Que penser du 1er test?
Montréal Alouettes vendredi, 14 juin 2013. 16:40 jeudi, 12 déc. 2024. 23:08Comme toujours, je suis content de recommencer mes chroniques avec vous et j’amorce le tout en analysant le match préparatoire des Alouettes.
On va se le dire tout de suite, il faut relativiser le portrait de cette partie. Tout ce que tu cherches à voir dans un tel contexte, c’est le travail individuel des joueurs donc c’est très contradictoire avec l’essence du football qui est le sport d’équipe par excellence.
Il ne faut vraiment pas s’énerver avec les résultats parce que les plans de match ne sont pas déployés et tu n’as pas pris le temps d’étudier ton adversaire. Les entraîneurs ont des idées, des jeux et des stratégies qu’ils veulent pratiquer pour déterminer si les joueurs peuvent les exécuter. De plus, tu ne procèdes pas à des ajustements parce que tu veux éviter d’étaler ton contenu stratégique.
Ça permet donc d’évaluer le travail technique à plusieurs niveaux comme : est-ce que les demis défensifs peuvent se débrouiller en homme à homme, est-ce que les receveurs exécutent bien leurs tracés et créent de la séparation avec leur couvreur... Bien sûr, tu veux aussi déceler de l’intensité et de l’effort.
Ce n’est pas évident de trouver le bon équilibre parce que tu veux employer assez de jeux pour procéder à une évaluation adéquate, mais tu ne veux pas exagérer dans la quantité pour que les joueurs deviennent paralysés.
On s’attarde surtout aux batailles individuelles à l’intérieur du concept d’équipe.
Par exemple, en défense, c’était évident que les Alouettes ont procédé à plusieurs blitz pour observer le travail des demis défensifs à un contre un. En attaque, ça me semblait clair qu’on a voulu recourir abondamment aux tracés en zone profonde pour identifier les receveurs qui pouvaient se démarquer.
J’ai aimé l’effort et le caractère de l’équipe qui a remonté la pente après une période à sens unique pour Hamilton. Les jeunes n’ont pas baissé les bras et n’allez pas leur dire que ce n’était pas important comme match, ils ont donné leur maximum et c’est sain comme attitude.
À la blague, je vous mets les choses en perspective : quand les premières unités montréalaises étaient sur le terrain, c’était 7-0 pour les Alouettes! Menée par Anthony Calvillo, l’unité de départ a pris les commandes rapidement et la défense partante a enchaîné en stoppant Hamilton en deux petits jeux. Il ne faudrait pas s’inquiéter et garder cela en mémoire.
J’ai aussi apprécié le fait que Calvillo ait complété une longue passe de 50 verges dès le premier jeu à Jamel Richardson qui a connu un départ difficile en 2012. J’ai toujours dit qu’il était l’homme des gros jeux chez les Alouettes et qu’il donnait beaucoup d’énergie à l’équipe et la foule quand il réussit un jeu.
Je n’étais pas content de voir Calvillo encaisser un sac dès le départ, mais je l’étais de le voir se relever sans problème. Le contact de Torrey Davis était solide parce qu’un joueur de la ligne à l’attaque (Ryan Bomben) a perdu sa confrontation et Calvillo revient quand même d’une opération à l’épaule gauche.
Par la suite, on a vu l’entrée en scène des autres quarts-arrières. Je dois avouer que j’étais déçu par la performance de Josh Neiswander (photo à gauche) parce qu’il semblait avoir pris le dessus pour le poste de quart réserviste selon les entraînements auxquels j’avais assisté.
On voyait que Quinton Porter avait moins de répétitions à l’entraînement donc les entraîneurs avaient remarqué la même chose. Bien sûr, le temps d’utilisation va au mérite et ce n’était pas un hasard que Neiswander ait remplacé Calvillo avant les autres remplaçants.
Au bilan, ce ne fut pas facile avec huit en 23 (34 %) de passes de complétées et deux interceptions. Je dois tout de même ajouter un bémol car l’une d’elles a été déviée à la ligne d’engagement et l’autre a été commise parce qu’un receveur des Alouettes ne s’est pas retrouvé au bon endroit en ratant son tracé ce qui a permis à son demi défensif de capter le ballon.
Techniquement, ce n’est pas de sa faute. J’ai aussi vu des passes échappées par ses receveurs et ces derniers ont manqué des occasions de se démarquer. De plus, l’attaque au sol était absente. En conclusion, je ne suis pas là pour le défendre, mais il se retrouvait souvent en situation de deuxième essai et une longue distance à franchir.
Je trouve ça dommage pour lui parce qu’il a été incapable de confirmer en match ce qu’il accomplit bien à l’entraînement alors que ce fut plutôt le contraire pour Porter.
Même Jim Popp, dans sa présence à l’Antichambre, a avoué que Porter avait dû rappeler aux entraîneurs qu’il s’illustrait plus dans les parties qu’à l’entraînement. Les entraîneurs semblaient trouver qu’il ne comblait pas les attentes, mais il a pris les choses en mains durant la partie.
On peut aussi dire que Neiswander affrontait des joueurs défensifs plus établis donc le débat peut se poursuivre et ça complique l’évaluation. Ceci dit, on peut souligner le travail de Porter. Il a été courageux en encaissant quelques plaqués pour compléter des passes et en courant pour 38 verges en cinq courses. En fin de compte, on demande à un quart de faire avancer le ballon et de produire des points, ce qu’il est parvenu à accomplir. C’est important d’ajouter qu’il ne jouait pas avec la première unité, et ce, à toutes les positions.
Par contre, Porter a un peu la réputation de garder le ballon trop longtemps avant de décocher et il s’est fait frapper à quelques occasions. Toutefois, son touché de 75 verges était de toute beauté parce qu’il a donné – au détriment de son corps - la fraction de seconde supplémentaire à Kenny Stafford pour compléter sa feinte et s’échapper.
Ça ne doit pas être un sentiment très agréable pour un quart de se laisser frapper afin de pouvoir compléter une passe fructueuse. Au bilan, il a complété 47 % de ses passes (8 en 17) donc les quarts ont connu des ratées.
Tout comme les Alouettes, les Tiger-Cats ont misé à répétition sur une défense homme à homme pour cerner le potentiel de leurs joueurs. La précision des quarts a donc été mise à rude épreuve tandis que la lecture devient plus importante contre un système de zone. Ça reviendra aux entraîneurs de décortiquer les vidéos pour mieux analyser leur rendement.
Parmi les autres aspects positifs, j’ai remarqué la discipline des Alouettes qui ont écopé de sept pénalités pour 67 verges contre 18 pour 134 verges du côté des Tiger-Cats. Qui plus est, les arbitres ont imposé à Montréal une seule pénalité avant le début du jeu ce qui démontre que les joueurs ont bien assimilé les enseignements de leur nouvel entraîneur et la communication a été efficace.
C’était agréable de constater qu’ils n’ont pas été punis pour trop de joueurs sur le terrain, trop de temps pour amorcer le jeu, pas de procédure illégale… J’en conviens, les Alouettes n’ont pas utilisé les stratégies les plus complexes, mais c’est intéressant à souligner et on espère que ça se poursuivra ainsi.
Joueur de ligne un jour, joueur de ligne toujours
Je sais que c’est ma première chronique de la saison, mais quand tu es joueur de ligne pour un jour, tu l’es pour toujours. Disons que le total de 52 verges des Alouettes par la course est assez décevant. Si tu enlèves le long gain de 38 verges de Porter, ça fait seulement 14 verges en 9 courses.
Pour rire, je pourrais demander pourquoi les Alouettes gardent autant de porteurs de ballon à leur camp! Mais je comprends bien que les Alouettes voulaient avant tout évaluer les quarts et les receveurs. J’aurais aimé en voir davantage et les tentatives n’ont pas été concluantes. Aussi, c’est normal que les entraîneurs préfèrent se concentrer sur la passe quand la course ne fonctionne guère.
Même la ligne à l’attaque partante a éprouvé des difficultés à l’intérieur contre les plaqueurs des Tiger-Cats. Ces derniers parvenaient à pénétrer dans le champ-arrière rapidement. Chris Jennings a écopé car il ne parvenait pas à prendre son élan pour utiliser sa puissance.
En ce qui concerne les unités spéciales, il faut mettre les choses en perspective. Bien sûr, nous avons sans doute été plusieurs à se dire « pas encore » quand Lindsey Lamar a marqué son touché sur un retour de botté, mais ça demeure un match préparatoire. Si j’enlève ce touché de 88 verges, les Tiger-Cats baissent à moins de 8 verges en moyenne par retour sur les dégagements comparativement à 13 la saison passée.
Sur les retours, la moyenne avoisinait les 5,5 verges en 2012 pour les Alouettes et elle est grimpée à près 10 verges jeudi soir.
Tout de même, je dois soulever un point négatif concernant le botteur Sean Whyte (photo à gauche). Sa moyenne sur les dégagements était de 41 verges, mais je retiens plutôt la moyenne nette (dégagement moins le retour) de 26 verges ce qui est minime. Ce sera un élément à peaufiner et ça m’amène à me demander pourquoi les Alouettes n’ont pas invité un botteur de plus au lieu d’un autre porteur de ballon afin de créer une petite compétition au camp.
Whyte s’entraîne seul et ne venez pas me dire que c’est pour éviter d’affecter sa confiance. S’il n’est pas capable de surmonter cela, je ne suis pas certain qu’on veut compter sur lui à la Coupe Grey pour un placement victorieux. Bien sûr, Whyte s’avère un botteur canadien qui accomplit toutes les tâches si bien que ce n’est pas facile de lui trouver un compétiteur semblable.
Je me dis seulement que cette décision aurait pu créer un contexte intéressant avec de la compétition.
À propos des retourneurs, ils ont cumulé une moyenne de 10 verges et j’ai toujours dit que c’était fort acceptable comme prestation. Ça devient très utile sur l’ensemble d’une rencontre.
Il faut quand même parler des Américains qui ont tenté leur coup. Comme c’est souvent le cas, ils sont probablement tombés en amour avec la largeur du terrain et ils ont souvent essayé de courir est-ouest. Ils se disent sûrement qu’ils peuvent battre les couvreurs avec leur vitesse, mais ils vont réaliser la qualité de ces joueurs.
L’entraîneur des unités spéciales, Ray Rychleski, devra ajuster cet aspect. L’idéal, c’est de franchir la première ligne de plaqueurs de façon nord-sud et ensuite de dévier de sa trajectoire. D’ailleurs, le touché des Tiger-Cats a été orchestré de cette manière.
Le dossier important de l’ailier défensif manquant
Comme je l’ai évoqué plus tôt, en défense, la stratégie des Alouettes a été de miser sur le blitz à outrance. Ainsi, c’est le schéma qui crée de la pression sur l’attaque adverse et non le travail des joueurs. Voilà pourquoi je ne peux pas encore me prononcer sur le travail des joueurs de la ligne défensive. J’espère qu’on reviendra surtout à une pression à quatre contre les Argonauts la semaine prochaine pour mieux évaluer le tout.
En fin de match, quand on a opté pour cette stratégie, la pression était décevante. C’est un élément essentiel parce que ça empêche le quart adverse de repérer les faiblesses dans la défense de zone.
Je dois aussi soulever le point que les Alouettes doivent identifier quel joueur sera choisi pour devenir l’autre ailier défensif en compagnie de John Bowman. Le vétéran est content que l’équipe revienne à un système 4-3 qui lui convient davantage, mais je dois lui répondre que ça ne donnera rien s’il n’est pas épaulé par un autre ailier défensif efficace puisque les équipes pourraient simplement le contenir avec deux joueurs. Il s’agit d’un élément crucial à résoudre.
Face à de nombreux blitz, les Tiger-Cats ont répliqué avec de nombreuses passes pièges réussies. Cette stratégie a mal fait paraître la défense montréalaise, mais il ne faut pas trop se fier là-dessus puisque le plan n’était pas de s’ajuster aux jeux des adversaires.
Le jeu d’option du quart-arrière a également causé des maux de tête aux Alouettes et ça me préoccupe plus simplement parce que c’est un aspect de base qui nécessite un couvreur pour le quart et un autre pour le porteur de ballon.
Quelques joueurs méritent une bonne note
Les Alouettes vont retourner à Sherbrooke pour compléter leur camp et ils procéderont à des retranchements dès dimanche. Bien sûr, certains joueurs seront nerveux en vue de cette annonce, mais on se rapproche de la vraie composition de l’équipe ce qui aidera la progression à l’entraînement.
Le deuxième match préparatoire servira encore pour les évaluations, mais il faudra aussi penser au début de la saison qui suivra sept jours plus tard.
Évidemment, je dois souligner la performance intéressante de quelques joueurs dans ce premier test concret même si je n’ai pas analysé en détail les vidéos. Le receveur canadien Ezra Millington s’est très bien débrouillé, j’ai aimé la fougue et l’intensité du secondeur Nicolas Boulay, j’ai remarqué le travail de Jordan Verdone avec ses plaqués sur les unités spéciales… Bref, le talent canadien est ressorti du lot et je pourrais ajouter Michael Klassen à la liste. C’est agréable de constater cela.
Notons aussi Tyrone Carrier (photo à gauche), un receveur américain, qui a démontré un côté explosif captivant.
Je peux vanter l’aplomb du vétéran Dominic Rhodes, un dossier que l'on croyait qui deviendrait intrigant à suivre sauf que les Alouettes ont décidé de le libérer vendredi en début de soirée.
Quand il a fait sa course de huit verges, on a immédiatement remarqué que ses capacités sont encore présentes, et que dire de sa puissance en protection!
Il a renversé plusieurs joueurs et comme je disais à mon collègue Denis Casavant durant la description de la partie, s’il a été fiable pour protéger Peyton Manning, je crois qu’il aurait pu défendre Calvillo.
Bien sûr, le ratio a joué contre lui puisqu’il est Américain, mais les Alouettes avaient déjà trouvé des façons de retenir plusieurs joueurs dans l’entourage de l’équipe en première moitié de saison quand ces derniers sont consentants. Cette situation aurait pu s’appliquer puisque Brandon Whitaker se remet d’une opération.
Pour terminer, c’était rassurant d’entendre Calvillo dire que le rythme a grimpé à l’entraînement. Quand le rythme est plus lent, les répétitions sont moins nombreuses et la forme physique en prend un coup. Les entraînements très intenses de Marc Trestman devenaient un entraînement pour le cardiovasculaire des joueurs et c’est important de conserver un niveau élevé à ce chapitre.
*Propos recueillis par Éric Leblanc.