Rakeem Cato est désormais le quart numéro un des Alouettes. Après un match, il n'y a plus aucun doute dans mon esprit. Je ne vois pas comment l'équipe pourrait insérer un autre quart que lui après ce qu'on a vu face aux Stampeders de Calgary.

Il a prouvé qu'il était de loin supérieur à tous les autres qui ont joué à la même position depuis le départ d'Anthony Calvillo. Je ne crois pas qu'on s'emballe trop vite avec lui et je prends l'exemple de Tanner Marsh, qui avait connu un premier match du tonnerre quand il a été envoyé dans la mêlée en relève et qu'il avait mené les siens à une victoire spectaculaire contre les Lions. Il avait lancé des bombes et il avait notamment dû compter sur un attrapé miraculeux d'Éric Deslauriers pour un majeur. Marsh a beau avoir un bras canon, il pousse la note un peu trop.

Contrairement à Marsh, Cato n'a rien démontré de négatif. Il a plutôt montré qu'il était calculé et en contrôle. Son ballon est précis et va toujours l'être. Une des choses qui me fatiguent avec Jonathan Crompton ou avec Troy Smith à l'époque, c'était leur imprécision. On n'apprend pas à un gars à être précis dans les rangs professionnels. Il l'est ou il ne l'est pas et Cato l'est. Sa prise de décision est rapide et cet aspect du jeu ne changera pas. Bien sûr, il va commettre des erreurs et être intercepté, mais les aptitudes physiques et stratégiques qu'il a démontrées ne disparaîtront pas. C'est pour cette raison que les partisans peuvent envisager quelque chose de bien.

Quand Crompton va revenir de sa blessure, il sera deuxième dans la hiérarchie. Quant à Brandon Bridge, il n'aura pas sa chance malheureusement. Il n'y a plus de questions sur l'identité du quart numéro un selon moi.

Il serait surprenant que Cato réussisse encore 80% de ses passes lors du prochain match des Alouettes vendredi contre Winnipeg comme il l'a fait lors de son premier départ. Ce serait un peu irréaliste de le croire. D'ailleurs, les plus grandes légendes de ce sport n'ont jamais conservé un tel ratio.

Je pense que les amateurs sont en droit de s'attendre à voir le quart jouer avec le même calme, le même contrôle et la même exécution. Si les Alouettes utilisent le même système face aux Blue Bombers, Cato qui lançait des passes courtes avec un haut pourcentage de réussite, pourrait avoir autant de succès. Cato effectuait la passe et les joueurs faisaient le reste du jeu. C'est ce qu'on réclame depuis la retraite sportive d'Anthony Calvillo alors que les quarts qui lui ont succédé tentaient les longs jeux et ne parvenaient pas à lire le jeu assez rapidement.

La force de Calvillo était de décocher rapidement des passes courtes comme le fait Cato. C'était efficace et on faisait bouger les chaînes tout en contrôlant le temps de possession, mais honnêtement, exiger encore 80% de réussite comme lors de son premier match est trop ambitieux.

Cato nous a permis de découvrir qu'il était un athlète excitant à regarder et très efficace. On avait remarqué certaines de ses qualités lors d'un match préparatoire à Québec plus tôt cette année face à Ottawa. Lors de notre dernier avant-match à RDS, mon collègue Bruno Heppell avait fait remarquer avec justesse que Cato décochait ses passes en bas de 1,5 seconde en moyenne alors qu'on demande généralement à un joueur défensif de rejoindre le quart en 2,5 secondes. Les passes rapides de Cato rendent le travail de la ligne à l'attaque nettement plus facile. La situation force aussi la défense à demeurer sur un pied d'alerte et à agir extrêmement rapidement, ce qui rend son travail pratiquement impossible.

La prise de décision de Cato est fabuleuse pour un gars qui est avec l'équipe depuis moins d'un mois et qui n’a eu aucune répétition avant la semaine dernière. S'il est en mesure de prendre d'aussi bonnes décisions avec si peu de préparation et de réagir aussi vite, j'ai déjà très hâte de voir ce que la suite va nous réserver. Toute la préparation des Alouettes tourne désormais autour de lui, ce qui veut dire que les choses ne peuvent que s'améliorer.

J'ai aimé la précision de ses passes. Il envoyait des beaux cigares parfaits et précis. Le ballon sort bien, vite et se retrouve au bon endroit, ce qui empêche les interceptions et permet aux receveurs d'accumuler des verges supplémentaires.

Je pense que les Alouettes peuvent aussi bien faire contre les Blue Bombers qu'ils l'ont fait face aux Stampders la semaine dernière malgré le fait que la ligne défensive a offert une performance en demi-teinte. Depuis des années que la défense garde le fort montréalais et elle n'a pas connu son meilleur match, mais l'important en fin de compte, c'est la victoire. On a vu une pression du front et on a limité le porteur de ballon Jon Cornish, mais il est arrivé à quelques occasions qu'il y avait des receveurs ouverts. Je pense que c'est plutôt le quart Bo Levi Mitchell qui n'a pas connu une grande partie avec une grande imprécision, qui aurait pu se transformer en touché à quelques reprises. La victoire des Alouettes est une combinaison du bon travail défensif et d'une mauvaise performance du quart de Calgary.

Vendredi, il ne sera pas facile de jouer au stade des Blue Bombers, un endroit bruyant. Winnipeg vient de se faire écraser par Hamilton et l'équipe jouera avec le couteau entre les dents. Les Bombers ont aussi perdu les services de leur quart Drew Willy, qui a été sonné. Il devrait toutefois être à son poste contre les Alouettes.

Je me permets de vous dire que je suis un peu étonné de savoir que Willy va jouer dans trois jours. Je ne pourrai jamais me substituer à un médecin ou à l'athlète lui-même, mais à voir les images de sa blessure, on constate qu'il a été frappé solidement. Willy soutient qu'il n'a pas perdu conscience, mais les bandes vidéo ne mentent pas et il est demeuré au sol sans bouger pendant plusieurs secondes. S'il n'a pas perdu conscience, il n'était certainement pas en état de bouger. Tout porte à croire qu'il a été victime d'une commotion cérébrale même si le club n'a pas prononcé ce mot.

Willy voulait revenir dans la partie et ce sont les physiothérapeutes qui l'ont empêché. Il sera à son poste une semaine seulement après avoir reçu ce coup. L'équipe oublie que nous sommes qu'à la troisième semaine et qu'il reste beaucoup de football à la campagne. Avec tout ce que nous connaissons sur les commotions, je me demande pourquoi on ne lui donne pas une semaine de repos supplémentaire.

Je pense que l'équipe court un risque. Nous sommes en 2015 et la science a démontré qu'une personne qui a été victime d'une commotion est plus susceptible d'en faire une autre surtout quand les symptômes ne sont pas complètement résorbés. J'ai du mal à croire qu'il n'y a plus de symptômes cinq jours plus tard.

Les Blue Bombers parlent d'une blessure au haut du corps et se cachent derrière cette expression pour contourner le protocole de la ligue. Tant qu'on ne parle pas de commotion, le joueur n'a qu'à bien se sentir pour revenir au jeu sans tenir compte de la gravité de la blessure.

Pour revenir au match, Winnipeg est la première équipe qui a une bande vidéo de Cato afin de pouvoir l'étudier. Auparavant, les Alouettes y allaient pour les longs jeux, ce qui amenait des couvertures de zone sur un plus grand territoire alors que maintenant il faut s'attendre à voir l'unité défensive se rapprocher pour contrer les courtes passes de Cato. Winnipeg va chercher à inonder les zones courtes pour frapper rapidement les receveurs.

La ligne défensive des Alouettes va devoir continuer à faire pression dans le but d'atteindre Willy, qui avait très bien fait lors de la première semaine de la LCF. Winnipeg devra garder son quart droit et établir le jeu au sol comme on l'a fait contre la Saskatchewan.

*propos recueillis par Robert Latendresse