Les Alouettes de Montréal ont signé toute une victoire, dimanche, complétant un retard de 21-7 à la mi-temps pour finalement l'emporter 38-31.

Après la victoire contre Ottawa il y a deux semaines, certains observateurs relativisaient la performance des Alouettes puisque le Rouge et Noir connaît une saison extrêmement laborieuse. Après la première demie difficile contre Hamilton, il était clair que cet argument allait revenir. On allait dire que les Alouettes pouvaient seulement battre une équipe d'expansion qui n'a enregistré qu'une seule victoire cette saison.

L'équipe a toutefois montré son plein potentiel en deuxième demie. Ce fut assez spectaculaire comme remontée, le genre de moment qui peut relancer les Alouettes pour le reste de la saison.

À 21-7 à la mi-temps, les Alouettes avaient deux choix. Ils pouvaient baisser les bras ou rester unis en y allant un jeu à la fois. Évidemment, ils ont choisi la deuxième option. C'est bien de constater que, malgré toute l'adversité que cette équipe a vécue, les joueurs n'abandonnent pas. C'est l'élément clé selon moi. Les joueurs poussent toujours dans le même sens et ne se pointent pas du doigt lorsque l'équipe connaît des insuccès, c'est tout en leur honneur.

J'espère seulement que les Alouettes pourront mettre cette bonne performance en deuxième demie en bouteille et la décapsuler vendredi à Edmonton alors qu'ils feront face à un grand défi lors de leur match face aux Eskimos.

Je suis content, pas simplement pour les joueurs et les entraîneurs, mais aussi pour l'organisation au complet. Non seulement ont-ils gagné, mais les Alouettes ont aussi donné un bon spectacle. La foule était bruyante et ça faisait longtemps que je n'avais pas vu autant d'ambiance au Stade Percival-Molson. Les amateurs ont quitté le stade avec le sourire aux lèvres. Ils ont été divertis et avaient l'impression d'en avoir eu pour leur argent, c'est important ça aussi.

Ajustements efficaces à la mi-temps

On avait tous hâte de voir le deuxième départ de Jonathan Crompton au poste de quart-arrière.

Il a manqué de doigté en première demie, lançant notamment une interception retournée pour un touché. À sa défense, l'unité offensive en entier a mal jouée. Les demis à l'attaque étaient incapables de créer des brèches dans le front défensif et les receveurs avaient du mal à se démarquer de façon à permettre à Crompton de leur lancer le ballon. Il faut d'ailleurs donner du crédit à la défense des Tiger-Cats. Je ne m'attendais pas à voir le front défensif de Hamilton être aussi dominant en début de match. Les demis défensifs des Tiger-Cats ont également offert des couvertures solides. Lorsqu’une équipe affronte une défensive homme à homme, il est impératif pour les receveurs de gagner leurs batailles à un contre un pour connaître du succès. Ils doivent gagner lors des trois facettes; c'est-à-dire à la ligne d'engagement, pendant le tracé et lors de l'attrapé. C'est quelque chose que les receveurs des Alouettes n'ont pas été en mesure de faire en première demie.

Le tempérament de Crompton l'a certainement aidé à se ressaisir en deuxième demie. Ce que j'aime chez lui, c'est qu'il demeure calme. Ce n'est jamais trop haut ou trop bas. Il ne semble pas s'énerver. Il est demeuré calme après la première demie difficile et a été en mesure de revenir en force. Il a alors complété 11 de ses 14 tentatives pour 158 verges de gain avec une passe de touché lors des deux derniers quarts. Tout un revirement de situation.

Encore là, les receveurs ont eu un grand rôle à jouer dans le rendement de l'attaque. Ils ont couru de meilleurs tracés, notamment en utilisant des doubles feintes. Ils ont fait croire à la défense qu'ils faisaient de petits tracés avant de changer de direction pour courir de façon verticale. Ils ont utilisé l'agressivité de la défense des Tiger-Cats contre eux. Les demis de coin étaient tellement dans les souliers des receveurs en première demie et cherchaient tellement à rabattre des passes et à faire des couvertures serrées que les Alouettes ont été en mesure de les battre à leur propre jeu en deuxième demie. La passe de 43 verges à Chad Johnson en est un bel exemple. Johnson a effectué une feinte de tracé court en diagonale avant d'appliquer les freins pour partir vers les zones profondes le long de la ligne de côté. Même chose sur le touché de Duron Carter. Son tracé court vers la ligne de côté a incité le demi défensif à couper devant Carter. Le receveur en a alors profité pour courir de façon verticale dans la zone des buts, ce qui a mené au touché. C'est un bel ajustement que les Alouettes ont fait en deuxième demie.

Il faut aussi féliciter la ligne à l'attaque. Ce genre de doubles feintes nécessitent plus de temps et ils ont été capables d'offrir la protection nécessaire à Crompton pour exécuter ces jeux. On a senti une amélioration au niveau de la protection, des passes, des tracés et de la sélection de jeu en deuxième demie. Ça leur a permis de gagner la demie 31-6.

Un seul truc m'a déçu. J'aurais aimé que l'attaque au sol soit impliquée davantage. Les Alouettes n'ont amassé que 14 verges par la course en première demie et 44 verges pour le match. Il faut toutefois préciser que les Alouettes jouaient du football de rattrapage, ce qui explique pourquoi ils ont favorisé le jeu aérien. L'attaque a encore beaucoup de choses à régler, mais il faut retenir qu'elle a été efficace au bon moment et ils ont trouvé un moyen de gagner.

Le Alouettes devront toutefois être en mesure de mieux diversifier l'attaque face aux Eskimos. Dans mes rêves les plus fous, j'aimerais voir l'attaque des Alouettes être aussi équilibrée que celle des Stampeders de Calgary. Les Stampeders ont été un exemple d'équilibre en attaque lors de leurs deux plus récentes victoires face aux Eskimos. Dans le premier de ces matchs, ils ont tenté 28 passes et 29 courses alors qu'ils ont tenté 24 courses et autant de passes dans le deuxième. Cette recette garde l'adversaire sur les talons et il serait profitable pour les Alouettes de s'approcher de ce ratio. De plus, Crompton aurait beaucoup moins de pression si le jeu au sol l'appuyait davantage.

Le niveau de difficulté en augmentation

Ce qui est intéressant dans le cas de Crompton c'est que plus ça va, plus le degré de difficulté augmente. Son premier départ a eu lieu à domicile face à Ottawa, une équipe d'expansion. Cette situation lui a permis de gagner en confiance. À son deuxième départ, toujours à la maison, il a affronté une défensive plus aguerrie, celle des Tiger-Cats. Le niveau de difficulté augmentera d'un autre cran pour Crompton vendredi face aux Eskimos. Il devra maintenant faire face à une excellente unité défensive, bien loin du Stade Percival-Molson. Crompton aura sans doute une motivation supplémentaire alors qu'il affrontera son ancienne équipe. Le fait d'avoir aligné deux victoires de suite pour la première fois de la saison devrait être très bon pour le moral des Alouettes.

J'ai toutefois très hâte de voir de comment la ligne à l'attaque réagira après cette courte semaine de préparation et surtout de récupération. La ligne à l'attaque commence à être drôlement amochée. Des joueurs comme Luc Brodeur-Jourdain ou Jeff Perrett sont très fiers. Ils ne se plaindront jamais, mais on se demande parfois s'ils ne jouent pas juste sur une jambe. Je tiens à souligner leur effort et leur courage pour avoir livré une si bonne performance dans ces circonstances face aux Tiger-Cats.

Cette ligne à l'attaque n'aura pas une tâche facile à Edmonton. Les Eskimos ont une excellente défense et auront sans doute emmagasiné leur part de frustration après deux défaites de suite face aux Stampeders, leurs plus grands rivaux.

Enfin de la stabilité

C'est intéressant que constater une certaine stabilité au niveau de l'unité offensive depuis quelques matchs. C'est toujours le même quart qui joue, le même porteur de ballon et les mêmes receveurs. On peut construire plus facilement des fondations et établir une continuité. En début de saison, on recommençait toujours à zéro et je n'ai plus l'impression que c’est le cas.

D'ailleurs, j'ai bien l'impression que Jonathan Crompton demeurera le quart partant jusqu'à la fin de la saison. À moins qu'il se blesse ou qu'il connaisse une performance désastreuse, j'ai l'impression qu'on a assez joué à la chaise musicale.

Il faut dire que Crompton est mieux encadré que ne l'était Troy Smith en début de saison. Jeff Garcia et Turk Schonert ont été ajoutés au personnel d'entraîneurs et ils sont présents pour le conseiller. Le calendrier est également plus favorable qu'en début de saison alors que Smith était envoyé dans la fosse aux lions face aux meilleures équipes du circuit. Smith étant sur la liste des blessés et Alex Brink ayant été retiré assez rapidement de la formation, j'ai l'impression que l'équipe avait hâte de voir ce que Crompton pouvait faire et je vois mal comment on pourrait le remplacer.

La défense et les unités spéciales condamnées à l'excellence

Le quart des Tiger-Cats Zach Collaros mérite des félicitations pour son jeu en première demie, dimanche. Tout ce qu'il tentait fonctionnait. Lorsque les Alouettes tentaient un blitz, il était capable d'éviter le sac du quart et de courir. Lorsqu'on utilisait une défensive de zone, il était en mesure de découper la zone pour faire le gros jeu. Il semblait toujours avoir une réponse. Il a fait mal aux Alouettes avec son bras, mais surtout avec ses jambes. Il a été capable d'étirer les jeux et d'improviser. Collaros avait vraiment l'air de s'amuser en première demie.

Encore une fois les Alouettes ont réussi à apporter les ajustements nécessaires à la mi-temps. Je ne sais pas si on a confié un rôle d'espion à Bear Woods, mais une chose est sûre, les Als ont menotté Collaros en deuxième demie. Ils l'ont forcé à demeurer dans sa pochette et c'est souvent Woods qui était là pour le rabattre au sol ou l'empêcher de courir.

Le succès de la défense a encore une fois été l'étincelle pour les Alouettes. C'est même la défense des Alouettes qui a ouvert la marque quand Winston Venable a recouvré un échappé avant de le retourner sur 59 verges pour le majeur. Après deux minutes de jeu, les Moineaux menaient déjà 7-0 avant même que l'attaque ne mette les pieds sur le terrain. J'ai été déçu de voir les Alouettes laisser les Tiger-Cats reprendre le contrôle du match par la suite. L'important c'est que les Alouettes aient reparti la machine en deuxième demie. Cette fois c'est Chip Cox qui a provoqué un échappé dans la première minute, ce qui a mené à un placement de Sean Whyte en plus de paver la voie pour la remontée. Il y a ensuite eu l'interception de Byron Parker qui a mené au premier touché de Tanner Marsh. La défense des Alouettes a poursuivi son excellent travail au quatrième quart, forçant les Tiger-Cats à dégager à trois reprises. La défense a été tout simplement parfaite au quatrième quart.

La défense des Alouettes se doit de réussir de gros jeux pour signer des victoires. Elle est condamnée à le faire. La défense n'a provoqué que 17 revirements lors des neuf premiers matchs. Elle nous avait habitués à de plus hauts standards l'an dernier. Elle en a provoqué cinq dimanche et ç'a fait toute la différence. Avec tous les problèmes rencontrés par l'attaque depuis le début de la saison, il est clair que la défense et les unités spéciales doivent compenser.

Parlant des unités spéciales, le retour de dégagement pour un touché de James Rodgers au début du quatrième quart alors que le pointage était égal s'est avéré un véritable coup de masse pour les Tiger-Cats. Les Alouettes avaient drôlement besoin d'un jeu comme celui-là, les retours de botté ayant été pénibles toute l'année. On ne peut pas compter sur des retours pour des touchés pour gagner, mais le rôle des unités spéciales est de donner de courts terrains à l'attaque. C'est ensuite à l'unité offensive de faire preuve d'opportuniste, ce qu'ils ont été en mesure de faire contre Hamilton.

Les Alouettes ont consacré beaucoup de temps sur l'unité de retour de dégagements lors des entraînements, la semaine dernière. Drôle de hasard, ils ont inscrit un important touché de 83 verges.

Au final, l'attaque, la défense et les unités spéciales ont toutes marqué un touché. Difficile de battre une équipe quand toutes les facettes du jeu fonctionnent.

*Propos recueillis par Jean-Philippe Daigle.