Je suis convaincu que les joueurs des Alouettes sont déçus de la performance qu'ils ont offerte. Je dis toujours que l'on peut mesurer le niveau d'intensité d'une équipe en la regardant évoluer sur les unités spéciales et je vous jure que les Alouettes ne seront pas fiers d'eux lorsqu'ils regarderont les vidéos du dernier match.

Les Eskimos étaient de loin plus intenses que les Oiseaux et le score final du match est là pour le prouver.

L'histoire aurait cependant pu être bien différente. Rappelez-vous qu'après 11 minutes les Eskimos avaient effectué seulement deux jeux offensifs. Les Alouettes étaient parvenus à orchestrer deux belles séries offensives qui se sont toutefois soldées par des bottés de placement de Damon Duval.

Donc, plutôt que de tirer de l'arrière 14-0 avant la fin du premier quart, Edmonton était toujours dans le match et est rentré à la demie avec une avance de 12-9.

L'histoire aurait pu être bien différente, mais les Alouettes s'obstinent depuis maintenant deux matchs à courir au centre alors que la stratégie ne fonctionne évidemment pas.

Ce qui est spécial, c'est qu'en début de saison, Montréal présentait à l'adversaire plusieurs schémas offensifs différents en ce qui à trait au jeu au sol. On courrait à l'extérieur, on faisait des jeux renversés ET on attaquait le centre.

Maintenant, depuis le match contre les Tiger Cats, le seul jeu de course qui semble faire partie du livre de jeu de Marc Trestman c'est la remise directe de Calvillo à Cobourne. J'irais jusqu'à dire que, en regardant l'attaque au sol des Alouettes, j'ai l'impression de voir évoluer la version 2008 des Oiseaux.

Rendre à César ce qui lui revient

Il ne faut cependant rien enlever aux Eskimos qui ont joué le match qu'ils devaient jouer afin de remporter celui-ci.

Le milieu de la ligne défensive d'Edmonton n'a tout simplement rien donné de bon aux Alouettes. Les plaqueurs Eric Taylor et Dario Romero ont appliqué une pression incessante sur le centre de la ligne de mêlée ce qui n'a certainement pas aidé Montréal à installer un semblant de jeu au sol.

De plus, en étant plus intenses, les Eskimos ont remporté la bataille des tranchées et sont parvenus à rejoindre Anthony Calvillo à deux reprises - chose qui avait été accomplie seulement une fois en quatre matchs par les adversaires de Montréal.

Grâce à cela, ils sont parvenus à briser le synchronisme de la machine offensive des Alouettes. Vous savez aussi bien que moi que cette machine en est une capable de produire des résultats dévastateurs lorsque tout fonctionne comme prévu. Sauf que dès qu'un peu de sable se glisse dans les engrenages, ça donne le résultat qu'on a pu voir jeudi dernier.

Honnêtement, les Eskimos méritent vraiment un beau gros bravo. Ils ont été solides sur leurs plaqués et ont limité les verges récoltées après l'attrapé. Lorsque les Montréalais parvenaient à sortir le ballon de la boîte, les demis défensifs ont été intraitables.

Et Ricky Ray dans tout ça!

Pour gagner au football, il faut marquer des points et Ricky Ray s'est très bien acquitté de cette tâche lors du dernier match.

Le quart des Eskimos a complété 82% de ses tentatives de passes pour 363 verges et trois touchés. Que vous jouiez contre la meilleure ou la pire défense de la Ligue canadienne, une pareille performance n'est jamais le fruit du hasard.

Il a joué tout un match et, comme le football est un sport d'équipe, je ne peux passer sous silence la performance de ses receveurs.

Tout au long du match, ils ont gagné les attrapés contestés, c'est-à-dire les attrapés où le demi défensif autant que le receveur avait la chance d'attraper le ballon. Pendant toute la soirée, ce sont les receveurs qui ont remporté ces batailles. Voilà en partie pourquoi Ray a terminé le match avec un pareil taux de réussite.

Les Eskimos ont d'ailleurs réussi un grand coup avec deux minutes à faire en complétant une passe de touché Ray-Stamps sur 48 verges.

Je vous glisse un mot sur ce jeu parce que c'est quelque chose du football que j'apprécie énormément.

Pendant le match, les Eskimos ont effectué à trois ou quatre reprises une passe rapide en direction Maurice Mann. Celui-ci profitait alors du bloc de Fred Stamps pour se frayer un chemin et gagner quelques verges sans plus.

En répétant ce jeu plusieurs fois, Edmonton est parvenu à conditionner la défensive montréalaise à jouer de façon très agressive face à cette formation.

Or, sur la séquence menant au touché, Stamps a plutôt effectué une feinte de bloc avant de filer fin seul dans la tertiaire quasi inexistante des Alouettes. Les Eskimos ont préparé ce jeu pendant 58 minutes et, au moment où ils en avaient le plus besoin, sont parvenus à surprendre leur adversaire.

Ça, c'est du football!

Une défaite qui pourrait être bénéfique

Plutôt que de s'arrêter à cette défaite, les Oiseaux devraient plutôt prendre un peu de recul et s'apercevoir que, après un mois, cinq matchs et de nombreux voyages, ils présentent un excellent dossier de 4-1. Les gars peuvent vraiment être fiers d'eux.

Comme je disais en entrée de jeu, il est certain que les joueurs des Alouettes sont déçus de la performance offerte lors du dernier match, surtout en étant conscients qu'ils ont les moyens de compétitionner avec quiconque dans cette ligue.

Et maintenant que la poussière est retombée, que les joueurs ont pris conscience qu'ils sont toujours aussi bons qu'ils l'étaient lors des quatre premières semaines, je crois qu'ils vont vouloir prouver à tout le monde que cette défaite n'était qu'un simple faux pas.

Alors moi, si je m'appelais Argonauts de Toronto, j'attacherais mon casque comme il le faut, car je crois sincèrement que les Argos risquent d'en manger toute une ce vendredi au Stade Percival-Molson.

* propos recueillis par Jean-Simon Landry