MONTRÉAL - Puisque le circuit Gilles-Villeneuve est beaucoup plus propice aux dépassements qu'à Monaco, les amateurs de Formule 1 risquent d'assister à plusieurs revirements de situation, dimanche, à l'occasion d'un Grand Prix du Canada qui promet. Pour deux raisons plutôt qu'une.

La première est attribuable aux pneus Pirelli, ce qui devrait inciter les équipes à effectuer un plus grand nombre d'arrêts aux puits. La deuxième est liée à l'utilisation, pour la première fois cette saison, de deux zones d'activation de l'aileron mobile arrière, au lieu d'une. On doublera donc le nombre d'occasions de dépassement permis par la technologie.

Les pneus Pirelli, qui sont utilisés depuis le début de la saison et se dégradent rapidement, forceront les écuries à effectuer jusqu'à cinq arrêts, estiment certains observateurs.

«Je m'attends à un bon nombre d'arrêts, même si je ne peux prédire le chiffre exact. Mais c'est sûr que ce ne sera pas juste un ou deux», a affirmé en point de presse le pilote no 1 de l'écurie Ferrari, Fernando Alonso, jeudi à l'Ile Notre-Dame.

«Je m'attends à ce que les pneus soient davantage mis à l'épreuve qu'à Monaco, où on a pu rouler longtemps sur les mêmes pneus étant donné que les dépassements y sont pratiquement impossibles, a ajouté le pilote espagnol. Mais ici, le rythme qu'avait (Sebastian) Vettel en fin de course à Monaco ne lui aurait donné qu'une huitième place, parce qu'on l'aurait facilement dépassé.»

«Nous sommes tous encore en processus d'apprentissage en ce qui concerne l'utilisation des pneus, alors c'est difficile à prédire, a quant à lui commenté Mark Webber, de Red Bull. Mais c'est sûr qu'il y aura plus d'arrêts.»

Par ailleurs, étant donné la présence de deux zones d'activation de l'aileron, un pilote qui hésiterait trop longtemps avant de changer de pneus risque de perdre plusieurs rangs très rapidement, comme l'a fait remarquer Jenson Button (McLaren).

«Si tu es le meneur (au dernier tour), tu pourrais théoriquement finir troisième, a-t-il fait remarquer, jeudi. Parce que ton premier poursuivant te dépassera dans la première zone, et l'autre, dans la deuxième.

«Ça va permettre un plus grand nombre de dépassements, mais je ne sais pas si ça va améliorer la course, a ajouté le coéquipier de Lewis Hamilton. Avoir une zone est une bonne chose, je crois, mais je ne suis pas certain s'il vaut la peine d'en avoir deux. C'est à voir.»

Button a aussi affirmé qu'en raison de ces deux zones, Ferrari et Mercedes seront à surveiller au cours du week-end, compte tenu «de la technologie dont jouissent Ferrari et Mercedes à ce niveau, et du fait qu'il y a de longs passages en ligne droite» à Montréal.

«Nous sommes très bons dans notre utilisation de cette technologie, a souligné Button. Nous semblons être capables de l'utiliser plus souvent que d'autres. Mais, étant donné les longues droites qu'il y a ici... Il semble que Mercedes puisse gagner quelque chose comme 20 km/h dans une zone d'activation, alors que la plupart des équipes profitent d'une poussée de 12 km/h. C'est une différence énorme, qui sera d'autant plus évidente ici.

«Ils vont être très rapides, a ajouté Button en parlant toujours de Mercedes. Ils seront peut-être même nos plus grands concurrents. Ça va sans doute surprendre bien des gens, mais ils seront à surveiller.»

«La stratégie de course va être à l'avant-plan, a résumé Alonso. En ce sens qu'il sera peut-être préférable de faire un arrêt de plus, question de permettre à la voiture d'être plus rapide, que d'économiser un arrêt et devoir défendre sa position. Ici, c'est très difficile de garder son rang si tu connais des difficultés avec tes pneus.»

La zone d'activation d'aileron est une nouvelle façon de faire qui est en vigueur depuis le début de la présente campagne. Elle permet à un pilote, au moyen d'une technologie avancée, de dépasser une voiture qu'il suit de très près.

La présence de deux zones à Montréal est rendue possible par le fait qu'il y a deux longues lignes droites sur le circuit Gilles-Villeneuve.

Une porte ouverte

En théorie, le circuit Gilles-Villeneuve demeure un endroit où les voitures Red Bull devraient être moins dominantes que d'habitude, ce qui ouvre la porte à d'autres écuries de pointe telles que McLaren. L'an dernier, Hamilton avait d'ailleurs signé une deuxième victoire en trois présences en carrière à Montréal.

«J'aimerais penser que c'est le cas, a dit Hamilton, jeudi, de ses chances accrues de l'emporter à Montréal. Sauf que les voitures Red Bull ont été rapides sur tous les circuits, alors il faut s'attendre à ce qu'elles soient très rapides ici. Mais peut-être que, comme l'an dernier, l'écart entre eux et les autres va être réduit.»

«Sur papier, ce n'est pas l'endroit où nous sommes les plus forts, à cause de la longueur des lignes droites, et qu'il s'agit d'une des trois ou quatre courses dans l'année où l'appui aérodynamique est moins important, a reconnu Webber. Nous espérons que les leçons du passé nous permettront d'améliorer nos chances. Mais entre l'espoir et la réalité, il y a parfois une marge qu'il est difficile de combler. On verra ce que ça donne.»

Alonso espère évidemment répéter sa troisième place de l'an dernier, mais il a indiqué que la tâche sera difficile pour Ferrari.

«Cette piste pourrait être mieux pour nous, comme à Monaco, a déclaré Alonso, qui a terminé deuxième lors de l'étape monégasque. Il semble qu'on performe mieux avec les tendres. Et compte tenu que l'appui aérodynamique est moins important ici, ça nous permettra de moins ressentir l'écart qui nous sépare de nos opposants.

«Je crois que nous pouvons livrer une belle lutte pour accéder au podium. Mais ça restera très difficile, comme c'est le cas pour nous depuis le début du championnat.»

L'an dernier, Hamilton et Button avaient réalisé un doublé pour McLaren. Le podium avait été complété par Alonso.

Vettel menacé?

Vettel avait terminé quatrième à Montréal en 2010, devant Webber, son coéquipier chez Red Bull. C'était quelques mois avant qu'il ne devienne le plus jeune champion pilote de l'histoire de la F1.

C'est à titre de meneur au classement que Vettel s'est présenté au Québec cette semaine. Avec une récolte de cinq victoires en six courses en 2011, ce qui lui confère 143 points, l'Allemand de 23 ans jouit d'une confortable avance sur Hamilton, auteur de 85 points. Webber est troisième avec 79 points. Suivent Button (76 pts) et Alonso (69 pts).

Une victoire vaut 25 points au classement, contre 18 points pour une deuxième place et 15 pour une troisième position.

La moindre contre-performance de Vettel pourrait donc relancer la course au titre.

Par ailleurs, la FIA a confirmé jeudi que Sergio Perez, le pilote de Sauber qui a été hospitalisé après un accident subi dans le cadre du Grand Prix de Monaco, avait reçu le feu vert des médecins pour courir ce week-end.

Les deux premières séances d'essais auront lieu vendredi. Les séances de qualification suivront samedi après-midi. Le départ de la course de 70 tours sera donné dimanche à 13h.