Le mois de juin est synonyme de retour du football de la LCF, et c’est avec un énorme plaisir que je renoue avec vous, chers internautes, à quelques semaines du début de cette nouvelle saison!

Compte tenu de tous les changements effectués par les Alouettes depuis la fin de la saison 2016, il y a de nombreux aspects à analyser à quelques semaines du coup d’envoi.

Depuis la nomination de Kavis Reed à titre de directeur général, il y avait eu beaucoup de positif dans l’entourage de l’équipe. Les signatures intéressantes se sont succédé, et on a senti une grande unité parmi les dirigeants de l’équipe.

Une image m’a d’ailleurs marqué durant la télédiffusion du repêchage, il y a quelques semaines. Un plan de caméra nous montrait le quartier général des Alouettes. En figeant l’écran, on s’apercevait que tout le monde y était, du président Patrick Boivin en passant par Jacques Chapdelaine, les recruteurs de l’équipe et même les responsables des communications.

Sur le coup, je me suis dit : « Wow! Ça fait longtemps qu’on n’a pas vu le secteur administratif être aussi uni et aligné! » Ça m’a donné beaucoup d’espoir à l’approche de cette saison de renouveau.

Malheureusement, il s'est produit un faux-pas en début de semaine avec la décision de libérer le vétéran Bear Woods de son contrat. J’essaie de rester raisonnable et de garder en tête qu’un événement isolé ne peut ternir tout le reste, mais je suis d’avis qu’on n’avait réellement pas besoin de ça. Cette annonce vient carrément porter ombrage à une entre-saison remplie de promesses.

Bear WoodsJe comprends que ce type de décision fait partie du business qu’est le sport. Des joueurs sont échangés, retranchés ou prennent leur retraite. Sauf qu’on a été très maladroit chez les Als dans ce dossier.

Trois aspects m’ont particulièrement chicoté : d’une part, le timing. De procéder à cette annonce un lundi matin, très tôt, après une seule et unique séance d’entraînement, effectuée sans épaulières de surcroît, c’est particulier. Surtout qu’on parle ici du joueur défensif de l’année en titre dans l’association Est.

On nous assure que les jeunes joueurs sont prêts à occuper un rôle prépondérant à la position de secondeur intérieur. Peut-être que l’évaluation qui a été faite s’avérera exacte – seul le temps nous le dira –, mais il n’en demeure pas moins que le rendement de ces jeunes joueurs a été analysé dans un camp de recrues, et que le jeu se faisait sans équipement. Ce ne serait pas la première fois que des joueurs en mettent plein la vue sans les épaulières avant de disparaître par la suite.

Un niveau de jeu remplaçable, vraiment?

L’approche utilisée par Kavis Reed m’a aussi déplu, tout comme le message que cela envoyait. On a tenté de justifier la décision par le niveau de jeu de Woods. C’était d’une grande maladresse. Je comprends que Reed ne peut nous fournir toutes les informations. Mais de toutes les excuses valables pour expliquer la libération de Woods, celle du niveau du jeu est la moins crédible.

Woods est un leader en défensive, et un joueur qui a possiblement une influence toute aussi positive dans le vestiaire et la salle de réunion que sur le terrain. N’aurait-on pas pu attendre jusqu’à la tenue du premier match simulé? Cela aurait permis de créer une compétition, un aspect tellement important dans un camp d’entraînement. Et qui de plus compétitif que Bear Woods?

Kavis ReedBref, amenée de cette façon, je trouve l’annonce des Alouettes difficile à avaler. Qu’on nous justifie le tout en parlant du long historique de blessures ou de la place qu’il occupait sur la masse salariale aurait été bien plus logique.

J’émets une hypothèse : Woods serait-il passé à un cheveu d’échouer le test médical qu’on lui a fait passer à son arrivée? Est-ce que cela a rendu Reed nerveux? Si c’est le cas, le retranchement aurait pu se produire samedi, et non au lendemain de la première journée du camp.

Une chose demeure certaine : le fait de conserver ou de retrancher un joueur pour les mauvaises raisons ne sera jamais bien reçu dans un vestiaire de football. C’est une importante source de distraction potentielle.

Certains diront qu’un nouvel état-major cherche souvent à imposer sa philosophie et à envoyer le message que personne n’est à l’abri de perdre son poste. Je crois qu’on avait déjà fait passer un message clair en mettant fin à l’association avec les Jeff Perrett, S.J. Green, Alan-Michael Cash, Marc-Olivier Brouillette et Winston Venable. Le ménage n’avait-il pas déjà été fait?

Je suis conscient que les Als ont été exclus des matchs éliminatoires lors des deux dernières saisons. Peut-on honnêtement dire, cependant, que ces exclusions étaient attribuables à un mauvais rendement de la défense? Certainement pas! D’aller faire cela à un leader de la défense, c’est particulier.

Deux visions à concilier

Qui plus est, ce genre de retranchement a toujours plus de punch lorsqu’ils est le fruit d’une réflexion de l’entraîneur-chef, celui qui les côtoie au quotidien.

À mon sens, cela nous ramène à un débat existentiel dans le monde du sport : celui entre la vision du DG, qui privilégie souvent le moyen à long terme, et celle de l’instructeur, qui vit dans l’immédiat. C’est le tiraillement classique entre les deux postes. Cela me ramène au dicton de Bill Parcells, qui avait affirmé : « C’est moi qui dois faire la recette? Qu’on me laisse faire le choix des ingrédients. » Je pense que Bear Woods était un ingrédient important de la recette de Jacques Chapdelaine.

Historiquement, les Alouettes ont connu du succès lorsqu’ils s’en remettaient à des entraîneurs forts. Je parle ici de Don Matthews et de Marc Trestman. C’était eux qui s’imposaient comme messagers devant les membres des médias. Avec sa sortie publique suivant la libération de Woods, on peut dire que Chapdelaine souhaite être une voix forte lui aussi.

D’ailleurs, je ne serais pas étonné d’apprendre que le Québécois a eu son mot à dire dans l’arrivée des trois grosses prises de l’équipe en offensive, soit Darian Durant, Ernest Jackson et Jovan Olafioye.

Quel est le dénominateur commun entre ces trois joueurs? Ils ont tous évolué sous Jacques Chapdelaine. Sa présence a sans aucun doute contribué à ce que ceux-ci fassent de Montréal leur nouveau domicile. Reed a été bon pour négocier avec ces nouveaux-venus – il ne faut pas lui enlever cela – mais son coach a aussi eu son influence. En rajoutant cela à l’équation, on peut encore mieux comprendre le mécontentement de l’entraîneur par rapport à l’incident Woods.

On se doit toutefois de souligner que le désaveu de Chapdelaine envers son DG n’était pas nécessairement la réaction la plus appropriée. Oui, j’admire son franc-parler et il est difficile d’être en désaccord avec lui.  Mais à quelque part, tu ne peux pas contredire ton patron en public comme ça. J’espère pour eux que ce n’est pas qu’un simple accro et que la suite des choses se fera dans l’harmonie et dans l’entraide.

Les Alouettes sont sur un élan positif. Ça serait bien dommage que cet incident vienne mettre un frein aux progrès réalisés durant l’entre-saison. C’est simplement de l’adversité et il faudra passer par-dessus au cours des prochaines semaines.

* propos recueillis par Maxime Desroches