La défaite de 31 à 21 des Alouettes de Montréal contre les Blue Bombers de Winnipeg fait mal pour le classement dans l’Est.

 

Lors de la dernière fin de semaine, les Argonauts de Toronto (8-4) et les Tiger-Cats de Hamilton (7-5) ont chacun signé des victoires, ce qui fait en sorte que les Alouettes (6-6) prennent du retard. Avec deux matchs à disputer, je ne rentrerai pas dans tous les scénarios possibles, mais disons que ça sent les rencontres sur la route pour la troupe montréalaise lors des éliminatoires.

 

Cela dit, il y a tout de même une manière de voir le match contre les Bombers avec le verre à moitié plein. Je ne veux pas parler d’une victoire morale, car je ne suis pas un grand fervent de cette expression. Mais, il faut tout de même reconnaître que les Alouettes affrontaient la meilleure équipe de la LCF dans un environnement hostile, et malgré tout, après trois quarts, c’était 21 à 21 au tableau. Il y a du positif à retenir, car les Alouettes ont répliqué pendant 45 minutes coup pour coup avec les champions de la Coupe Grey qui présentent un dossier de 11-1 cette saison. On peut en conclure que les Alouettes ne sont pas loin des Bombers après une prestation qui était loin d’être gênante.

Certains éléments sont cruciaux si tu veux tenir tête en tant qu’équipe aux Blue Bombers. Dans un premier temps, il faut que les joueurs soient prêts à faire preuve de robustesse. Winnipeg rappelle à ses rivaux que le football est un sport physique dont chaque jeu comprend un bloc et se termine sensiblement par un plaqué. Je pense que les Alouettes peuvent dire mission accomplie comme ils ont rivalisé avec les Bombers dans cet aspect. 

 

Il faut également être en mesure de tenir tête aux Bombers dans la guerre des tranchés comme cette équipe s’est bâti une ligne défensive du tonnerre et une ligne à l’attaque très solide. La recette a fait ses preuves par le passé, mais je ne peux pas dire que c’était une réussite chez les Alouettes dans cette rencontre.

 

Même chose en ce qui concerne une autre facette du jeu à laquelle je veux apporter à votre attention, soit les unités spéciales. L’entraîneur-chef Mike O’Shea s’en fait une fierté de connaître du succès sur les unités spéciales. C’était le cas comme joueur, lorsqu’il a commencé comme coordonnateur et maintenant comme entraîneur-chef. Les Alouettes ont été loin de gagner cet aspect.

 

Des solutions sur la ligne à l'attaque

 

Si je pousse mon analyse un peu plus loin à la lumière de ces informations, les Alouettes, ne pourront pas avoir du succès s’ils ne règlent pas leurs ennuis sur la ligne à l’attaque. Elle a été exposée lors des deux derniers matchs devant deux très bons fronts défensifs.

 

Pendant une période, c’était possible de colmater les brèches, mais ça ne tient plus. Je ne sais pas quelle est la gravité de la blessure pour Sean Jamieson et Chris Schleuger, s’ils peuvent revenir pour les matchs éliminatoires, mais en ce moment, le groupe d’entraîneurs des Alouettes doit discuter de la ligne à l’attaque. J’ai toujours cru que même si tu as les meilleurs receveurs ou porteur de ballon, si la ligne à l’attaque ne tient pas le coup, c’est peine perdue.

 

Donc, à moins d’un retour des blessés qui faciliterait grandement le travail, les entraîneurs doivent trouver d’autres options. Ça peut commencer par modifier le ratio de joueurs canadiens et américains. On sait que les Alouettes favorisent un format de quatre Canadiens et un Américain sur leur ligne à l’attaque. Par contre, si on juge que cette unité serait meilleure avec deux ou même trois Américains, c’est ce qu’il faut essayer, car en ce moment, il y a de sérieux ennuis en raison des blessures.

 

Je ne veux pas pointer des joueurs du doigt, car ceux qui sont envoyés dans la mêlée actuellement ne devraient pas l’être, mais ce n’est pas parce qu’ils ne sont pas de bons joueurs de football, c’est simplement, car ils ne sont pas prêts. Avec la réalité des blessés chez les Alouettes, l’équipe n’a pas le choix de puiser dans sa profondeur, mais c’est évident qu’à un moment, cette solution de secours va te rattraper.

 

En ce moment, un joueur comme Samuel Thomassin, qui a manqué du temps de jeu notamment au camp d’entraînement avec une blessure, est devenu le 10e joueur de ligne à l’attaque à être utilisé. Soudainement, on lui demande en tant que recrue de sauter dans la mêlée pour remplacer Philippe Gagnon contre le meilleur front défensif de la Ligue canadienne. On ne peut pas s’attendre à des miracles comme il est placé dans une position désavantageuse.

 

Je ne remets vraiment pas en cause son talent. C’est simplement qu’avec le peu d’expérience et d’entraînements avec l’équipe, il ne devait pas se retrouver dans cette situation. Je vais me faire rassurant, car tout le monde passe par ce qu’a vécu Thomassin. Je me souviens d’avoir été envoyé à mes débuts comme joueur dans un match contre Toronto. Tout ce que je me souviens, c’est que j’ai permis à Rodney Harding de réussir trois sacs du quart et il a ainsi été nommé joueur de la semaine. J’ai dû sauter dans l’action, même si je n’étais pas prêt. La bonne nouvelle, c’est que ma carrière s’est bien passée par la suite, donc un match ne déterminera pas la carrière du jeune homme. 

 

Peut-être que lors du prochain match, les entraîneurs vont se tourner vers l’Américain Nick Callender selon les bilans à l’infirmerie, mais une chose certaine, il faut changer ce qui se passe actuellement.

 

Pour ceux qui seraient moins familiers avec le ratio : il faut sept joueurs canadiens partants, donc si les Alouettes ajoutent un Américain sur la ligne à l’attaque, il faut entrer un Canadien à une autre position. Plusieurs combinaisons sont possibles pour respecter cette règle.

 

Dans une formation à cinq receveurs, il est possible d’en utiliser deux qui viennent du nord de la frontière. Sinon, David Ménard pourrait être partant sur la ligne défensive au lieu de se retrouver dans la rotation. Si jamais les entraîneurs ne veulent pas de ces options, Marc-Antoine Dequoy pourrait à mon avis patrouiller le côté large du terrain. Il est grand et athlétique, et ce morceau de terrain n’est pas attaqué régulièrement par les attaques adverses en raison des dimensions du terrain.

 

Pour clore le sujet de la ligne à l’attaque, des quatre sacs accordés aux Bombers, trois ont été enregistrés par des plaqueurs défensifs. C’est donc dire que la pression provenait du centre de la pochette. Pour un quart comme Trevor Harris, qui veut rester au centre pour lancer le ballon, c’est la pire pression à accorder.

 

La ligne à l’attaque c’est la priorité numéro un pour les Alouettes si l’équipe souhaite se replacer samedi, encore une fois contre les Bombers, et pour la suite.

 

Parlant du quart, c’est vrai qu’il n’a pas connu un grand match, mais comme je viens de le présenter, les difficultés de la ligne à l’attaque y sont pour quelque chose. Harris a tout de même connu de bons moments sur le terrain.

 

Je pense notamment à sa passe de touché à Reggie White fils. Il avait rapidement pris sa décision, sa passe était précise et parfaitement placée pour son receveur afin de contrer les couvertures du demi défensif. Lors du touché à Jake Wieneke, il a bien fait mordre le maraudeur à l’hameçon en regardant du côté droit avant de rejoindre son receveur au centre. Chaque fois, il a obtenu du temps pour que le jeu se déploie. Toutefois, on l’a senti inconfortable dans ce match avec les problèmes de protection. Il a manqué de doigté sur sa première interception en troisième essai et ensuite il se devait de forcer le jeu en fin de rencontre.

 

Je parle beaucoup des problèmes de protection, mais un élément qui aurait contribué à camoufler cet aspect, c’était de se tourner vers le jeu au sol et je ne comprends pas pourquoi William Stanback n’a couru que 16 fois avec le ballon.

 

Les Alouettes étaient dans le coup jusqu’au quatrième quart, donc ils pouvaient encore se tourner vers leur porteur de ballon qui avait récolté 75 verges en 10 courses lors de la première demie. Il a ensuite été limité à six courses pour 31 verges par la suite. En plus, je m’étais gardé une note pour ce match en me demandant si les Bombers seraient en mesure de freiner Stanback au quatrième quart. Ils ne sont pas habitués de faire face à du jeu au sol à ce moment du match, car ils bénéficient toujours d’une avance confortable, donc les autres attaques sont obligées de passer.

 

Samedi, les Alouettes pouvaient garder le jeu au sol dans leur plan de match. C’est plus facile de critiquer après le résultat, j’en conviens, mais depuis le début de l’année, on se fait répéter que l’identité des Alouettes en attaque, c’est Stanback. Dans un match aussi serré contre une excellente formation, il a semblé être mis de côté quelque peu. C’est dommage, car lors des six dernières séquences offensives du match, il n’y a eu que cinq premiers jeux. Il faut reconnaître que l’unité offensive était affectée alors par la perte de Gagnon.

 

Des unités qui ne sont pas spéciales

 

Il n’y a pas que l’attaque qui doit apporter des ajustements. Jusqu’à nouvel ordre, je ne vais plus attribuer le qualificatif de « spéciales » à côté des « unités spéciales » des Alouettes pour les désigner. Vous comprendrez au fil des prochaines lignes que je vise certains aspects de cette unité, car il est difficile de reprocher quoi que ce soit à David Côté pour ses placements et Joseph Zema pour sa précision sur les dégagements.

 

C’est un problème qui persiste depuis plusieurs semaines et il a été mis au grand jour par les Blue Bombers. Il s’agit peut-être de la meilleure unité dans toute la ligue, mais il ne fallait pas en plus lui offrir des cadeaux. Le tout a commencé avec la mauvaise remise sur un botté de dégagement en début de match qui a donné un court terrain aux Bombers qui en ont profité pour inscrire un touché.

 

Sur les huit pénalités écopées par les Alouettes, six provenaient de cette unité, dont trois pour ne pas avoir respecté l’immunité ce qui offre 15 verges. Les retours de botté de dégagement étaient tout simplement anémiques avec une moyenne de quatre verges par retour. Lorsqu’on sait que l’adversaire doit t’accorder un rayon de cinq verges au moment de saisir le ballon, vous comprenez que c’est bien peu comme récolte. Je sais que c’est la chaise musicale chez les retourneurs avec la blessure à Martese Jackson, mais espérons qu’à son retour, ce sera une solution, lui qui est à l’écart avec une commotion cérébrale.

 

On s’aperçoit que les Alouettes ont perdu le positionnement sur le terrain contre une excellente formation. Pour mettre le tout en perspective, chaque équipe a touché au ballon 15 fois dans la rencontre. En moyenne, les Alouettes ont entamé leur séquence à leur ligne de 30, tandis que les Bombers étaient dans leur territoire à leur ligne de 45. Si on fait un calcul rapide, les Blue Bombers avaient toujours un avantage de 15 verges sur les Alouettes pour chacune de leur séquence ce qui fait au final un gain de 225 verges. C’est évident que des revirements ont eu un incidence sur ce chiffre, mais il n’en demeure pas moins que c’est un avantage significatif pour les Blue Bombers dans cette rencontre.

 

C’est un reflet de ce qui s’est passé cette saison, car avant la rencontre, les Bombers occupaient le premier rang de la LCF à ce chapitre avec un ratio positif de plus-1181. Chez les Alouettes, ce nombre était à moins-518 pour le huitième rang. Au final, les Bombers gagnent en moyenne un terrain par match de cette façon pendant que les Alouettes concèdent un demi-terrain à leurs rivaux.

 

Donc si la ligne à l’attaque est la priorité numéro un dans les ajustements à apporter chez les Alouettes, les unités spéciales c’est 1-B.

 

Il est difficile encore une fois de reprocher quoi que ce soit à l’unité défensive qui a rétabli la situation en début de match avec un touché. Toutefois, le revirement qui a mené à ce touché était le seul de la rencontre, donc idéalement, il faudrait en créer un peu plus. J’aurais aimé une meilleure pression sur le quart Zach Collaros qui n’a été victime que d’un seul sac. Parfois, des receveurs étaient laissés complètement seuls sur le terrain comme c’était le cas pour Drew Wolitarsky sur son majeur.

 

Les Alouettes peuvent donc tenter de corriger la situation et ils pourront déjà voir ce qu’ils ont amélioré cette semaine puisque les Bombers seront en ville. J’ai réalisé dans mes recherches que la seule défaite des Blue Bombers cette saison est survenue à Toronto après avoir affronté les Argonauts la semaine précédente à Winnipeg. C’est en quelque sorte le même scénario si les Alouettes veulent s’y accrocher.

 

Ce qui pourrait aussi aider Montréal, les Bombers pourraient décider d’offrir du temps de jeu à leur quart réserviste Sean McGuire. On a vu sur une séquence que Collaros a pris du temps à se relever. Ce jeu seulement pourrait faire réaliser aux Bombers qu’ils doivent savoir ce que leur quart substitut a dans le ventre. Winnipeg est déjà assuré de disputer la finale de l’Ouest, donc si jamais Collaros devait subir une blessure, McGuire ne peut pas avoir son premier test de la saison une fois en séries. Ce pourrait être un bon moment ce samedi pour lui offrir cet examen.

 

Pour les Alouettes, c’est d’apporter les correctifs et même si le premier rang dans l’Est semble à oublier, les Alouettes ne seront pas une proie facile en éliminatoire. Il faut toutefois apporter des modifications et elles doivent survenir dès samedi.

 

Popos recueillis par Maxime Tousignant