BORDEAUX (AFP) - Un peu plus de deux ans après le grand procès de Poitiers, une nouvelle affaire de trafic de "pot belge" découverte à Cahors (sud-ouest) secoue le milieu du cyclisme, avec une vingtaine de mises en examen prononcées en Belgique et en France.

Parmi les derniers mis en cause, Laurent Biondi, 45 ans, directeur sportif adjoint de l'équipe professionnelle française AG2R, a été mis en examen lundi pour "détention, transport, acquisition, offre et cession de produits stupéfiants" par un des deux juges d'instruction de Bordeaux (sud-ouest) en charge du volet français du dossier.

Cet ancien coureur professionnel (1983-1993), ancien champion du monde de la course aux points (piste) est suspecté d'avoir acheté sur deux ans une dizaine de doses injectables et d'en avoir revendu deux, selon son avocat.

Il nie farouchement ces accusations qui ne reposent que sur deux témoignages et s'est "volontiers" prêté à des prélèvements capillaires dans l'espoir d'être rapidement innocenté par les analyses toxicologiques, selon Me Michel Gonelle.

Sans attendre, l'équipe AG2R l'a immédiatement suspendu de ses fonctions comme le prévoit la charte éthique signée par l'équipe professionnelle.

Au total, une demi-douzaine d'anciens professionnels et autant d'anciens amateurs sont suspectés d'avoir, comme lui, acheté des "pots belges" - cocktails d'amphétamines, d'antalgiques, d'héroïne et cocaïne. Car ce trafic concernerait avant tout des coureurs qui ont cessé leur activités sportives.

Pratiques toxicomanes

Dans la plupart des cas, il s'agit de pratiques toxicomanes plus que de dopage sportif, selon le procureur de Bordeaux.

Ainsi, le 18 janvier, le premier geste d'un suspect qui venait de recevoir une livraison sur une aire d'autoroute du Lot a été de se faire une injection, comme l'ont constaté les gendarmes déployés sur les lieux.

Cette opération en flagrant délit s'inscrivait dans le cadre d'un vaste coup de filet qui a débouché sur une vingtaine d'interpellations à Cahors (sud-ouest), Bordeaux, Marseille (sud-est) ou Tarbes (sud-ouest), mais aussi en Belgique.

Selon la justice, le trafic était animé par deux Belges: le pourvoyeur présumé serait Jean-Marie Vernie, 44 ans, ancien coureur professionnel belge qui a porté les maillots des modestes équipes Isoglass et Westwood; Freddy Sergeant, 62 ans, ancien soigneur de l'équipe belge ADR à la fin des années 80 est suspecté d'être l'importateur.

En deux ans, quelque 3.000 doses, achetées 45 euros et revendues au moins le quadruple, auraient été livrées en France par Freddy Sergeant, son épouse, son fils et son beau-frère, à raison d'un voyage toutes les trois semaines. Certains acheteurs jouaient les revendeurs pour financer leur consommation, selon une source proche de l'enquête.

Parmi les cyclistes impliqués, figure Laurent Roux, ancien coureur professionnel, suspendu en 2000 après un contrôle positif pendant la Flèche Wallonne 1999, puis à nouveau suspendu quatre ans, en 2003, pour dopage aux amphétamines. Lui et son frère, Fabien, auraient joué le rôle de revendeurs locaux pour la région de Cahors.

Les débats menés en 2001 et en 2003 devant le tribunal correctionnel de Poitiers pour une affaire impliquant 41 cyclistes amateurs et professionnels ont montré que les coureurs qui se dopent pour obtenir des résultats sportifs finissent souvent par devenir complètement dépendants.

L'affaire de Cahors a démarré en avril 2003, grâce à un signalement à la Fédération française de cyclisme pour un contrôle anti-dopage positif lors d'une course amateur.