MONTRÉAL – Au football, avec la taille d’une équipe, chaque camp d’entraînement réserve son lot de surprises. Que ce soit un joueur libéré, un athlète qui se retire, un nouveau qui ravit le poste à un vétéran, mais personne n’avait imaginé que Junior Luke serait déplacé sur la ligne offensive. 

Même que dimanche dernier, lors de l’ouverture du camp, Didier Orméjuste et l’auteur de ces lignes avons cru à une erreur en apercevant Luke parmi l’unité offensive. 

Quand on vient de jouer trois saisons professionnelles, avec les Lions de la Colombie-Britannique, et que l’équipe de notre coin de pays nous embauche, on ne s’imagine pas qu’une telle transition nous attend. 

David Ménard, son ami et coéquipier, a très bien résumé la situation. 

« Junior l’a bien pris. Honnêtement, il l’a mieux pris que je l’aurais fait », a lancé Ménard qui possède cette franchise toujours appréciée. 

« C'est sûr que j'étais surpris parce que je ne m'attendais pas à ça. Changer de poste sur la ligne défensive, ça se voit assez régulièrement, mais de littéralement changer de côté du ballon, c'est un gros step », a poursuivi Ménard. 

Il faut savoir que Luke est un jeune homme très souriant et croyant. Sa personnalité s’est bonifiée grâce au football et il a choisi d’aborder le tout avec ouverture. 

« C'était drôle, parce que j’étais en réunion avec le groupe de la ligne défensive puis j’ai entendu que c’était possible que des joueurs soient déplacés sur la ligne offensive. Ça m’a traversé l’esprit que ça pourrait être moi. Finalement, j’ai reçu un appel de mon agent pour me dire que les dirigeants voulaient m’offrir une occasion de joueur sur la ligne offensive. Que ça aiderait l’équipe et que ce serait peut-être une occasion d'apprendre quelque chose et même d’allonger ma carrière », a confié Luke. 

David Ménard espère décrocher un poste de partant

Là où le geste s’explique et se comprend, c’est que le directeur général Danny Maciocia savait mieux que quiconque que Luke possédait de l’expérience sur la ligne offensive. Luke s’était déjà entraîné à cette position quand il était entraîneur des Carabins. De plus, Luke avait joué quelques parties collégiales dans ce rôle et ce fut sa première position au football. 

« Ce n’est pas nouveau, c'est familier pour moi. Mais de jouer maintenant sur la ligne offensive au niveau professionnel, je ne m’attendais jamais à ça », a reconnu Luke. 

« Mais tu sais, je le prends bien. C’est une occasion d'apprendre puis je pense qu'ils ont confiance en moi. Je l'ai pris sans aucun reproche », a ajouté Luke qui a aussi pratiqué dans ce rôle avec les Lions. 

Pour en savoir davantage sur la réflexion ayant mené à cette décision, la question a été refilée à l’entraîneur-chef Khari Jones. 

« On veut toujours améliorer l’équipe. Danny connaît son parcours, il sait qu’il avait déjà joué là. On a pensé que c’était gagnant pour lui et pour nous de le faire entamer le camp à cette position. On veut voir s’il peut relever le défi. On est très confiants de ce qu’il peut accomplir sur la ligne défensive donc on voulait déterminer si on pouvait bénéficier de le déplacer de l’autre côté. Ce n’est pas impossible qu’on le voit du côté défensif d’ici la fin du camp. Mais on aime ce qu’on voit en attaque jusqu’ici », a expliqué Jones. 

Est-ce faisable?

Juke peut afficher toute la bonne volonté du monde, il faut avant tout que la transition fonctionne. Certes, le jeu sur la ligne offensive nécessite une multitude de petits détails, mais Luke s’est plutôt bien débrouillé, à titre de garde, dans les confrontations individuelles observées mercredi. 

« Ouais, je suis content de voir que ça s'est bien passé. Mais j’ai aussi fait de mauvaises choses et je me frappais sur la tête. Je suis comme ça, j'aime apprendre. Cela dit, ce n’est pas réaliste de maintenir une technique la première fois », a raconté Luke. 

Le saut ne semble donc pas impossible. 

« C'est sûr que ce n'est pas facile de jouer sur la ligne offensive. Sur la ligne défensive, tu fonces toujours vers l’avant, tu attaques.  Du côté offensif, c’est vraiment technique donc ça va prendre du temps pour mon ajustement et ma transition. Je devrai pratiquer beaucoup plus et me concentrer sur la position. Je parle de la technique, comment bouger pieds, savoir les jeux, savoir qui bloquer et quelle est la protection choisie. Je pense que je vais être capable. Jusqu’ici, ils aiment ce qu’ils voient », a témoigné l’athlète de 29 ans. 

Logiquement, Ménard prône tout autant la patience. 

« Il travaille fort. C'est sûr qu'il fait des erreurs, mais ça fait littéralement deux jours qu’il pratique avec les épaulettes. Il a déjà joué à cette position donc ce n’est pas son premier rodéo. S'ils me demandaient de faire cette transition en n’ayant jamais joué de ce côté, ce serait une autre histoire », a noté Ménard. 

Ce qui devrait l’aider, c’est que Luke peut se rabattre vers un entraîneur de position, en Luc Brodeur-Jourdain, qui ne compte pas son temps pour donner des explications. On ajoute à l’équation le vétéran Kristian Matte qui lui a prodigué quelques conseils d’une manière très posée et son ami David Foucault qui est également revenu à Montréal. 

« Tout le monde est très accueillant, ils sont ouverts avec moi et ils me disent de ne pas être stressé si j’ai des questions », a mentionné Luke qui a déjà rivalisé contre Brodeur-Jourdain et Matte sur le terrain. 

Un rôle plus prévisible pour Ménard

Le camp d’entraînement ne comporte pas autant d’inattendu pour Ménard. Pour l’instant, il se retrouve sur la deuxième unité de la ligne défensive. 

« Ç’a toujours été un peu mon rôle depuis que je suis arrivé dans la Ligue canadienne. C'est sûr que j'arrive toujours avec l'optique d'aller me chercher un poste de partant, mais ça va être un petit peu difficile cette année surtout avec le ratio. Si ça me mène à poste dans la rotation, ça va me convenir quand même », a exposé Ménard.

De son côté, il n’aura qu’à découvrir les différences entre l’organisation des Alouettes et celle des Lions avec lesquels il a joué de 2014 à 2019. 

« Oh, c'est énormément différent. C'est sûr que chaque organisation a sa routine, ses façons de faire. En plus, il y a eu beaucoup de changements dans les dernières années chez les Alouettes dont avec le propriétaire. Mais on voit que l'équipe travaille fort pour nous donner le meilleur environnement possible », a ciblé Ménard qui aime la camaraderie qui se développe dans son groupe qui inclut notamment Almondo Sewell, Datone Jones, Nick Usher, Antonio Simmons et Woody Baron.