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Tour de France : Biniam Girmay, le pionnier du sprint africain

Biniam Girmay Biniam Girmay - PC
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Premier coureur africain à revêtir le maillot vert, l'Erythréen Biniam Girmay, idole nationale, a confirmé sa place dans le grand monde des sprinteurs en décrochant, en patron, une première victoire dans le Tour à Turin.

Tous les soirs, l'ambiance se réchauffe autour du bus de l'équipe Intermarché-Wanty, grâce à la diaspora érythréenne qui vient célébrer son champion, deuxième du sprint à Dijon jeudi et bien accroché à son maillot vert.

Les compatriotes de « Bini » présents à Turin lundi après la troisième étape ont eu de quoi faire la fête: la star nationale a devancé les autres sprinteurs dans le final de la première étape de plaine de la plus grande course du monde.

« Il y a une grosse communauté éryhtréenne ici en Europe, c'est un pays où il n'y a pas beaucoup d'idoles, et c'en est devenu une », explique à l'AFP Aike Visbeek, le manager de la performance de la formation belge.

Devant Evenepoel

« Maintenant, on fait partie de cette grande course. C'est aussi votre succès, c'est votre moment », a clamé Girmay après son triomphe, à l'adresse de ses compatriotes.

« Cela signifie énormément pour moi de devenir le premier coureur noir africain à gagner sur le Tour de France », a-t-il ajouté, pris par l'émotion.

Il faut dire que le coureur de 24 ans incarne le cyclisme africain, lui qui a su saisir sa chance à son arrivée dans le peloton européen, après avoir passé ses après-midis à regarder le Tour avec son père passionné de vélo.

Repéré par Jean-Jacques Henry, chargé de détection pour le Centre mondial de l'Union Cycliste Internationale, basé à Aigle en Suisse, et venu disputer ses premières courses en Europe en 2018, Girmay a tout de suite impressionné.

« C'est un coureur qui avait une grande explosivité, ce qu'on voit aujourd'hui quand il arrive au sprint », estime-t-il, indiquant que « quand il était junior, dans la première année U23, il démontrait vraiment qu'il avait les qualités pour aller gagner sur tous les terrains », à l'exception de la haute montagne.

Jean-Jacques Henry se rappelle même d'un des premiers exploits de l'Erythréen, face à un des grands noms du peloton actuel.

« Chez les juniors, Biniam est allé faire une course internationale en Belgique, et c'est le seul qui a battu Evenepoel lors d'une course où ils sont arrivés tous les deux au sprint », sourit le formateur.

2022, année magique

Passé par l'équipe marseillaise Delko, il rejoint la formation Intermarché-Wanty Gobert en 2021, et ne tarde pas à s'illustrer.

Jean-Jacques Henry souligne sa capacité à « progresser très vite » : « Biniam est très intelligent, quand on lui donne une consigne il la met en application immédiatement ».

Grâce à cela, l'année 2022 fait figure d'acte de naissance dans le peloton professionnel pour « Bini », qui connaît deux succès de prestige. Il remporte Gand-Wevelgem en mars avant de récidiver lors de la 10e étape du Giro.

La joie est immense, bien que gâchée par un abandon à la suite d'une blessure provoquée par le bouchon du prosecco offert au vainqueur, venu percuter son oeil sur le podium.

Mais l'essentiel est là, avec une arrivée en grande pompe dans la caste des sprinteurs puissants, capables d'avaler les bosses sans se défaire de leur rapidité.

« Ce n'est pas un coureur avec une grosse pointe de vitesse sur un sprint court mais si l'accélération est longue, il peut atteindre une très haute vitesse », affirme Aike Visbeek.

Grâce à cette vélocité, Girmay a mis tout le monde d'accord à Turin et peut viser encore plus haut, selon le manager néerlandais.

« Le Tour des Flandres, Milan-Sanremo, Paris-Roubaix, peut-être même l'Amstel », énumère-t-il, ne s'interdisant pas grand chose pour son coureur. Ce dernier commence à prendre goût au maillot vert, comme en témoigne sa présence dans les sprints intermédiaires depuis son succès turinois.

De quoi faire figure de porte-étendard du cyclisme africain, et inspirer une génération de coureurs, dont certains représentants étaient présents à Dijon jeudi.

« Je suis si heureux, c'est historique », savoure Awet Aman Goniche, 21 ans et champion d'Erythrée en 2023. « Il y a une dizaine d'années Daniel Teklehaimanot avait écrit l'histoire en prenant le maillot de meilleur grimpeur, maintenant Biniam le fait en remportant une étape et en prenant le maillot vert. »