MONTRÉAL – Trente ans après avoir fréquenté le Stade olympique en tant que joueur des défunts Concordes de Montréal et de l’ancien chapitre des Alouettes, Jacques Chapdelaine y est revenu à titre d’entraîneur.

Trois décennies plus tard, le Stade olympique n’a pas vraiment changé outre le fait qu’il a un peu – ou beaucoup selon votre vision – craqué et que son toit a été remplacé à quelques occasions. À 54 ans, Chapdelaine devait donc ressentir la sensation d’avoir reculé dans le temps.

Par contre, ses nouvelles fonctions d’entraîneur des receveurs et de conseiller spécial au coordonnateur offensif (Anthony Calvillo) ne se comparent pas à celles de l’époque. De plus, elles exigeront certainement plus de temps dans son nouveau bureau que sur la vieille surface synthétique qui recouvrait le béton en 1985 et 1986.

Si les organisations montréalaises traversaient, au milieu des années 1980, des crises menant à leur disparition, le mandat actuel de Chapdelaine consistera à relancer une attaque qui a perdu de son lustre dernièrement.

Celui qui deviendra le bras droit de Calvillo pourra miser sur un afflux de talent au poste de receveur avec les retours de Duron Carter et Kenny Stafford ainsi que les prolongations de contrat accordées à Samuel Giguère et Nik Lewis. La brigade aérienne compte aussi sur S.J. Green, B.J. Cunningham, Alex Charrette et Cody Hoffman notamment.

« On blaguait entre nous (les entraîneurs) que ça prendrait deux ballons pour utiliser tous les outils à notre disposition. La beauté de ces joueurs, c’est qu’ils sont très explosifs et qu’ils ont déjà prouvé qu’ils peuvent se démarquer dans des situations critiques. Ça permet de déjouer des stratégies défensives en axant le plan de match sur différents joueurs », a réagi Chapdelaine qui préfère de loin l'ambiance qui règne au Stade Percival-Molson à celle de son époque au stade de la rue Pierre-de-Coubertin.

Cette abondance de munitions pose toutefois le risque de provoquer certaines frictions particulièrement entre les athlètes de pointe que sont Carter et Green. Arrivé à sa sixième équipe dans la LCF, Chapdelaine en a vu d’autres, c’est le moins que l’on puisse dire.

« L’an dernier en Saskatchewan, il y avait des joueurs comme Weston Dressler et Chris Getzlaf et je me souviens d’avoir dirigé Geroy Simon et Jason Clermont avec les Lions. On parle de grands joueurs du football canadien. Dans mes systèmes offensifs, ces joueurs vont avoir leur chance d’avoir un mot à dire dans les succès de l’équipe et ils vont bien comprendre que leur contribution va aider au succès global », a soupesé l’entraîneur d’expérience.

Dans le cas de Carter, son retour dans le nid comporte une facette supplémentaire, celle d’un comportement parfois précieux. Le fils du légendaire Cris n’est pas parvenu à se tailler une place dans la NFL et il risque d’essayer une fois de plus après la saison 2016.

« Je ne le connais pas personnellement. Mais j’ai toujours su une chose, c’est probablement un des avantages d’être aussi âgé que moi, c’est que normalement les joueurs veulent bien faire. Dans le cœur d’un homme, il veut avoir du succès et aider son équipe. Je pars avec ce principe et Duron a grandi près du football professionnel. Il a probablement subi des contretemps et il a certainement appris de ça. On devrait apprécier la façon dont il va aborder les choses cette année », a évalué l’homme qui s’exprime tel un enseignant.

« Je n’ai aucune crainte sur sa façon de s’intégrer avec le groupe. S.J., Lewis, Stafford, Giguère et les autres pourront amener du leadership. J’ai souvent dit que des bonnes personnes qui sont des bons joueurs, ça fait de bonnes équipes », a-t-il ajouté du même souffle.  

Avec sa forte personnalité, Chapdelaine ne se gênera pas pour bien encadrer ses receveurs et il pourra aussi se fier sur Calvillo pour insister sur une mentalité altruiste.

« J’ai souvent blagué que c’est la responsabilité du coordonnateur offensif de garder tout le monde heureux et cette mission repose maintenant sur mes épaules. Ce sera toujours un défi, on a beaucoup d’armes intéressantes, mais S.J. et Duron ont déjà joué ensemble et ils ont eu du succès. Que ce soit S.J., Duron, Sam, Nik ou Kenny, ils doivent comprendre que nous sommes ici pour gagner des matchs et c’est une conversation que je vais avoir avec eux », a confirmé Calvillo qui affiche une assurance bonifiée depuis quelques mois.

Une attaque plus audacieuse grâce à la défense

En collaboration avec Calvillo, Chapdelaine devra contribuer à relancer l’attaque montréalaise qui bat de l’aile surtout depuis deux saisons. Le Sherbrookois n’a pas eu besoin de réfléchir pour identifier la principale cause de ce ralentissement à ses yeux.

« Sans vouloir pointer personne du doigt, il y a eu plusieurs entraîneurs impliqués en attaque et ça devient difficile quand tu manques de continuité. Anthony souhaite d’ailleurs se rapprocher de ses bonnes années sous l’ère de Marc (Trestman) », a proposé Chapdelaine.

La tangente a emprunté une trajectoire un peu plus rassurante à partir de l’arrivée de Kevin Glenn et Chapdelaine se dit ravi de pouvoir favoriser le développement des jeunes quarts poussant derrière le vétéran de 36 ans.

En se joignant au groupuscule offensif des Alouettes, Chapdelaine salivait à l’idée de penser qu’il bénéficierait de l’étincelant rendement de l’unité défensive des Oiseaux. Si ses visées se concrétisent, la saison 2016 s’annonce plus emballante.

« On sait que la défense a été solide et qu’elle continuera de l’être. Si on se rapporte au Super Bowl, les défenses sont là pour permettre aux attaques d’être plus agressives quand elles peuvent le faire. Je trouve que c’est libérateur de savoir qu’on peut être plus agressif parce que la défense peut se démarquer de manière imposante », a soulevé Chapdelaine avec justesse.

Pivot d’une attaque explosive pendant de nombreuses saisons, Calvillo a l’intention d’utiliser tous ses collègues pour établir les fondations du nouveau système offensif.  

« J’ai demandé à mes adjoints de partager leurs opinions et de confronter nos idées, c’est la seule façon de trouver la meilleure solution. On aura cet apport de la part de Jacques surtout que mon expérience est limitée comme coordonnateur offensif. On va disséquer les propositions et voir si ça fonctionne. On veut bâtir quelque chose de très excitant », a révélé AC qui espère solutionner la perte de Josh Bourke sans anicroche.

« Je vais piger dans mes idées qui viennent de Marc ou Don Matthews, Kris (Sweet, entraîneur de la ligne offensive) ajoutera les siennes et Jacques également. Mais la chose la plus importante, c’est qu’on repart à zéro pour être confortable ensemble. Notre identité demeure à finaliser, mais ce sera amusant à fignoler avec toutes nos connaissances », a fait remarquer Calvillo qui parle plus que jamais comme un entraîneur.