Ça aurait été un scénario digne d’une fin hollywoodienne : après une brillante carrière de 24 ans en NASCAR, le pilote de 44 ans Jeff Gordon voyait se présenter à lui la chance de décrocher un cinquième titre de la Coupe Sprint juste avant de quitter pour une retraite bien méritée.

Une séquence de 797 courses consécutives étalée sur 24 saisons, sans la moindre absence pour quelque raison que ce soit, ça relève pratiquement du miracle. Sincèrement, je ne crois pas qu’on va revoir un pilote connaître une telle longévité de sitôt.

Ce n’est pas à défaut d’avoir essayé que son équipe et lui ont finalement dû se contenter de la 6e place sur le circuit de Homestead,  où se déroulait à Miami le dernier volet de la Chase.

Jeff GordonDisons que la compétition était simplement trop puissante dimanche pour le gagnant de 93 épreuves dans la plus prestigieuse des séries du NASCAR. Au fil des ans, Gordon est devenu un monument du sport automobile, au point où il n’y a pas l’ombre d’un doute qu’il sera intronisé au Temple de la renommée dès sa première année d’admissibilité.

J’ai trouvé que c’était une belle attention de lui avoir réservé une longue ovation quelques minutes afin qu’il prenne son dernier départ. Il ne faut cependant pas se bercer d’histoires : peut-être que tous n’étaient pas ses supporters tout au long de son impressionnante carrière. Mais il mérite néanmoins le respect pour ses accomplissements. Et dimanche, le pilote de la voiture no 24 a rendu le tout très excitant. Lorsqu’il a mené la course l’espace de quelques tours, les gens ont bondi de leur siège dans les gradins et l’enthousiasme a grimpé d’un cran à Homestead.

Même ses détracteurs devront admettre que Gordon a contribué en large partie à rendre le NASCAR plus accessible auprès de la population en général. Avant son arrivée dans le sport, l’intérêt se concentrait surtout dans le Sud des États-Unis. À ses débuts, on l’appelait le « California Boy », et son attitude était très différente de celle du traditionnel pilote de stock-car. Il a amené un véritable vent de fraîcheur, sans manquer de se faire quelque ennemis au passage.

C’est drôle à dire, mais dans ce cercle relativement fermé, Gordon n’a pas toujours été apprécié par ses pairs, notamment lorsqu’il a détrôné Dale Earnhardt père, qui était le monarque de la série Sprint à l’époque. C’est connu, les Américains apprécient plus ou moins un athlète qui gagne trop souvent. En ce sens, sans doute Gordon a-t-il été victime de tous les succès obtenus depuis 1992.

Busch revient de loin

À sa 11e saison en NASCAR, Kyle Busch a finalement pu soulever le précieux trophée remis au vainqueur de la Série Sprint. Et il ne l’a pas volé ce triomphe; il a piloté une course sensationnelle dimanche, couronnant ainsi de la meilleure des façons une saison éprouvante et remplie de péripéties. Depuis 2004 qu’on lui prédisait un titre et que ça ne se concrétisait pas… mais finalement, son talent exceptionnel derrière le volant a prévalu.

Kyle BuschRappelons que le 20 février dernier, lors des qualifications à Daytona, Busch avait été victime d’un incident. Son bolide avait abouti tout droit dans un muret, et il avait subi des fractures à la jambe droite et au pied  gauche, le contraignant ainsi à une longue période d’inactivité. Je ne crois pas qu’en regardant l’épreuve de son lit d’hôpital le lendemain, il aurait même osé croire que cette année serait la sienne.

Après avoir raté les 11 premières épreuves du calendrier, Busch et l’équipe Joe Gibbs se sont mis en mode rattrapage et c’est non sans quelques moments d’inquiétude qu’il est parvenu à se qualifier pour les éliminatoires. Rendu là, tous les espoirs étaient permis, mais son historique en Chase ne lui était pas du tout favorable. Aucune victoire en 79 épreuves en contexte éliminatoire!

Au plan psychologique, j’ai perçu une énorme différence dans sa manière de se compter, en piste comme hors-piste. A-t-il maturé? Est-ce sa relation avec Joe Gibbs, qui met l’accent sur la préparation mentale de ses athlètes? Est-ce la naissance de son nouveau-né au mois de mai? Ou bien l’influence qu’a eue sur lui sa nouvelle épouse? Possiblement un heureux mélange de tous ces facteurs. Toujours est-il qu’on a vu un contrôle plus posé, calme et en contrôle de ses émotions. Par le passé, Busch était beaucoup plus enclin à perdre sa concentration en raison d’un manque flagrant de maturité. On ne peut que le féliciter pour les efforts déployés pour travailler sur lui-même. Il en a récolté les bénéfices!

* Propos recueillis par Maxime Desroches