MILAN (AFP) - Le champion du monde, l'Espagnol Oscar Freire, sert de repère à tout le peloton du Milan-Sanremo, qui aborde samedi les 294 kilomètres de la première classique de la saison cycliste au pouvoir de fascination intact.

Course d'immense tradition, la Primavera se nourrit de paradoxes. Elle a couronné les plus grands (7 victoires pour Eddy Merckx !) mais présente un parcours sans réelle difficulté, hormis les montées de la Cipressa et du Poggio dans les 25 derniers kilomètres. Pour la conquérir, ses prétendants doivent maîtriser de nombreux paramètres, savoir s'économiser durant plus de 6 heures et éviter la moindre erreur dans le final.

Pour avoir oublié cet impératif et levé les bras trop tôt avant la ligne sur la célèbre Via Roma, l'Allemand Erik Zabel a raté l'an dernier la (formidable) cinquième victoire qui lui était promise.

Son vainqueur, Oscar Freire, a ajouté une autre perle en fin de saison en gagnant pour la troisième fois le championnat du monde. Autant dire que le chef de file de l'équipe Rabobank (avec le solide Dekker pour coéquipier) supporte aisément l'enjeu et... les longues distances.

L'exemple de Zabel

Plus fort que l'année passée, de l'avis de ses adversaires, Freire est désigné comme l'homme à battre. Trois succès d'étape en trois jours la semaine dernière dans Tirreno-Adriatico, assorties de la victoire finale, lui ont octroyé le maillot bleu et blanc de leader du ProTour et surtout l'étiquette de premier favori.

Apte à suivre les puncheurs sur les "capi" du front de la mer ligure ou à battre les plus rapides au sprint, l'Espagnol établi au Tessin (Suisse italienne) incarne le prototype du coureur de Milan-Sanremo, sachant bluffer et garder son sang-froid.

"Le jeu, c'est de rester devant dans le final, bien négocier la descente du Poggio et attendre le sprint. Mais j'espère que la course sera assez dure pour que les autres sprinteurs ne soient plus là", annonce-t-il.

Le souhait semble hypothétique tant les autres finisseurs ont également progressé pour franchir les "capi". Entre autres, l'Italien Alessandro Petacchi qui accumule les victoires (onze en 2005) mais attend toujours la grande classique qui le comblerait.
Zabel, qui avait donné l'exemple, reste pour sa part toujours aussi dangereux. A 34 ans, l'Allemand, qui s'est fait oublier pendant Tirreno-Adriatico, sait centrer ses objectifs et dispose d'une équipe armée pour tous les cas de figure avec le Kazakh Alexandre Vinokourov, en forme ascendante.

L'accent espagnol

Pour cette journée de retrouvailles avec la Saint-Joseph (Milan-Sanremo avait lieu jadis le 19 mars), les autres sprinteurs (Hondo, O'Grady, Davis, McEwen) espèrent connaître le jour de grâce. Autrement dit, trouver l'ouverture dans un sprint qui, rappelle Freire, "se joue dans les deux derniers virages".

Mario Cipollini, lui, veut croire en une possible résurrection à près de 38 ans (2e de la dernière étape de Tirreno-Adriatico). A l'opposé de la pyramide d'âge, le Belge Tom Boonen (24 ans) a tout pour briller au firmament de son sport.

Encore faut-il que les équipes des sprinteurs parviennent à neutraliser les attaquants sous le soleil annoncé de la Riviera. Si l'option d'une échappée partie de loin a régulièrement échoué ces dernières années, l'hypothèse de ce scénario refait surface à chaque édition.

Mais, pour Freire et ses collègues, le danger principal tient d'abord aux qualités des puncheurs (Di Luca, Figueras, Pellizotti, Voigt), au forcing qu'ils cherchent à imposer dans la Cipressa et le Poggio.

Dans ce registre, l'Espagnol Alejandro Valverde, très attendu sur la Riviera, peut-il imiter l'Italien Paolo Bettini, irrésistible voici deux ans dans le Poggio mais en forme encore précaire cette fois ? Freire se méfie en tous les cas de son compatriote au départ de cette 96e édition à l'accent franchement espagnol.