FRANCFORT (AFP) - Groupes audiovisuels allemands, constructeurs automobiles, investisseurs, banquiers: une âpre bataille a été engagée autour du contrôle des droits commerciaux très lucratifs de la Formule 1, au centre de laquelle se trouve le Britannique Bernie Ecclestone.

Le détonateur est venu de là où on ne l'attendait pas: des difficultés financières du gestionnaire allemand de droits audiovisuels EM.TV, une société munichoise sortie de l'anonymat il y a moins d'un an en acquérant à la surprise générale la moitié de la société de M. Ecclestone gérant les droits de retransmission télévisuelle des courses de F1 (SLEC).

Après avoir connu une croissance météorique, l'entreprise a vu le cours de son action perdre plus de 90% de sa valeur au cours des derniers mois à la suite de résultats très en-deçà des attentes.

Résultat: son flamboyant patron, Thomas Haffa, est aux abois et recherche désespérément un allié financier.

Son principal objectif est de pouvoir rester dans la Formule 1. Le deuxième pilier de l'activité d'EM.TV, la gestion de droits de dessins animés ou d'émissions pour enfants, est en perte de vitesse.

Part de "gâteau"

La société négocie donc depuis plus de deux mois un partenariat avec le magnat allemand des médias Kirch, qui y voit une excellente occasion pour obtenir une part du "gâteau" de la Formule 1: ses chaînes de télévision sont à l'affût pour obtenir les droits de retransmission.

Mais les tractations traînent en longueur, aiguisant du même coup les appétits des concurrents. La presse bruisse quotidiennement de rumeurs sur des contre-offres en préparation.

Elle évoque les noms de la banque d'investissement américaine Hellman et Friedmann et d'un consortium comprenant la banque WestLB, la société d'investissement britannique Morgan Grenfell (Deutsche Bank) et la société audiovisuelle munichoise Tele Muenchen Gruppe.

A en croire la presse, le patron sortant d'Adidas-Salomon, le Français Robert-Louis Dreyfus, lorgnerait également sur les parts d'EM.TV dans la Formule 1.

En coulisse, Bernie Ecclestone observe ce théâtre d'ombres avec grand intérêt. Le Britannique chercherait, selon certains journaux, à empêcher coûte que coûte l'alliance EM.TV/Kirch afin de barrer la route de la Formule 1 au groupe de médias et à ses chaînes de télévision.

Accord contesté

Le "gourou" de la Formule 1 bénéficie d'un atout maître. Il peut en effet contraindre EM.TV en mai prochain à acquérir 25% supplémentaires de la SLEC pour 1 milliard d'euros, une facture que la société allemande n'a pas en l'état les moyens de régler.

Le Britannique doit dans le même temps compter avec les constructeurs automobiles impliqués dans la Formule 1 (Ford, Fiat, BMW, DaimlerChrysler, Renault) qui souhaitent eux-aussi entrer au capital de la SLEC. Ces derniers entendent exercer une plus grande influence sur les droits TV d'un sport qu'ils font vivre en y investissant chaque année des centaines de millions de dollars.

Les constructeurs semblent jouir du soutien du président de la Fédération internationale de l'automobile (FIA), Max Mosley, qui vient d'engager une nouvelle épreuve de force avec Bernie Ecclestone en menaçant de revoir les accords le liant à la FIA pour défaut de paiement.

En juin dernier, Bernie Ecclestone --qui joue sur les deux tableaux puisqu'il est également vice-président de la FIA-- avait acquis les droits de retransmission des courses de Formule 1 pour 100 ans à partir de 2010. Mais cet accord reste très contesté.