune âge, de leur motivation, de leur palmarès acquis dans les séries inférieures ou de la générosité de leurs commanditaires, ces petits nouveaux viennent se mesurer aux pilotes d'expérience.

Mais, si l'accession à la Formule 1 constitue la concrétisation d'un beau rêve, le maintien à ce niveau de compétition peut aussi se transformer en cauchemar et sonner le glas de bien des ambitions, de bien des carrières au demeurant prometteuses. Peu importe la qualité de l'écurie dans laquelle il débute, le droit à l'erreur n'existe pas pour le novice en Formule 1! Et la première saison s'avère souvent décisive. Sous son casque, le nouveau sait qu'il devra briller ou…disparaître.

Si l'on se réfère à l'année 2003, que sont devenus les Pizzonia, licencié par Jaguar au lendemain du Grand Prix de Grande-Bretagne? Wilson, passé de Minardi à Jaguar en cours de saison? Kiesa son remplaçant chez Minardi et Firman, pilote Jordan? Malgré leur talent, aucun n'aura réussi à se faire remarquer ni à s'imposer. Seul Pizzonia demeure en Formule 1, repêché par l'écurie Williams. "Je suis très heureux d'avoir été retenu pour les essais. Mon objectif reste toutefois de retrouver un poste de titulaire en 2005", affirme le pilote de 23 ans.

De l'adversité naît l'exception

Les causes de l'impitoyable sélection qui frappe les jeunes pilotes sont multiples : un coéquipier que l'on ne peut distancer en qualifications ni en course, une écurie en manque de fiabilité, la malchance ou encore les trop nombreuses casses de matériel. À cette liste s'ajoute depuis 2003, un système de qualification sur un seul tour lancé extrêmement pénalisant pour un pilote inexpérimenté. Il lui faudra en même temps, découvrir le circuit et réaliser un tour parfait.

Les jeunes pilotes obtiennent généralement leur premier volant de Formule 1 au sein d'une écurie modeste ou de milieu de grille. Ce relatif handicap peut rapidement se transformer en avantage, voire en tremplin si les résultats en piste s'avèrent probants.

Les exemples ne manquent pas. Sans son passage chez Minardi en 2001, Alonso serait-il devenu le plus jeune pilote de l'histoire à remporter un Grand Prix en 2003? De même, sans sa saison 2001 chez Sauber, Räikkönen se serait-il vu offrir un volant par McLaren l'année suivante? Et Webber, sans sa présence chez Minardi en 2002, serait-il devenu aujourd'hui, l'un des pilotes les plus en demande du plateau?

Le fait n'est pas récent. Les pilotes les plus titrés ont dû retrousser les manches de leur combinaison et dépasser les limites de leurs modestes montures avant d'obtenir les volants les plus convoités. Souvenons-nous des débuts d'un certain Nelson Piquet sur Ensign en 1978, d'un Alain Prost sur une McLaren au creux de sa forme en 1980, d'un Ayrton Senna sur Toleman en 1984, d'un Mika Häkkinen sur Lotus en 1991, d'un Michael Schumacher sur Jordan la même année ou d'un Damon Hill sur Brabham en 1992.

La cuvée 2004

À l'heure où la Formule 1 prépare activement la succession de Michael Schumacher et où les prétendants au trône piaffent d'impatience, la génération montante pourrait bien bénéficier de ce tempo pour se frayer une place au soleil. Grâce au nouveau règlement 2004, de jeunes pilotes essayeurs pourront eux aussi tenter d'entrer dans la lumière. Les écuries les moins bien classées pourront en effet aligner une troisième voiture aux essais officiels d'un Grand Prix avec à son bord, un pilote ne totalisant pas plus de six Grands Prix disputés lors des deux dernières saisons. Placés quasiment en conditions de course, Anthony Davidson, 24 ans (BAR), Björn Wirdheim, 23 ans (Jaguar), Timo Glock, 21 ans (Jordan) et Neel Jani, 20 ans (Sauber) auront l'opportunité exceptionnelle de se mettre en valeur sur chacun des circuits, face aux pilotes titulaires de leur propre écurie et les journalistes du monde entier.

Outre le retour de Takuma Sato (BAR) et Felipe Massa (Sauber), recrues du championnat 2002, la saison 2004 compte quatre véritables nouveaux inscrits: Christian Klien chez Jaguar, Giorgio Pantano chez Jordan, Gianmaria Bruni et Zsolt Baumgartner chez Minardi. Qui saura le mieux tirer son épingle du jeu dans cet univers de pression et de performances qu'est la Formule 1? Qui bouleversera la hiérarchie établie? Qui risquera de se brûler irrémédiablement les ailes? Un début de réponse sera apporté lors de l'épreuve de Montréal, aux alentours de la mi-saison…

Christian Klien

Second pilote Jaguar aux côtés d'un Mark Webber ayant littéralement éclipsé deux coéquipiers en 2003 (Antonio Pizzonia et Justin Wilson) cet Autrichien de 21 ans (second du championnat européen de Formule 3 et meilleur pilote recrue 2003) aborde le championnat 2004 avec décontraction. "Tous les Autrichiens tendent à prendre les choses avec beaucoup de recul. Cela pourrait être une bonne façon de procéder quand la pression commencera à monter", déclare Klien, le successeur de Jochen Rindt, Niki Lauda et de Gerhard Berger.

Réussira-t-il là où ses autres compatriotes Alexander Wurz et Karl Wendlinger ont échoué? "Nous n'avons aucun doute sur les qualités de ce jeune pilote et sa place en Formule 1 est due à son mérite, son potentiel et sa rapidité", ajoute David Pitchforth, directeur général de Jaguar.

N'ayant pu participer à la séance de qualification pour cause d'ennuis mécaniques, il termine son premier Grand Prix à une honorable 11e place.

Giorgio Pantano

Confirmé tardivement, l'Italien Giorgio Pantano, 25 ans (champion de Formule 3 allemande à sa première saison en 2000 et troisième du championnat 2003 de F3000) rejoint l'Allemand Nick Heidfeld au sein de l'écurie Jordan. Une chaude lutte devrait se dessiner entre ces deux pilotes. L'expérience de l'un saura-t-elle contenir la fougue de l'autre? "Giorgio bataille à l'avant des pelotons de F3000 depuis trois ans et il est maintenant prêt à monter en F1", pense Eddie Jordan.

Qualifié 16e derrière son coéquipier, il termine le Grand Prix d'Australie à la 14e place.

Gianmaria Bruni / Zsolt Baumgartner

"Minardi a pour habitude d'avoir des pilotes passionnés et qui prétendent à un bel avenir. Il y a moins de pression ici et c'est un bon milieu pour s'épanouir", affirme Paul Stoddart, patron de l'écurie. L'Italien Gianmaria Bruni, 22 ans (pilote essayeur Minardi et 3e de la série Euro F3000 en 2003) et le Hongrois Zsolt Baumgartner, 23 ans (pilote Jordan lors des Grands Prix de Hongrie et d'Italie 2003) auront la lourde tâche de faire décoller leur écurie des profondeurs du classement.

En Australie, Bruni ne peut participer à la séance de qualification. En course, il entre aux stands au 37e tour. Il repartira pour effectuer les 10 derniers tours, mais ne sera pas classé. Qualifié 17 e, Baumgartner abandonnera pour sa part au 13e tour.

Les 11, 12 et 13 juin prochain, tous les acteurs de la Formule 1 seront à Montréal pour disputer la huitième manche du championnat du monde 2004. En plus de retrouver avec plaisir leurs pilotes favoris, les spectateurs présents sur le circuit Gilles-Villeneuve pourront encourager les petits nouveaux, pilotes titulaires et essayeurs et comparer leurs performances en piste.

Les billets pour assister au Grand Prix du Canada, les 11, 12 et 13 juin 2004 sont disponibles en composant le (514) 350-0000 ou en visitant le www.grandprix.ca.