MONTRÉAL – L’un des plus gros chantiers auquel devra s’attaquer le nouveau directeur général des Alouettes lors de l’ouverture du marché des joueurs autonomes est à la position de porteur de ballon.

La saison dernière, les Alouettes ont aligné deux des huit demis offensifs les plus productifs de la Ligue canadienne. William Stanback a cumulé 1048 verges en seulement 14 matchs et Jeremiah Johnson en a ajouté 532 sur 89 portées. Les deux ont terminé l’année avec une moyenne supérieure à six verges par course.

Mais Stanback a été libéré le 1er janvier pour aller tenter sa chance dans la NFL et on s’attend à ce que Johnson, qui aura 33 ans en février, parte à la retraite. Le trou qu’ils laissent dans le champ arrière montréalais est immense.

« J'ai soumis ma liste de demi-offensifs à Danny [Maciocia] »

Les Alouettes semblent toutefois avoir un plan de relance clair. Cette discussion à bâtons rompus avec l’entraîneur des demis offensifs André Bolduc, mercredi dans le vestiaire des Alouettes, permet de croire que quelque chose de gros se trame.

- Danny [Maciocia] a reçu ma liste d’épicerie, il sait très bien qui je veux. Je les ai mis en ordre.

- Est-ce qu’on peut la voir nous aussi?

- Non, parce que c’est peut-être réglé dans certains cas.

- Peux-tu alors nous dire qui sont les gros noms qui seront disponibles cette année?

- Euuuh, non. Vous ferez vous devoirs.

La liste des candidats vedettes qui pourraient atterrir à Montréal lorsque le marché s’ouvrira le 11 février est plutôt courte. En fait, un seul athlète a la feuille de route pour être considéré comme un digne successeur de Stanback. À 32 ans, C.J. Gable vient de connaître une deuxième saison consécutive de plus de 1000 verges au sol avec les Eskimos d’Edmonton. En plus de ses 205 courses, il a capté 53 passes en 2019, un sommet en carrière.

James Wilder Jr, la recrue de l’année en 2017, a été libéré par les Argonauts de Toronto en novembre dernier. Sa production a diminué à chacune de ses trois saisons dans la LCF, mais à 27 ans, le colosse de 6 pieds 3 pouces et 221 livres pourrait être tenté par un nouveau départ à Montréal. Cameron Marshall, un Américain de 28 ans qui a récolté 307 verges et inscrit deux touchés en quatre matchs avec les Tiger-Cats de Hamilton la saison dernière, pourrait être une option intéressante. Les anciens Alouettes Tyrell Sutton et Chris Rainey seront aussi sans attache dans quelques semaines.  

« La façon dont on court la balle ici, si on veut être premier et deuxième dans toutes les catégories comme l’année passée, ça nous prend un cheval de bataille, statue Bolduc. Ça prend un gars solide qui va nous donner 14, 15 matchs, supporté peut-être par un vétéran ou un jeune. Mais j’en veux au moins trois ou quatre en compétition au camp d’entraînement. »

« Tu veux avoir une certaine énergie en arrière, explique Luc Brodeur-Jourdain, qui a joué pendant onze ans sur la ligne offensive des Alouettes et qui se prépare pour sa deuxième saison comme entraîneur à la même position. Si on va chercher un vétéran, ça prend aussi un jeune qui va pousser dessus solide. Si on était capable de faire un ‘mixte’ comme Toronto il y a deux ans avec un jeune comme Wilder Jr et un vétéran comme Brandon Whitaker... c’est ça qu’on avait l’année passée dans le fond. »

« Stanback était notre partant, mais Johnson n’était pas loin en arrière, poursuit Brodeur-Jourdain. Il prenait toujours la bonne décision, frappait toujours le bon ‘gap’ à pleine vitesse, même à l’entraînement. Donc si tu es le jeune en position de partant, tu te dis que tu ne peux pas te planter souvent, parce que le vétéran est prêt. Quand tu as ce type de compétition, avec en même temps deux bons êtres humains qui s’entraident et qui sont fiers des résultats de l’autre, habituellement tu as des bons résultats. »

Brodeur-Jourdain est conscient que la formule qu’il décrit est plus facile à imaginer qu’à mettre en place.

« Mais c’est quelque chose que j’ai vécu. J’ai vu Avon Cobourne avec Whitaker dans mes premières saisons. Sutton a ensuite été influencé par Whitaker et dans ses dernières années, c’était quelqu’un qui partageait beaucoup avec les jeunes. C’est comme une roue qui tourne, une culture qui est bien implantée. Si un vétéran est généreux, c’est qu’il sait qu’il a la confiance des entraîneurs. »

Les Alouettes ont démontré une belle volonté à faire respecter leur jeu au sol lors de la première année de Khari Jones aux commandes de l’équipe. Collectivement, seuls les Blue Bombers de Winnipeg ont couru avec une plus grande efficacité la saison dernière. Et malgré le départ de deux grosses pointures, tout semble indiquer que les Oiseaux prendront les moyens pour demeurer fidèles à cette identité en 2020.

« Je le bouscule un peu, admet Bolduc en parlant de Jones. En tant que coach des porteurs de ballon, j’aime ça courir la balle et avoir une présence physique. Khari, c’est un ancien quart-arrière, donc vous voyez un peu... Il y a un écart entre nous, mais on est en train de le rétrécir. L’année passée, il a vraiment appelé beaucoup de courses contrairement à ses autres années dans la ligue. On est en train de se rejoindre aussi là-dessus! »

« Ça va être difficile de remplacer Will et J.J. Ils formaient une solide combinaison. On ne voit pas souvent les membres d’un tandem courir pour 1000 et 500 verges dans cette ligue. C’était une année unique, mais je ne vois pas pourquoi on n’essaierait pas de la répéter. Notre attaque équilibrée a été l’une des principales raisons de nos succès et ceux qui prendront la relève dans le champ arrière auront toute ma confiance. Je crois que nous avons un plan en place qui nous permettra de frapper un grand coup. »