Lorsqu’un jeune coureur réussit un solide chrono sur une distance importante, cela frappe toujours l’imaginaire. Si vous jetez un coup d’œil à différents sites spécialisés de course à pied, vous verrez occasionnellement passer une nouvelle annonçant, par exemple, que « Un jeune garçon de 14 ans termine un demi-marathon en 1 h 30 ». Ou encore « Une coureuse de 16 ans complète un marathon en un peu plus de 3 heures! » Parfois, ces athlètes sont encore plus jeunes. Beaucoup plus jeunes. Trop jeunes?

Les commentaires sous ces articles sont divisés. Si certains encensent ces jeunes coureurs, d’autres blâment leurs parents de les laisser faire. Ils s’exposent, selon ces derniers, à de sérieuses blessures. Ils estiment qu’un jeune corps en pleine croissance ne serait pas encore prêt à courir aussi longtemps. Car si c’est envisageable pour un coureur de 16 ans de terminer un marathon, l’est-ce bien de le laisser se soumettre au rigoureux entraînement qu’une telle distance nécessite?

Une question de gros bon sens

Quelles sont les distances maximales qu’un jeune coureur devrait parcourir selon son groupe d’âge? La science est vague là-dessus et il n’existe pas d’études claires à ce sujet. Selon moi, une chose est cependant certaine, un enfant va toujours courir tant qu’il aura du plaisir et il arrêtera avant de se blesser.

Alors qu’on pourrait être porté à croire qu’il est anormal, par exemple, pour un enfant de 10 ans de courir un 10 km, on ne se pose pas la même question lorsque ce même jeune joue un match complet de soccer. Il parcourt pourtant une distance importante. Mais jamais il ne nous viendrait à l’esprit de l’arrêter.

La meilleure façon d’initier un enfant à la course à pied est de faire en sorte qu’il ait du plaisir. L’exemple des parents devient alors primordial. Lorsque ceux-ci terminent leur entraînement, ils peuvent proposer à leur progéniture de courir le dernier kilomètre avec eux. Puis, graduellement, ils peuvent inscrire leurs enfants à de courtes distances lors d’événements organisés.

La plupart des fins de semaine de course ont à leur horaire une distance pour les enfants d’un ou deux kilomètres. Franchir le fil d’arrivée d’une course est gratifiant et les encouragera à poursuivre. Si de jeunes Africains courent quotidiennement une dizaine de kilomètres pour aller et revenir de l’école, les jeunes Québécois peuvent certainement se farcir un petit deux kilomètres sans problèmes.

C’est lorsque la distance augmente que les questions commencent à poindre. Quand des jeunes de 7, 8 ou 9 ans veulent courir plus de 10 kilomètres et que ceux de 12, 13 ou 14 ans souhaitent s’inscrire à un marathon, devrait-on les laisser faire? Abîmeront-ils irrémédiablement leurs tendons, muscles ou ossature?

Les conclusions scientifiques se font discrètes à ce sujet, mais un fait demeure : il n’existe aucun incident notable impliquant un jeune coureur au cours des dernières années en Amérique lors d’un demi-marathon ou marathon. Alors si les enfants courent à leur rythme et pour le plaisir, ils peuvent franchir de longues distances sans danger pour leur santé.

On doit faire confiance aux jeunes. Si on leur apprend à bien gérer leur rythme de course et qu’ils sont bien chaussés, ils peuvent nous surprendre. Tout semble naturel chez eux. Observez un enfant courir et vous verrez des foulées parfaites. La clé est de leur faire suivre une courbe de progression qui leur évitera des blessures. Lorsqu’il est fatigué, il s’arrêtera de lui-même.

On peut expliquer à de très jeunes enfants qui veulent participer à une longue épreuve que le chrono n’a aucune importance. Ils doivent courir selon leur ressenti. Leur objectif est de franchir le fil d’arrivée. C’est le  plaisir qui compte! Et s’ils ne se rendent pas au bout, ce n’est que partie remise.

Les parents ont un rôle important à jouer : celui d’accompagnateur. Ils doivent être là pour s’assurer que l’enfant ne se décourage pas. La course à pied nécessite une certaine force mentale et elle s’acquiert avec l’expérience.

En cette ère de sédentarité chez les jeunes, souvent scotché devant des écrans, n’allons pas interdire à un enfant de courir. Poussons-le plutôt à se développer dans une discipline simple et naturelle comme la course à pied. Faisons confiance à son jugement. Il saura quand s’arrêter.