Contrairement à l’arrivée de Troy Smith, celle de Tyrell Sutton dans l’entourage des Alouettes de Montréal s’est effectuée sans tambour ni trompette à l’image de cet athlète qui a évolué pendant deux saisons avec les Panthers de la Caroline.

Diplômé en communications de la prestigieuse Université Northwestern – située en banlieue de Chicago –, Sutton préfère laisser parler ses actions sur le terrain même s’il est un interlocuteur très volubile et agréable.

Les Alouettes l’ont embauché dans l’ombre causée par les matchs préparatoires le 23 juin, la même journée que le receveur Duron Carter. À ce moment, personne ne pensait que cet athlète polyvalent se verrait confier le poste de porteur de ballon numéro un puisque Brandon Whitaker, Chris Jennings et Jerome Messam se retrouvaient notamment devant lui dans la hiérarchie de la position.

Tyrell SuttonMême s’il a disputé 16 matchs en deux saisons avec les Panthers, Sutton s’est montré discret et il s’est graduellement acclimaté au football canadien pour hériter de la confiance des entraîneurs après un concours de circonstances incluant une autre blessure de Whitaker.

« C’était une question de s’ajuster à la LCF. Nous avions aussi beaucoup d’expérience au sein de l’équipe et nous avons entamé le calendrier avec Chris, Brandon Whitaker, Jerome et même Noel Devine. Je suis donc le New Kid on the Block! », a-t-il décrit en riant.

« Je devais gagner mes épaulettes et me prouver aux entraîneurs. Quand ton numéro finit par être appelé, tu dois répondre aux attentes », a ajouté celui qui a produit 121 verges (84 par la course et 37 par la passe) et un touché à son premier départ samedi contre Hamilton.

Sutton a vécu cette attente avec sagesse puisqu’il se retrouvait sans boulot après avoir été récemment retranché d’un camp estival des Lions de Detroit sans oublier son séjour d’une année dans la UFL en 2012.

« Les Alouettes ont contacté mon agent et c’était une opportunité venue du ciel surtout que je n’étais pas rouillé. Je n’avais pas vraiment de plan donc j’étais heureux de venir tenter ma chance au Canada et j’étais content de cet intérêt », a confié l’athlète de cinq pieds huit pouces et plus de 200 livres.

À ce moment, Sutton en savait très peu sur le circuit canadien outre que certaines de ses connaissances avaient accepté de franchir la frontière. Quatre mois plus tard, il poursuit son apprentissage de ce style différent et il est persuadé de pouvoir briller sur les larges terrains canadiens.

« Absolument, et la confiance est un ingrédient important pour y parvenir. Par contre, je dois m’assurer de faire les bonnes choses comme apprendre tous les rudiments et détails du football canadien. Certaines petites nuances m’échappent encore », a avoué Sutton avec franchise.  Tyrell Sutton

Depuis son arrivée, le demi offensif n’a peut-être pas poli son jeu à son goût, mais il a conquis ses coéquipiers par son style agile, physique et explosif. 

« Il n’a peur de rien! », lance S.J. Green sans hésiter une seconde pour le décrire. « C’est un excellent porteur de ballon, il possède toutes les qualités nécessaires. »

Reconnu pour avoir déployé ses tentacules un peu partout sur la planète football, le directeur général et entraîneur-chef Jim Popp n’a pas eu besoin de chercher très loin cette fois pour repérer cet athlète polyvalent.

« Je l’ai souvent vu jouer au niveau universitaire et avec les Panthers qui évoluent tout près de mon domicile. Il faut se rappeler qu’il était coincé derrière deux très bons porteurs de ballon et il était prêt à devenir centre-arrière et retourneur de bottés pour fouler le terrain », a mentionné Popp en faisant allusion à Jonathan Stewart et DeAngelo Williams.

« Quelques années plus tard, il s’est retrouvé sans emploi et nous pensions qu’il aurait du succès s’il acceptait de venir ici. Depuis qu’il est ici, on revoit le même athlète qu’à Northwestern et dans la NFL », a-t-il ajouté.

Loyal sans faire une croix sur la NFL

En grandissant à Akron en Ohio, Sutton était comme beaucoup d’enfants américains, il voyait son grand frère comme une inspiration et il suivait le parcours de plusieurs de ses idoles dans la NFL.

Tandis que le parcours de son frère (Tony) s’est arrêté au niveau universitaire, Sutton a eu le privilège d’atteindre le circuit de ses rêves en appartenant aux Packers, aux Panthers, aux Seahawks et aux Lions.

« Aaron Rodgers est tout simplement incroyable, mais Marshawn Lynch m’a énormément impressionné. Il est tellement dominant ! C’est phénoménal de voir, en personne, tout ce qu’il peut accomplir tous les jours à l’entraînement et dans les matchs. C’est aussi une personne très agréable », a témoigné celui dont les qualités de receveur sont éloquentes.

« Leon Washington, DeAngelo Williams, Steve Smith qui est une légende… Je ne peux pas nommer tous les joueurs dont j’ai suivi le parcours et que j’ai pu côtoyer par la suite. »

Optimiste de nature, Sutton serait bête d’avoir déjà renoncé à la NFL à 26 ans, mais il a mis une pause sur cette option.

« Qui sait? Je ne suis pas du style à regarder les choses dans ce sens. Je préfère apprécier le moment présent. J’aimerais connaître une carrière de plusieurs saisons et je suis un athlète loyal. La NFL n’habite pas mes pensées parce que je veux seulement aider les Alouettes à gagner la coupe Grey », a noté celui dont le gabarit ne laisse pas présumer son côté robuste.

À défaut de s’être établi dans la NFL, Sutton peut se réjouir des statistiques obtenues dans cette ligue. Avec les Panthers, il a amassé 139 verges en 25 courses pour une moyenne de 5,6 verges en plus de 132 verges sur 18 passes captées.

Tyrell Sutton contre les Patriots en 2009« Je suis très content de ce moment de ma carrière et je ne changerais rien de cette époque. Tout est arrivé pour une raison et la vie m’a mené ici et j’apprécie cette occasion. Je suis reconnaissant envers les Alouettes et Jim Popp d’avoir remarqué que je pouvais encore jouer au football », a-t-il tenu à souligner.

Son rendement ne laisse aucun doute, il peut encore épater sur les terrains de football et il a failli convaincre les Seahawks de le retenir avec eux en 2012.

« J’ai participé à trois matchs préparatoires, mais c’était difficile de percer la formation avec le repêchage effectué (la sélection de Robert Turbin) et les joueurs en place (Lynch et Washington). Je n’ai pas mal joué, mais ça arrive d’être écarté parce que c’est une industrie et je n’en suis pas frustré parce que ma carrière se poursuit », a relaté Sutton. 

L’Université Northwestern, étant reconnue pour son côté académique, Sutton pourrait sans doute se bâtir une deuxième carrière florissante en communications, mais il ne faut pas sauter trop vite aux conclusions.

« Je n’ai pas encore arrêté mon choix et j’avais commencé à aborder le travail d’entraîneur avec un ami en Californie. Dernièrement, j’ai eu la chance d’expérimenter la vie hors du football donc je suis mieux préparé pour la suite. Je présume que mon travail sera un peu relié au football parce que je ne crois pas que je pourrai quitter cet univers si facilement », a évoqué le sympathique numéro 37.

D’ailleurs, il se dit très heureux en sol montréalais malgré les aléas de la météo.

« Je me sens bien à Montréal, il fait tellement froid que j’ai l’impression d’être à Chicago », a-t-il rigolé avec une référence à son université aux abords du Lac Michigan.