ANGOULEME, France - Pour la première fois depuis huit ans, le Tour de France ne devrait pas consacrer un Américain dimanche sur les Champs-Elysées. Mais consacrera-t-il un coureur propre?

La série de sept victoires record de Lance Armstrong, contrôlé positif aux corticoïdes l'année de son premier sacre en 1999, a été interrompue par la retraite sportive du Texan, remplacé sur la plus haute marche du podium par son compatriote Floyd Landis.

Landis, contrôlé positif à la testostérone à Morzine avant son arrivée en jaune sur les Champs-Elysées l'an dernier, a contesté les analyses et attend toujours les résultats de l'enquête diligentée par l'agence américaine antidopage. Il risque deux ans de suspension.

Samedi, l'Espagnol Alberto Contador s'est tiré du piège du contre-la-montre d'Angoulême, pour conserver, avec 23 secondes d'avance sur l'Australien Cadel Evans, la tête au classement général du Tour à la veille de l'arrivée. La 20e et dernière étape dimanche, longue de 146 kilomètres, au départ de Marcoussis, le quartier général du XV de France de rugby, passera par Châtenay-Malabry où sont effectuées les analyses des contrôles antidopage. Le Laboratoire national de lutte contre le dopage a pris dans les mailles de son filet le Kazakh Alexandre Vinokourov et l'Italien Cristian Moreni. Les dégâts collatéraux sont importants puisque les formations Astana et Cofidis ont quitté le Tour.

Contador, poursuivi par la rumeur, a fait front samedi à Angoulême. Son nom était apparu lors de l'Operation Puerto, le dopage sanguin en Espagne.

"Dans un premier temps, mon nom a été associé à la rumeur, mais l'Union cycliste internationale a rectifié l'erreur. Je suis en dehors de tout ça", a expliqué Contador, qui s'est dit prêt à livrer son ADN pour le comparer avec les poches de sang saisies dans une clinique madrilène lors de l'Operation Puerto.

Rescapé d'une opération du cerveau, Contador pourrait devenir le successeur d'Armstrong à la Discovery-Channel, si l'équipe arrive à conserver un commanditaire en fin de saison.

La comparaison est tentante avec l'Américain, rescapé d'un cancer généralisé, les deux coureurs ayant tutoyé la mort avant de remporter la plus grande course du monde.

"Beaucoup de coureurs ont gagné et n'ont pas vu la mort en face. Armstrong est un exemple pour moi. Quand j'étais à l'hôpital, j'ai lu son livre et ça m'a motivé", a expliqué le jeune Espagnol de 24 ans.

En 2004, une chute dans le Tour des Asturies l'a contraint à une opération d'un oedème cérébral. Après presque un an de convalescence et de nombreux doutes, il a remporté pour son retour en janvier 2005 une étape du Tour Down Under.

"Lance était dans la voiture derrière moi lors du contre-la-montre. Il ne m'a rien dit mais quand Johan (Bruyneel, le directeur sportif) parlait, j'entendais sa voix. Il est un exemple, mais il a gagné sept Tours, moi un seul."

Après son contrôle aux corticoïdes en 1999, Armstrong avait présenté une autorisation médicale antidatée. L'UCI avait fermé les yeux.

L'Union cycliste internationale a encore été sur la sellette dans le Tour 2007, pour avoir laissé le Danois Michael Rasmussen prendre le départ. Rabobank, sa formation, lui a demandé de se retirer jeudi alors qu'il portait le maillot jaune, pour avoir menti sur ses lieux de résidence hors compétition.

La "révolution" prônée à Pau par Christian Prudhomme, le directeur du Tour, devra se faire sans les dirigeants actuels de l'UCI, jugés soit incapables soit soucieux de faire du mal au Tour, selon Patrice Clerc, le directeur d'Amaury Sport Organisation, organisateur de l'épreuve.

Reste que le cyclisme est l'un des sports les plus contrôlés.

"Il y a eu 221 contrôles sanguins sur le Tour, aucun durant la Coupe du monde de football", rappelle Prudhomme.

Samedi, l'UCI à encore effectué 15 contrôles sanguins parmi "les meilleurs coureurs classés" de huit formations, dont la Discovery Channel, et "aucun coureur n'a été déclaré inapte".

Les coureurs, contraints de donner en permanence urine et sang, en course ou hors compétition, finissent par trouver injuste d'être montrés du doigt.

"Ils sont sollicités sans arrêt, pratiquement disséqués", souligne Vincent Lavenu, le directeur sportif d'AG2R, qui souhaite que la pression soit mise sur les médecins et l'encadrement.

"Je n'ai pas confiance dans cette équipe, dit-il d'ailleurs à propos de la Discovery Channel de Contador. Peut-être qu'un jour, on saura."

"En cyclisme, il ne peut plus y avoir de présomption d'innocence", a déclaré Patrice Clerc, meurtri par les différentes affaires et partisan de la "tolérance zéro" à l'égard du fléau.

"Les contrôles sont là pour confirmer comment moi je cours", reprend Contador, plusieurs fois contrôlé sur la Grande Boucle.

"Le sport traverse un moment fou. Mais il faut travailler ensemble pour mettre fin au scandale. Ce sport est beau et salutaire. C'est ce que je veux transmettre aux jeunes."