MONTRÉAL – Mike Sherman ne se souvenait pas avec précision s’il était marié depuis 34 ou 35 ans et une chance que sa femme était présente pour le corriger. Mais le nouvel entraîneur-chef des Alouettes de Montréal sait une chose, le temps presse pour embaucher ses adjoints.

 

Lucide, Sherman reconnaît que sa priorité doit être la composition de son personnel d’entraîneurs puisque les meilleurs candidats ne courent pas les rues.

 

Honnête, comme il l’exige de ses joueurs et de ses adjoints, il a admis sa vulnérabilité quant à ses connaissances du football canadien.

 

Actif, l’homme de 63 ans entend avoir déniché les hommes qui vont l’entourer dans sa première expérience au Canada pour le 1er janvier.

 

« J’aurais voulu les avoir trouvés pour hier ! », a-t-il d’abord lancé en souriant.

 

« Ça me rend nerveux que ce ne soit pas encore complété. Mais j’aimerais que ça se fasse pour le 1er janvier. Peut-être qu’il manquera un ou deux entraîneurs, mais ça tournera autour de cette date », a exposé Sherman qui ne se la coulera pas douce pendant les Fêtes.

 

Questionné sur cette date qui apparaît optimiste, le directeur général Kavis Reed a appuyé les dires de son nouvel homme.

 

« Oui, c’est possible. On a identifié notre top-3 pour chaque poste », a maintenu le DG.

 

Reed a également confié que tous les entraîneurs qui ont terminé la saison 2017 avec les Alouettes allaient rencontrer Sherman sous peu et ils apprendront sans tarder s’ils conservent leur emploi ou non.

 

Bien sûr, le nom d’Anthony Calvillo a refait surface. Relevé au rôle d’entraîneur des quarts sous Jacques Chapdelaine, Calvillo a encore des croûtes à manger comme entraîneur et il ne s’en cache pas.

 

« Il faudra que le mariage fonctionne entre les deux et ça dépend du désir d’Anthony aussi », a répondu Reed.

 

Embauché officiellement samedi, Sherman s’est donc lancé à la poursuite d’adjoints de haut niveau. Naturellement, il a sondé certains confrères aux États-Unis.

 

« J’ai déjà contacté des entraîneurs avec lesquels j’aimerais travailler. On ne part pas de zéro, mais c’est la chose la plus importante pour implanter ma philosophie. Je veux des gars qui voient les choses de la même manière que moi pour gérer le club », a précisé Sherman.

 

Le nouvel entraîneur assure qu’il aura le dernier mot sur la composition de son personnel. Cela dit, Reed deviendra une ressource importante pour l’encadrer avec des hommes possédant des connaissances approfondies de la LCF. Les noms de Rich Stubler, comme coordonnateur offensif, et Marcel Bellefeuille, comme coordonnateur offensif, continuent d’être soulevés.

 

« Je vais embaucher mes adjoints, mais Kavis sera en mesure de me présenter des candidats. J’ai des connexions avec des entraîneurs au Canada, mais Kavis en a encore plus. Les entraîneurs canadiens comprennent ce sport mieux que quiconque, il n’y aucun doute là-dessus. Mais je veux aussi interviewer des entraîneurs avec lesquels j’ai travaillé et qui pourraient s’adapter selon moi », a répondu Sherman.

 

Le nouveau patron de l’équipe ne pourra pas se tromper sur l’identité de son coordonnateur offensif considérant les ennuis de l’attaque lors des dernières saisons. La logique voudrait qu’il se tourne vers un spécialiste de la LCF, mais il se garde une porte ouverte.

 

Brett Favre et Mike Sherman en 2004« Je veux avoir le meilleur que je peux et ce candidat pourrait bien se trouver au Canada. Ça aide définitivement d’avoir de l’expérience avec du football canadien, mais ça reste du football. Oui, il y a des différences et j’en suis conscient », a déclaré l’homme qui occupait les fonctions d’entraîneur et directeur général avec les Packers de 2000 à 2005.

 

Durant ces années, Sherman a évidemment dirigé le quart-arrière Brett Favre. Il se dit justement persuadé de pouvoir implanter certains jeux de cette époque.

 

« Oh oui, faites-moi confiance. Il devrait y avoir des jeux qui n’ont pas encore été vus ici », a-t-il commenté en piquant la curiosité.

 

« La LCF est une ligue créative, j’ai beaucoup de respect pour les entraîneurs qui ont poussé le jeu à ce niveau. Je vais étudier les tendances rapidement et j’ai hâte de découvrir toute l’influence du joueur de plus et des mouvements des receveurs. C’est amusant pour moi », a souligné Sherman.

 

Nul doute, Reed doit souhaiter que l’arrivée de Sherman facilite l’arrivée de joueurs américains qui connaissent sa réputation.

 

« Je pense que, grâce à certaines de mes connexions dans la NFL avec des équipes et des dépisteurs, on pourra avoir une bonne idée du talent qui pourrait venir nous aider », a noté Sherman sans lever le nez sur l’importance des joueurs canadiens.

 

Après tout, même avec les meilleurs entraîneurs, une équipe ne peut pas aspirer aux grands honneurs sans des joueurs de premier plan.

 

« Chaque équipe traverse des cycles avec des hauts et des bas. Il faudra bien développer des joueurs et c’est l’une de mes forces. Même les meilleures équipes comme les Patriots s’assurent d’améliorer leur club chaque année », a convenu Sherman sans être effrayé par cette partie du mandat.  

 

Différent de Marc Trestman à première vue

 

En l’écoutant parler, on finit par croire que Sherman espère poursuivre sa carrière d’entraîneur pendant plusieurs années. Son dernier emploi en tant qu’entraîneur d’une école secondaire lui a confirmé qu’il était autant motivé par ce métier fort exigeant.

 

« J’ai encore beaucoup d’énergie et de passion. Quand tu embarques dans le train de la NFL qui avance à 100 milles à l’heure, c’est difficile d’en sortir. Je me lève encore à 4h du matin. Je ne crois pas que je vais avoir de la misère à suivre la cadence », a commenté Sherman.

 

Propriétaire d’une maison à Cape Cod, l’entraîneur de carrière et ancien joueur de ligne ne sent pas trop dépaysé de venir s’établir à Montréal.

 

« Ce n’est pas très loin même en voiture. C’est environ à la même distance que si j’avais accepté un travail à Philadelphie », a exposé Sherman qui a été impressionné par les édifices, l’architecture et l’histoire de Montréal lors d’une visite déterminante il y a une dizaine de jours.

« Une très très belle prise »

 

À la conclusion de la conférence de presse, les joueurs des Alouettes n’avaient encore eu la chance de discuter longuement avec Sherman. Malgré tout, ils ont l’impression que l’homme restera fidèle à son discours public.


« Ça fait énormément de bien, les trois dernières saisons ont été des échecs et de grandes déceptions. M. Sherman est vraisemblablement au courant de la passion et du désir de réussite qui règne à Montréal. J’ai aimé voir sa transparence, il n’y a pas de coupure entre ce qu’il pense et ce qu’il dit. On sentait la veine de la responsabilisation des joueurs et la connexion avec les entraîneurs dans ses propos. Ce sont des thèmes récurrents, mais qui ne sont pas toujours authentiques.

 

« Ça prend toute son importance de vouloir se défoncer pour son entraîneur », a rappelé Luc Brodeur-Jourdain.

 

Le vétéran joueur de centre était bien placé pour donner son avis sur Sherman ayant assisté au premier camp d’entraînement  de Marc Trestman en 2008 en plus de jouer sous ses ordres de 2009 à 2012.

 

« Ce sont deux individus différents à première vue, mais j’ai aimé qu’il puisse exposer sa vulnérabilité envers le football canadien. J’étais là pour les débuts de Trestman en 2008 et il avait fait la même chose. C’est rassurant aussi qu’il souhaite s’entourer d’entraîneurs ayant des connaissances du football canadien », a fait remarquer LBJ qui veut poursuivre sa carrière.

 

Même si son optimisme de joueur ne disparaît jamais, Brodeur-Jourdain reconnaît que la reconstruction ne sera pas un chantier mineur.  

 

« Il y a tellement de choses à changer à partir du nouvel entraîneur. On parle d’un nouveau personnel autour de lui et du fait qu’on doit se rajeunir. Ça fait énormément de changements alors il faudra que la colle pogne pour que ça fonctionne sur le terrain. On a besoin d’avoir un bon alignement des astres », a-t-il témoigné.

 

De son côté, le propriétaire Andrew Wetenhall était heureux du vaste remaniement provoqué par l’entrée en scène de Sherman. Il se frottait aussi les mains que le nom soit demeuré secret jusqu’à quelques heures de l’annonce.

 

« Et ce n’est pas le seul nom que vous ne saviez pas parmi les derniers candidats. Vous n’étiez pas proches sur les finalistes », a confié Wetenhall en parlant des journalistes qui n’ont pas su découvrir les plans de son organisation.