LIMOGES - Cet hiver, l'Italien Rinaldo Nocentini, 31 ans, se demandait s'il aurait la chance de participer au moins une fois dans sa vie à un Tour de France. Aujourd'hui, il en porte le maillot jaune, avec de bonnes chances de le conserver encore quelques jours.

"C'est incroyable, au départ de l'étape ce matin, je n'ai pas pensé une seconde que je pourrais prendre le maillot", s'extasiait ce néophyte du Tour vendredi, au soir de sa prise de pouvoir à Arcalis avec six secondes d'avance sur Alberto Contador.

Pourtant, Nocentini a non seulement cueilli la tunique d'or, mais il l'a conservée par-delà deux difficiles étapes pyrénéennes. Grimaçant dans les cols pour mieux sourire le soir à l'arrivée, sur le podium du protocole.

Jaune ou pas jaune, "Rinaldo porte le bonheur sur lui", dit joliment Vincent Lavenu, son manageur chez AG2R, qui décrit un homme "toujours gai, enthousiaste, très bon camarade".

Cette belle nature, sur un vélo, se transforme en honnête grimpeur, et en puncheur capable d'aller gagner une course à l'énergie, comme il l'avait fait souvent en début de carrière, en Italie. Lorsqu'il avait fait naître des espoirs qu'il n'a pas toujours confirmés.

Car Nocentini, depuis dix ans, fut surtout un coureur de devoir, un "gregario", comme disent les Italiens. "C'est vrai, j'ai eu une carrière discrète après quelques victoires, parce que je suis passé assez vite dans des équipes italiennes où il y avait de grands leaders. J'ai beaucoup travaillé pour eux et j'ai délaissé un peu mes ambitions personnelles", explique-t-il à ceux qui lui demandent pourquoi il n'a pas explosé au plus haut niveau, malgré des qualités indéniables qui lui ont permis, notamment, de terminer deuxième de Paris-Nice en 2008.

Lavenu, qui l'a recruté début 2007, n'a jamais regretté son choix: "On l'a rapidement adopté, il parle à peu près français et il s'est imposé naturellement chez nous comme un maillon essentiel de l'équipe", dit le manager sportif.

En venant chez AG2R, Nocentini avait un rêve: faire le Tour de France. Il a dû patienter deux ans. "Mes deux premières années chez AG2R, on m'a demandé de faire le Giro et la Vuelta. Moi, j'ai toujours réclamé de faire le Tour, et cette année les directeurs sportifs m'ont dit oui", explique-t-il, radieux.

A l'âge où certains regardent déjà l'horizon de la retraite, Nocentini va-t-il éclore une deuxième fois? "Attention, c'est le genre de coureur qui peut se révéler sur le Tour. Sans jouer les premières places, il peut faire un très bon classement, et ça peut être un déclic", dit de lui Alfredo Martini, ex-sélectionneur de l'équipe d'Italie, qui a vu défiler toutes les générations de champions italiens depuis l'après-guerre.

"Pour l'instant, ce n'est pas un coureur de grand tour", modère Lavenu, qui admet que Nocentini "peut imploser dans la deuxième partie de la course".