Vendredi soir, pour la première fois durant la première moitié de calendrier décevante des Alouettes, on a pu déceler à travers les commentaires d’après-match des joueurs ce que je désignerais par du « pointage de doigt ».

De façon détournée, on reprochait par exemple à l’unité offensive de n’avoir produit qu’un seul touché, une fois de plus. Ce sont assurément des choses que chacun pensait déjà, mais de les entendre prononcées à haute voix marque un élément de nouveauté.

À mon avis, c’est un territoire dangereux. On entre en terrain glissant lorsqu’on se met à exposer les raisons des insuccès du groupe et à s’en dissocier d’une certaine façon. Ce sera à surveiller.

« Nous n'avons pas profité des opportunités »

Après le revers face aux Blue Bombers de Winnipeg, Bowman a pointé du doigt à sa façon en écorchant le travail effectué par les arbitres.

J’ai énormément de respect pour le vétéran ailier défensif des Als, sauf qu’il l’a échappé sur celle-là. À preuve, les Bombers ont écopé de 15 pénalités, leur coûtant un total de 151 verges. Les Alouettes, eux, ont été pénalisés 13 fois pour des pertes de 133 verges. Ce n’est pas comme si les officiels n’avaient sévi qu’envers les Montréalais. C’était loin d’être à sens unique...

Sans dire que l’arbitrage était parfait, car là n’est pas le point de mon analyse, les propos de Bowman m’ont laissé perplexe. Comme plusieurs, je trouve qu’on voit trop de mouchoirs être lancés sur la surface de jeu dans la LCF, mais je trouve que le « pétage de plombs » de Bowman était déplacé. Les Bombers ont trouvé une façon de l’emporter, sur la route de surcroît, en dépit du nombre élevé de pénalités décernées à leur endroit. C’est ce que j’en retiens.

J’ai abordé dans ma chronique publiée samedi le problème récurrent d’indiscipline chez les Alouettes. Cette facette – qui, admettons-le, a fait défaut chaque semaine à l’exception du match contre Ottawa – se doit d’être gérée par le personnel d’entraîneurs. À un moment ou l’autre, des conséquences doivent être imposées afin de responsabiliser les joueurs.

Il est vrai que je ne suis pas sur les lignes de côté, mais on dirait que chacun fait à sa tête, sachant pertinemment que les sanctions qui les attendent sont inexistantes. Certains comportements sont tolérés alors qu’ils devraient être vivement découragés.

À titre d’exemple, quelques instants après les 25 verges de pénalités dont a écopé Bowman au quatrième match, à un moment crucial du match, on le renvoyait dans la mêlée. Et avec tout le respect que je lui voue (il est un grand joueur de l’histoire des Alouettes et un chic type), ce n’est pas comme s’il faisait flèche de tout bois vendredi soir. À preuve, son nom n’apparaissait nulle part sur la feuille  de statistiques défensives, pas même pour un plaqué.

Sachant cela, pourquoi l’a-t-on immédiatement retourné à son poste? Quel est le message derrière cette décision? Celui qu’on peut nuire à la cause de l’équipe en se montrant indiscipliné dans un moment clé sans être puni?

On a carrément manqué le bateau là-dessus, car un message puissant aurait pu être envoyé au reste des troupes. Même le leader par excellence de la défense ne devrait pas s’en sortir indemne après avoir agi de manière aussi égoïste.

À mon avis, l’entraîneur-chef et ses adjoints ont raté une belle occasion de « mettre leurs culottes ».

Il faudra aussi revoir la manière d’évaluer le travail des joueurs à l’entraînement. Identifie-t-on, durant les exercices, les jeux sur lesquels une pénalité aurait été décernée en situation de match? Corrige-t-on le tir pour éviter que cela se reproduise? Aide-t-on suffisamment les joueurs à reconnaître ce qu’il pourrait faire différemment, du côté technique, pour éviter d’attirer le regard des officiels?

Par le passé, j’ai même vu des entraîneurs inviter des arbitres à une séance d’entraînement afin de sensibiliser les joueurs et leur faire comprendre lorsqu’ils ont dépassé la limite à l’égard du livre des règlements!

Bref, la responsabilisation des joueurs est l’affaire des entraîneurs. Et chez les Alouettes, il y a nettement place à amélioration dans cet aspect.

L’ère Glenn a-t-elle assez duré?

Dans la LCF, qui préconise le football à trois essais, les performances du quart-arrière sont absolument primordiales.

À Montréal, plus on voit Kevin Glenn aller, mieux on comprend les raisons pour lesquelles il a trimbalé ses valises d’Est en Ouest ces dernières saisons.

On saisit mieux désormais pourquoi Glenn affiche un dossier oscillant autour de ,500 après 15 ans dans le football professionnel, et pourquoi on l’appelle parfois « l’agent double » à la blague.

Mais s’il continue d’obtenir des départs malgré ses déboires, force est de donner le bénéfice du doute aux entraîneurs, qui disposent de tous les éléments requis pour prendre une décision. Ces derniers semblent encore lui témoigner leur confiance. Sa compréhension du système doit y être pour beaucoup.

Cela nous dit aussi que les jeunes quarts de l’organisation ne sont pas prêts à être envoyés dans la mêlée comme partants ou que dans l’évaluation de l’état-major, ils ne sont pas assez bons.

Quand je vais assister aux entraînements des Alouettes, je ne vois pas Rakeem Cato et Vernon Adams fils répéter en compagnie des membres de la première équipe. Ils pratiquent très peu dans le système offensif de leur club. C’est une tendance que j’ai remarquée, même s’il est vrai que je ne suis pas présent à chaque séance et que je ne vois pas ce qui se fait avant et après.

Sauf qu’avec ce qui m’est permis de voir, les jeunes quarts ne semblent pas avoir tous les outils en main afin de se développer à leur pleine mesure.

Cato obtient des « miettes » avec la première unité, tandis qu’Adams pratique régulièrement les faufilades du quart. Pour le reste, c’est généralement Kevin Glenn qui hérite des répétitions avec les autres partants. Dans un tel contexte, il est plutôt difficile d’évaluer où en est la relève.

La grande majorité du temps, Cato et Adams sont chargés d’exécuter le plan de match offensif du prochain adversaire de l’équipe, afin de bien préparer l’unité défensive à ce qui l’attend. Comment voulez-vous qu’ils apprennent à maîtriser le système préconisé par leurs entraîneurs? Dans le même ordre d’idées, comment est-il possible pour les entraîneurs de position de bien cerner la progression de leurs jeunes protégés et d’identifier le moment où ils sont prêts à se voir confier davantage de responsabilités?

En ce moment, c’est un défi, car ces jeunes passent très peu de temps dans le système des Alouettes proprement dit. De la manière que je vois la situation évoluer,  on est un peu « piégés » dans nos façons de faire...

Encore des raisons de s'accrocher

Malgré tous les éléments négatifs répertoriés, il n’en demeure pas moins que malgré tout, le Rouge et Noir a subi la défaite, et qu’il est fort possible que les Tiger-Cats de Hamilton s’inclinent face aux Stampeders de Calgary, tandis que les Argonauts de Toronto, eux, ne jouent pas cette semaine.

La réalité des Alouettes, dans le but de s’accrocher à quelque chose, sera de jeter un coup d’œil aux résultats de leurs rivaux de division. Advenant une défaite des Ti-Cats dimanche, les Als, envers et contre tous, ne seraient qu’à un match d’une égalité du premier rang dans l’Est.

Mais pour ce faire, les hommes de Jim Popp devront se mettre à engranger des points au classement parce que dans le cas contraire, ils ne seront pas plus avancés!

* Propos recueillis par Maxime Desroches