Il y a encore beaucoup d’action chez les Alouettes ces temps-ci. Généralement, quand les équipes procèdent à plusieurs changements dans une saison, ce n’est jamais une bonne nouvelle. Ça démontre que l’équipe se cherche et qu’elle est en mode "solutions".

Sans surprise, l’arrivée de Troy Smith fait beaucoup jaser. C’est toujours intéressant de voir qu’un ancien gagnant du trophée Heisman qui a évolué dans la NFL s’en vient dans la LCF. S’il a pris cette décision, j’imagine qu’il est prêt mentalement à venir essayer un nouveau football, dans un nouveau pays et une nouvelle ligue. Souvent, des joueurs n’arrivent jamais à ce point.

C’est normal que ça fasse jaser surtout que plusieurs jeunes quarts épatent cette saison dans la LCF. D’autant plus que Montréal éprouve des ennuis en attaque cette saison et que Anthony Calvillo aura 41 ans la semaine prochaine, si bien que la discussion est magnifiée.

Par contre, il faut faire comprendre une chose aux gens et ça fait plusieurs années qu’on parle de cet aspect. Quand un match devient à sens unique d’un côté comme de l’autre, on s’est questionné à de nombreuses reprises pourquoi le deuxième quart n’embarquait pas dans la mêlée pour gagner en expérience en situation de match.

Avant de parler de l’embarquer dans une partie, les équipes doivent avoir la mentalité de les développer dans les entraînements. Ça revient à l’équipe de prendre cet engagement en offrant des répétitions de qualité aux deuxième et troisième quarts.

Sinon, ça ne nous sert à rien de demander leur présence dans les parties car il faut commencer par préparer la relève à l’entraînement. Après tout, c’est avec ton boulot à l’entraînement que tu gagnes la confiance des entraîneurs et que ton temps de jeu finit par se présenter dans une rencontre.

Je dois dire que ce ne fut jamais une préoccupation pour les Alouettes d’utiliser le numéro deux dans les entraînements, donc ça devient difficile de l’envoyer dans la mêlée dans un match. À mon avis, voilà où le débat doit se situer.

La bonne nouvelle s’avère que depuis l’arrivée de Doug Berry à la tête de l’attaque, Tanner Marsh prend beaucoup plus de répétitions à l’entraînement. J’irais même jusqu’à dire que Marsh a pris plus de répétitions de qualité à l’entraînement avec Berry que lors des cinq premières semaines du calendrier.

Déjà, c’est une amélioration considérable. J’ai réalisé cela en assistant aux entraînements durant lesquels les Alouettes effectuent une reproduction d’une séquence offensive sans caucus. J’aime beaucoup cette approche qui donne un bon rythme à l’entraînement en instaurant cet exercice tôt dans la séance.

En tant que joueur, tu n’as pas le choix d’être concentré au maximum et ça donne le ton pour la suite. De plus, ça permet de procéder à plus de répétitions en moins de temps et ça donne la chance au quart de mener son attaque. J’ai aussi remarqué que chaque quart réserviste obtient une telle séquence ce qui est déjà intéressant.

Les partisans ont beau chialer sur le sujet des quarts en réclamant des changements, mais ça doit commencer par l’équipe en préparant la relève. La responsabilité revient aux entraîneurs de le faire et d’exiger un partage des répétitions.

Bien sûr, tous les joueurs sont pareils et ils veulent effectuer toutes les répétitions. Je l’admets, j’étais aussi comme cela à mon époque et ça n’a pas changé pour les joueurs en 2013. Ça procure une préparation optimale pour les matchs, mais les entraîneurs doivent trouver un équilibre intéressant. Après, les joueurs vont rentrer dans le rang et suivre les consignes.

Évidemment, ce n’est pas un mandat facile pour les entraîneurs car ils veulent avant tout gagner, mais ça prend une variation.

L’entraîneur devrait aussi se protéger en cas d’une blessure à son quart partant. Il devrait se dire que ça peut se produire et il doit éviter que son équipe s’effondre après la perte de celui-ci. C’est normal qu’une telle perte affecte ton équipe même si les Stampeders de Calgary s’avèrent l’exception vu qu’ils ont gagné avec leur numéro deux et leur numéro trois.

Toutes les équipes devraient viser un tel objectif. Ce n’est pas normal qu’une équipe tombe en lambeaux si un joueur se blesse. Je sais bien que certains joueurs ont un impact plus important, mais les espoirs de victoire ne doivent pas s’envoler d’un coup. Une équipe ne peut quand même pas appeler le commissaire de la LCF et se retirer de la saison à la suite d’une blessure coûteuse.

Avant de lancer le débat au poste de quart-arrière, il faut donc que les Alouettes témoignent le désir de préparer la relève.

Un visage connu de retour

Le bon vieux Anwar Stewart (sur la photo) est revenu au sein de l’organisation des Alouettes et il occupe présentement une place sur l’équipe d’entraînement. On a laissé partir Ejiro Kuaje et on ciblait un manque de production de sa part. Je dois avouer qu’un ailier défensif avec quatre plaqués et aucun sac, ça ne semble pas très reluisant comme statistiques.

Anwar StewartMais il faut faire attention parce que les Alouettes emploient un système défensif très particulier et rares sont ceux qui pourront récolter des statistiques impressionnantes. En fait, il faut que tu mettes ton orgueil de côté dans ce système.

Si tu as établi des objectifs personnels en termes de statistiques, tu es mieux de te préparer à ne pas les accomplir et je vous explique pourquoi.

C’est un système qui applique beaucoup de pression avec des surnombres et certains joueurs obtiennent des rôles particuliers comme occuper un joueur de la ligne offensive pour l’empêcher de bloquer ton coéquipier qui héritera du plaqué.

Cette approche implique donc beaucoup de travail ingrat qui ne se reflète pas toujours dans les statistiques.

Le meilleur exemple pour illustrer ce point se nomme Shea Emry. En 2012, il a terminé deuxième au scrutin du joueur défensif par excellence. Il a cumulé 87 plaqués et 7 sacs du quart ce qui était spectaculaire. Après six matchs en 2013, il a amassé seulement 12 plaqués et un sac du quart. Si on multiplie cela par trois pour faire une projection, il pourrait terminer l’année avec 36 plaqués et 3 sacs du quart.

Mais on ne pourrait pas dire qu’il est mauvais pour autant. C’est juste que, dans ce système, il devient un troisième plaqueur déguisé ayant toujours le nez dans la ligne d’engagement. C’est évident qu’il ne pourra pas avoir des statistiques semblables.

Il faut donc faire attention car le système de Noel Thorpe est encore plus basé sur le jeu collectif des 12 joueurs que normalement. En quelque sorte, le système est basé pour Kyries Hebert et Chip Cox. Les autres gars du front défensif forment ce que j’appelle l’entonnoir et on retrouve Hebert ou Cox au bout de celui-ci.

En 2012, ce rôle revenait plus à Emry et ce n’est pas toujours évident d’évaluer le travail de tous les joueurs avec des chiffres.

Pour revenir à Stewart, on ne sait pas encore s’il amassera des statistiques plus inspirantes que celles de Kuale. Il a quand même énormément d’instinct et un quotient intellectuel de football très élevé. Je prévois qu’il sera meilleur contre la course.

Par contre, je me questionne quand même sur ses qualités athlétiques à 37 ans. J’ai hâte de voir s’il pourra pourchasser le ballon de façon aussi efficace. Je le vois davantage du côté court du terrain, mais John Bowman occupe déjà cette position. Je me demande ainsi s’il aura la rapidité nécessaire du côté large du terrain. Normalement, ça prend un ailier défensif très rapide pour couvrir ce grand espace et ce n’est pas évident à accomplir.

Trois éléments cruciaux en Saskatchewan

Il y a trois choses sur lesquelles je vais plus me concentrer sur l’imposant défi de samedi contre les Roughriders en Saskatchewan et je ne parle même pas de joueurs et de stratégies.

En premier lieu, c’est le bruit et son impact sur la rencontre. Ce sera un gros ennemi pour les Alouettes. C’est déjà le cas à Regina en temps normal et les Riders ont ajouté des bancs en prévision de la présentation de la Coupe Grey.

J’ai donc hâte de voir l’exécution et la précision de l’attaque des Alouettes qui éprouve des ennuis en 2012.

L’ancien joueur de ligne à l’attaque en moi souhaite une attaque équilibrée. Si jamais la passe prenait une place trop imposante, la cadence silencieuse serait requise et ce serait inquiétant. Je me souviens que la ligne défensive des Blue Bombers a volé le compte très souvent contre les Alouettes à Winnipeg. Par conséquent, Calvillo a encaissé plusieurs coups et j’aurais peur d’assister à un carnage dans un tel contexte.

Enchaînons avec le vent. Tu ne peux jamais prédire son influence dans ce stade où il est rarement calme. C’est tellement éprouvant que tu te retrouves avec 30 petites minutes pour inscrire tes points. Quand tu fais face au vent, tu deviens en mode survie et tu veux juste garder la tête en haut de l’eau. Ainsi, si ton attaque peine, tu joues avec le feu.

Bien sûr, le vent affecte aussi le travail sur les unités spéciales et ce sera un élément à surveiller.

Je termine avec la douleur! Ça fait des années que les Riders représentent une équipe très physique. C’était déjà un peu leur marque de commerce dans mon temps. Ils construisent des équipes avec beaucoup de hargne et, à la blague, je dis que le gérant d’équipement doit ajouter une mentonnière à chaque casque parce que ça frappe fort! Les joueurs sont mieux d’attacher leur casque avec précaution.

Les Alouettes doivent ainsi être prêts à souffrir. Contre Toronto, le début de match a provoqué un choc, mais tu ne peux pas te présenter à Regina sans passion ou émotion parce que ça fera mal.

Petite anecdote sur Wayne Gretzky

Pour changer complètement de sujet, je voulais vous raconter une petite anecdote en lien avec le 25e anniversaire de l’échange de Wayne Gretzky qui a été célébré la semaine dernière, le 9 août. Je m’adresse aux partisans un peu plus âgés en vous demandant où vous étiez en cette journée?

Personnellement, cet événement me rappelle que c’était mon premier camp professionnel en 1988 avec les Patriots de la Nouvelle-Angleterre. Bien sûr, j’ai été marqué par ce moment important dans ma carrière et je me souviendrai toujours de la journée que Gretzky a quitté les Oilers pour les Kings. 

Andre TippettJe n’avais pas encore appris la nouvelle quand je me suis retrouvé à la cafétéria pour manger et que j’ai senti quelqu’un se placer devant moi. J’ai alors entendu une grosse voix dire : « Tu es bien Canadien, toi ? » 

Je me suis levé les yeux et j’ai répondu oui en m’apercevant que c’était Andre Tippett, le secondeur vedette des Patriots que l'on voit sur la photo contre John Elway en 1984, récemment intronisé au Temple de la renommée du football américain, qui m’adressait la parole.

Il a commencé à m’enguirlander en me disant : « C’est comme cela que vous traitez vos meilleurs athlètes au Canada ! Ça n’a aucun sens! »
Il était outré par cette transaction impliquant le meilleur joueur surtout qu’elle impliquait un montant d’argent.

Il trouvait cela scandaleux et ça m’a fait rire parce que vous comprendrez que c’est la seule fois qu’il m’a parlé durant le camp d’entraînement!
Les réactions étaient donc vives même au football et ce joueur américain était scandalisé puisque, d’une certaine façon, il était la grosse vedette des Pats.

*Propos recueillis par Éric Leblanc.