The Lion’s Song: voir l’invisible

(Source d'image:RDS)

lundi, 20 août 2018. 11:27

Par Mario J. Ramos - Il arrive qu’on tombe parfois sur un jeu dont il est difficile de faire la critique parce qu’on a peur de ne pas trouver les mots pour décrire l’expérience vécue. C'est le cas de The Lion’s Song, qui est un jeu narratif point and click, mais surtout, un chef d’oeuvre.

Venant du milieu du cinéma, je suis pleinement conscient à quel point certains sujets sont difficiles à mettre en scène. Comment écrire une histoire sur un concept abstrait, tout en restant visuel et en engageant émotionnellement le spectateur? C’est très difficile. Pourtant, c’est ce que tente les créateurs de The Lion’s Song, non pas avec un film, mais avec un jeu d’aventure.

Le jeu se divise en quatre épisodes se déroulant tous principalement à Vienne, juste avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Une jeune femme à la recherche de la mélodie parfaite, un peintre ayant la capacité de percevoir les différentes couches de personnalité de ses sujets, une mathématicienne qui essaie d’élaborer une théorie abstraite tout en essayant de se faire accepter dans un monde d’homme... Ces histoires s’entremêlent légèrement, leurs dénominateurs communs étant une Vienne en effervescence créative et la musique du titre, The Lion’s Song, omniprésente.

Bien que le joueur a pour but d’aider les protagonistes dans leur recherche d’inspiration, il ne s’agit pas de quêtes où il faut accomplir une liste d’objectifs. Les solutions, bien que simples, requièrent surtout au joueur d’être attentif, intellectuellement et surtout émotionnellement.

Les mécaniques de jeux sont très simples. Dans le premier chapitre, les scènes sont “statiques” et il suffit de bouger son curseur pour cliquer sur les points d’intérêts pour explorer et faire avancer l’histoire. Les chapitres suivants sont davantage interactifs, permettant au joueur de déplacer le protagoniste. Dans les séquences de dialogues, on peut choisir les répliques. Les actions et dialogues choisis peuvent faire varier le récit. À la fin d’un chapitre, un menu nous indique les choix majeurs qu’on a faits et le pourcentage de joueurs qui ont fait le même choix. Il est possible de rejouer la séquence voulue et faire un autre choix.

À partir du menu principal du jeu, on peut accéder à un “musée” qui contient une pièce par chapitre. Dans ces pièces apparaissent les objets et personnes avec lesquels on a interagi et qui servent de liens entre les différents épisodes. Il est possible d’en rater; on peut donc rejouer les épisodes dans le but de trouver tous les liens.

Les mécaniques d’interactions de The Lion’s Song ne pas particulièrement originales, mais le contenu est à des années-lumière de ce qu’on a l’habitude de retrouver dans un jeu du genre. Il ne s’agit pas d’élucider en puzzle en trouvant des clés ou en combinant des objets dans un inventaire, mais, par exemple: rechercher une mélodie évasive dans des objets mondains, essayer de faire ressortir les différents aspects d’une personnalité en faisant le “bon” choix de dialogue, rechercher un diagramme qui représente un concept abstrait mathématique… Mais au-delà de la quête personnelle de chacun, on retrouve aussi des personnages à la recherche d’identité. Ils ne peuvent atteindre leur objectif tant qu’ils ne se sont pas retrouvés eux-mêmes avant tout. La grande force de The Lion’s Song est ses histoires incroyablement humaines.

La bande sonore est extraordinairement poignante, mais il est important de mentionner tout le travail sonore exceptionnel. Il n’y a pas de voice over, mais c’est tant mieux: on utilise beaucoup des jingles et des sons d’ambiance pour aider à comprendre les puzzles et à bien rendre l’émotion de chaque moment.

The Lion’s Song est oeuvre touchante et visuellement superbe. C’est une oeuvre importante qui devrait davantage retenir l’attention: un véritable “hidden gem”.