Une coureuse d'exception!
Course à pied mardi, 5 juin 2018. 12:26 samedi, 14 déc. 2024. 09:23« J’ai des priorités dans la vie. Les enfants, la famille occupent une grande partie de mon temps. Le ménage de la maison doit être fait et pas de vaisselle sur le comptoir. Alors là, je peux partir courir ».
Pascale Dubois débarque à peine d’un périple au Japon où elle a couru le marathon de Tokyo, histoire de boucler la boucle des six majeurs dans le monde. On parle ici d’une excellente athlète dont le meilleur chrono fut réalisé à Boston en 2013 en 2h59.
Son talent est inné. Une naturelle qui n’abuse pas. Malgré cette prudence, elle n’a pas été épargnée par les blessures. « Je vais continuer à courir des marathons pour voyager. De cette façon, je parviens à décrocher de la routine. Je désire explorer d’autres continents. Ces périples me procurent du temps pour moi.» Dotée d’une excellente génétique, elle a grandi sur une ferme laitière à Acton Vale.
Pascale adore courir mais la famille demeure sa priorité.
Mère à temps plein de Victor, 14 ans et Rose, 12 ans, elle se consacre entièrement à la vie familiale, ce qui lui laisse peu de temps pour s’entraîner. Afin de démontrer cet aspect, disons qu’elle a couru durant tout le mois de janvier dernier sur un tapis roulant pour Tokyo en février et, elle n’avait pas chaussé ses espadrilles durant les trois mois précédents puisqu’elle devait rénover les chambres de ses enfants ! « Une blessure et la fatigue ont provoqué cette décision », commente celle qui aura 47 ans en août.
« Je ne suis pas vraiment sérieuse. Je mange ce que je veux, je bois ce que je veux et je ne dispose d’aucun programme. » Pourtant, ses résultats illustrent un talent exceptionnel. Elle a obtenu 3h51 en 2009 à New York malgré une fasciite plantaire, 3h20 à Chicago en 2012 et une fracture de stress à une cheville, 3h44 à Londres en 2017 avec encore la fasciite, 3h33 à Berlin l’an dernier puis 3h47 à Tokyo.
Tokyo, c’est 320,000 applications, 37,000 coureurs au départ et 34,000 qui parviennent à le compléter. On doit nécessairement passer par Marathon Tour pour espérer être retenu. Et sortez vos sous ! Un marathon très dispendieux, tellement qu’elle n’a pas voulu parler de chiffres, de peur de décourager les gens qui souhaitent y prendre part.
Le marathon de Tokyo lui a procuré de belles sensations. C'est après le fil d'arrivée que ce fut pénible.
Un vol de 20 heures, un décalage horaire de 14 heures et elle s’est présentée à Tokyo avec un manque de sommeil à cause d’une bronchite. Elle devait prendre ses antibiotiques. « J’ai terminé en hypothermie. Il devait faire 4 ou 5 Celsius à l’arrivée. La marche par la suite était interminable. Je toussais sans cesse. J’ai eu peur. Après avoir reçu ma médaille, j’ai dû refuser une entrevue tellement que je grelottais. Je pleurais. Ça n’allait vraiment pas bien. Honnêtement, ce passage fut plus pénible que le marathon ! »
Pascale cumule 18 marathons à son dossier. Elle a fait ses débuts en 2008. Sur dix ans, elle estime qu’elle a couru six ans ! Car l’été, elle préfère le vélo. « Suite à la naissance de mes enfants, je courais derrière la poussette. Je n’aspirais aucunement à faire des courses organisées. Porter une puce m’énervait ! »
Puis, lors d’une soirée bien arrosée avec une amie, cette dernière l’invita à l’accompagner à Ottawa car elle anticipait courir le marathon. J’ai accepté dans le but de faire le 21km. Ça m’a donné le coup de pied nécessaire pour commencer. Je me suis procurée de vrais souliers, du linge technique pour me lancer dans l’aventure. Finalement, mon amie n’est jamais venue à cause d’une blessure. J’ai invité mon mari et mes enfants dans la chambre qu’elle avait réservée. »
Il existe des périodes dans l'année où elle prèfère rouler plutôt que courir.
L’automne qui a suivi, elle s’est inscrite à son premier marathon. À Toronto, elle a conclu avec un temps de 3h24 pour se classer à Boston… sans le savoir ! Son entourage ne cessait de la féliciter pour cet exploit. « C’est quoi Boston ? » Elle ignorait totalement l’existence et l’histoire de cet événement. Elle a rapidement compris qu’elle venait d’entrer dans les grandes ligues.
Elle qui ne savait pas nager a suivi des cours afin de sécuriser la piscine familiale mais aussi pour entreprendre un demi ironman. En 2013 à Muskoka en Ontario, elle s’est classée pour le Championnat du monde de Tremblant en 2014. Elle s’est inscrite pour l’ironman en août de la même année, compétition qu’elle n’a finalement jamais pu faire puisqu’elle s’est fracturée une main suite à une chute en vélo quelques mois plus tôt lors du demi de Tremblant. « Assurément, j’aurais pu mériter un laissez-passer pour le championnat du monde à Hawaï en octobre mais il faut croire que ça ne devait pas être. »
Elle mijote toujours ce projet d’ironman mais elle croit que cette réalisation se fera après ses 50 ans.
La télévision et le tricot, ce n'est pas pour elle !
Pascale bouge continuellement. « Je reste assis difficilement. La télévision et le tricot, ce n’est pas pour moi. » Et dire qu’elle a déjà fumé entre 12 et 20 ans !
Force est d’admettre qu’elle a appris à rester sur son appétit à l’échelle des performances et du temps consacré aux entraînements car ses possibilités de rendement auraient pu être plus impressionnantes. Or, elle a quand même pu ressentir cette pression que les bonnes performances suscitent. « Malgré tout, pas question de négliger ses priorités. Je cours, je m’assume, je sais que j’ai une force entre les deux oreilles et je parviens maintenant à m’auto diagnostiquer. »
Elle parle de l’Australie pour son prochain marathon en 2019. Toutefois, tard cet automne, on pourrait l’apercevoir sur un parcours.
D'autres réalisations viendront s'ajouter à cette belle réussite pour Pascale Dubois.
Fière de se retrouver parmi les femmes qui ont participé aux six marathons majeurs à travers le monde, elle sait que seulement quatre québécoises détiennent cet exploit et pour la meilleure moyenne des temps obtenus, elle figure en tête de lice.
En me montrant ses muscles de bras, levés vers le haut pour étaler toute sa force, elle m’a dit avec un large sourire : « Moi, je fais des ménages à la maison ».