MONTÉLIMAR, France (AFP) - L'Allemand Jens Voigt, vainqueur de la 13e étape, et l'Espagnol Oscar Pereiro, nouveau maillot jaune, ont formé le ticket gagnant d'une échappée monumentale, samedi, à Montélimar (sud), sous la canicule, dans le Tour de France cycliste.

Le peloton est arrivé avec près d'une demi-heure de retard à l'arrivée des 230 kilomètres, la plus longue étape du Tour 2006.

Pour le gain de l'étape, Voigt a devancé Pereiro avec lequel il s'était dégagé à moins de 4 kilomètres de la ligne.

Le Français Sylvain Chavanel et l'Italien Manuel Quinziato, apparemment les plus forts du groupe de cinq fuyards, se sont neutralisés dans le final sur le démarrage de Voigt. Ils se sont classés dans cet ordre, à 40 secondes.

L'Ukrainien Andriy Grivko, cinquième homme du quintette, a été distancé à 26 kilomètres de l'arrivée sur la dernière petite côte du parcours.

L'échappée a pris naissance dès le 21e kilomètre de cette étape de 230 kilomètre, la plus longue du Tour 2006, courue sous la canicule devant la grande foule des vacanciers.

L'écart a grandi au fil du parcours surchauffé pour dépasser vingt minutes à l'approche du 150e kilomètre. Il a augmenté encore par la suite, sans réaction du peloton tranquillement conduit par les équipiers du porteur du maillot jaune, l'Américain Floyd Landis (Phonak), qui n'a pas cherché à défendre sa position.

Economiser les troupes

"Les équipes des sprinteurs n'ont pas roulé hier (vendredi), elles ne nous ont pas relayés. C'est à chacun de prendre ses responsabilités", a expliqué John Lelangue, le manageur de l'équipe suisse, soucieux d'économiser ses troupes avant les étapes alpestres.

Au départ de Béziers, Pereiro, le mieux classé du groupe, était pointé à la 46e place, à 28 min 50 sec de Landis.

L'écart le plus important dans les Tours de l'époque moderne date de 2001, quand une échappée de 14 coureurs avait précédé le peloton de 35 min 54 sec à l'arrivée à Pontarlier. Deux de ses membres, le Kazakh Andrei Kivilev (4e) et le Français François Simon (6e), avaient pris place cette année-là dans les dix premiers à Paris.

"Il reste des étapes de montagne, un contre-la-montre. Il faut garder les pieds sur terre, être réaliste et savourer ce maillot jaune. Quand Floyd (Landis) voudra récupérer ce maillot, il le fera quand il le voudra", a estimé Pereiro, le septième coureur différent à s'habiller en jaune dans le Tour 2006.

L'Espagnol, qui est âgé de 28 ans, a terminé ces deux dernières années à la dixième place du Tour. En 2005, il a gagné l'étape de Pau et a été désigné le coureur le plus combatif de l'épreuve.

"Tout va changer"

A l'intersaison, Pereiro a quitté l'équipe Phonak, pour laquelle il a couru quatre années, afin de rejoindre la formation Caisse d'Epargne.

Le Galicien (28 ans), défait dans les Pyrénées, n'a pu expliquer cette défaillance. "Maintenant, tout va changer. La forme arrive. J'espère faire mieux, être dans les premières positions du Tour", a déclaré Pereiro.

Pour sa part, Voigt a enlevé son deuxième succès individuel dans le Tour, cinq ans après s'être imposé à Sarran (centre de la France).

Le Berlinois, âgé de 34 ans, a donné à l'équipe CSC, privée avant le départ de son leader italien Ivan Basso (écarté suite à l'affaire de dopage espagnole), sa première victoire d'étape depuis le départ de Strasbourg.

"Le moral est revenu dans l'équipe", s'est félicité Voigt, un ancien de la formation française Crédit Agricole. "J'ai sauvé mon Tour".

Dimanche, la quatorzième étape quitte la vallée du Rhône pour rejoindre le pied des Alpes, entre Montélimar et Gap (180,5 km), à la veille de la seconde journée de repos.

Le parcours de moyenne montagne franchit le col de Peyruergue (Km 72,5), en troisième catégorie, suivi par le col de Perty (Km 97), une montée de 8,8 kilomètres (à 5,1 %) classée en deuxième catégorie.

Dans le final, la course aborde un autre col de deuxième catégorie, la Sentinelle (5,2 km à 5 %), dont le sommet est distant seulement de 9,5 kilomètres de l'arrivée.

La descente, acrobatique et tortueuse, conduit directement vers l'entrée dans Gap (40.000 habitants) qui a reçu la Grande Boucle à 18 reprises par le passé.

Le final rappelle celui de 2003, marqué par la chute spectaculaire de l'Espagnol Joseba Beloki dans la côte de la Rochette et le passage à travers champs de l'Américain Lance Armstrong, avant la victoire à Gap du Kazakh Alexandre Vinokourov.

Le classement de l'étape

1. Jens Voigt (GER/CSC) les 230,000 km en 5h24:36.
(moyenne: 42,513 km/h)
2. Oscar Pereiro (ESP/CEP) à 0:00.
3. Sylvain Chavanel (FRA/COF) 0:40.
4. Manuel Quinziato (ITA/LIQ) 0:40.
5. Andrei Grivko (UKR/MIL) 6:24.
6. Robbie McEwen (AUS/DAV) 29:57.
7. Bernhard Eisel (AUT/FDJ) 29:57.
8. Tom Boonen (BEL/QST) 29:57.
9. Carlos Da Cruz (FRA/FDJ) 29:57.
10. Arnaud Coyot (FRA/COF) 29:57.
11. Marco Velo (ITA/MIL) 29:57.
12. Thor Hushovd (NOR/C.A) 29:57.
13. Francisco Jose Ventoso (ESP/SDU) 29:57.
14. Luca Paolini (ITA/LIQ) 29:57.
15. Erik Zabel (GER/MIL) 29:57.

Le classement général

1. Oscar Pereiro (ESP/CEP) 59h50:34.
2. Floyd Landis (USA/PHO) à 1:29.
3. Cyril Dessel (FRA/A2R) 1:37.
4. Denis Menchov (RUS/RAB) 2:30.
5. Cadel Evans (AUS/DAV) 2:46.
6. Carlos Sastre (ESP/CSC) 3:21.
7. Andreas Klöden (GER/MOB) 3:58.
8. Michael Rogers (AUS/MOB) 4:51.
9. Juan Miguel Mercado (ESP/AGT) 5:02.
10. Christophe Moreau (FRA/A2R) 5:13.
11. Yaroslav Popovych (UKR/DIS) 5:44.
12. Markus Fothen (GER/GRL) 5:46.
13. Haimar Zubeldia (ESP/EUS) 5:55.
14. Patrik Sinkewitz (GER/MOB) 7:07.
15. Levi Leipheimer (USA/GRL) 7:08.

Les classements annexes

Points (général):
1. Robbie McEwen (AUS/DAV) 252 pts
2. Tom Boonen (BEL/QST) 222
3. Oscar Freire (ESP/RAB) 207
4. Daniele Bennati (ITA/LAM) 192
5. Erik Zabel (GER/MIL) 172
6. Thor Hushovd (NOR/C.A) 159
7. Luca Paolini (ITA/LIQ) 148
8. Bernhard Eisel (AUT/FDJ) 146
9. Francisco Jose Ventoso (ESP/SDU) 120
10. David Kopp (GER/GRL) 111

Montagne (général):
1. David De la Fuente (ESP/SDU) 80 pts
2. Cyril Dessel (FRA/A2R) 62
3. Fabian Wegmann (GER/GRL) 61
4. Michael Rasmussen (DEN/RAB) 61
5. Juan Miguel Mercado (ESP/AGT) 45
6. Michael Boogerd (NED/RAB) 41
7. Inigo Landaluze (ESP/EUS) 38
8. Juan Antonio Flecha (ESP/RAB) 36
9. Floyd Landis (USA/PHO) 35
10. Christophe Rinero (FRA/SDU) 35

Equipes (étape):
1. Caisse d'Epargne 17h13:42.
2. CSC à 0:00.
3. Cofidis 0:40.
4. Liquigas 0:40.
5. Milram 6:24.

Equipes (général):
1. CSC 179h23:50.
2. Caisse d'Epargne à 15:53.
3. T-Mobile 22:05.
4. Gerolsteiner 22:51.
5. AG2R 27:05.
6. Rabobank 27:26.
7. Saunier Duval 38:08.
8. Cofidis 41:42.
9. Lampre 43:04.
10. Discovery Channel 44:45.
11. Phonak 47:03.
12. Euskaltel 52:14.
13. Agritubel 1h02:44.
14. Bouygues Telecom 1h11:51.
15. Davitamon 1h15:25.
16. Crédit Agricole 1h16:00.
17. Milram 1h21:59.
18. Française des Jeux 1h58:07.
19. Liquigas 2h00:50.
20. Quick Step 2h36:17.

Jeunes (étape):
1. Andrei Grivko (UKR/MIL) 5h31:00.
2. Bernhard Eisel (AUT/FDJ) à 23:33.
3. Francisco Jose Ventoso (ESP/SDU) 23:33.
4. Philippe Gilbert (BEL/FDJ) 23:33.
5. Matej Mugerli (SVK/LIQ) 23:33.

Jeunes (général):
1. Markus Fothen (GER/GRL) 59h56:20.
2. Damiano Cunego (ITA/LAM) à 12:15.
3. Mathieu Sprick (FRA/BOU) 27:16.
4. Andrei Grivko (UKR/MIL) 29:15.
5. Moises Duenas Nevado (ESP/AGT) 31:00.
6. Thomas Lovkvist (SWE/FDJ) 31:39.
7. Christian Knees (GER/MIL) 39:49.
8. Francisco Jose Ventoso (ESP/SDU) 40:30.
9. José Rujano (VEN/QST) 41:08.
10. Joost Posthuma (NED/RAB) 41:21.

Combativité (étape):
Jens Voigt (GER/CSC)

Les déclarations de l'étape

Jens Voigt (GER/CSC), vainqueur de l'étape: "Je n'avais peut-être pas les meilleures jambes de ceux qui étaient dans l'échappée. Mais j'étais celui qui voulait le plus la victoire. Par rapport à moi, car j'avais terminé dernier du contre-la-montre (Rennes). Par rapport à l'équipe aussi. Nous ne sommes plus que six coureurs. Nous avons eu quatre chutes, beaucoup de malchance. Sastre et Schleck se sont bien comportés dans les Pyrénées. Le moral est revenu dans l'équipe. Quand je suis venu dans l'échappée, je me suis dit: +Non, pas encore moi+. Mais le coup est parti. On s'est vite retrouvé avec dix-quinze minutes d'avance. Dans le final, je me suis dit: +Cette étape est pour moi+. J'ai dit à Pereiro qu'il avait de bonnes chances de prendre le maillot jaune, qu'il avait intérêt à collaborer avec moi. Je suis très content. Jusqu'à présent, on ne peut pas dire que j'avais réalisé un bon Tour. Je me suis ôté un gros poids des épaules. J'ai sauvé mon affaire."

Sylvain Chavanel (FRA/Cofidis), 3e de l'étape: "C'est une grosse déception. J'y croyais beaucoup. Sur un relais, j'ai voulu retourner en dernière position derrière Quinziato. Il n'a pas voulu relayer. On a joué, on a perdu tous les deux. Je me demande si je vais finir par en gagner une (étape). J'ai déjà essayé hier (vendredi). Cette fois, j'ai trouvé la bonne échappée. On était serein, on a maintenu un tempo à 45 km/h. Ce n'était pas usant, même s'il a fait très chaud. Un succès aurait été l'étincelle. Je vais essayer de nouveau, je suis loin au général. Pourquoi pas mener un raid comme il y a deux ans quand j'avait été repris dans Luz-Ardiden ? Il faut tenter. J'essaye un maximum mais cela ne veut pas sourire. Cela m'a fait très plaisir d'entendre mon nom sur les bords des routes, beaucoup de gens m'ont encouragé, de vrais supporteurs."

Oscar Pereiro (ESP/Caisse d'Epargne), leader: "C'est une surprise. Je savais que je devais partir. Mais imaginer que je pouvais me retrouver avec le maillot jaune! On s'était mis d'accord avec les autres. Si on arrivait ensemble et si j'étais sûr d'avoir le maillot jaune, je ne disputais pas la victoire. Mais, là, il avait vingt-sept minutes et je n'étais sûr de rien. Avec Voigt, il n'y a pas eu d'accord. Les coureurs de Phonak n'ont pas voulu prendre la responsabilité de devoir chasser toute la journée. J'ai passé quatre ans dans cette équipe: cela devait leur faire plaisir que ce soit moi plutôt. Mais on ne se fait pas de cadeaux dans le Tour. Pour eux, c'est un avantage de ne pas avoir à contrôler la course. Dans mes deux Tours précédents, j'ai terminé dans les dix premiers. Maintenant, tout va changer. J'ai bien récupéré. Mais il faut garder les pieds sur terre, être réaliste. Il reste des étapes de montagne, un contre-la-montre. Quand Floyd (Landis) voudra récupérer ce maillot, il le fera."

Robbie McEwen (AUS/Davitamon), 6e de l'étape: "Il a fait tellement chaud que j'ai dû boire au minimum trente bidons."

Floyd Landis (USA/Phonak), 29e de l'étape: "Cette journée s'est formidablement passée. Il n'y a rien à signaler. Le maillot jaune? Ce n'est pas à Montélimar qu'il faut l'avoir, mais plutôt à Paris. Nous avions décidé de ce petit tempo à développer derrière les échappés."