L'expert football Matthieu Proulx revient sur cinq éléments qui l'ont marqué dans la Ligue canadienne de football.

Au bout du compte, ce qu'on retient, c'est la victoire ou la défaite

La première chose qui retient mon attention cette semaine dans la LCF, c'est bien sûr la victoire des Alouettes. Parce que dans le sport, le football inclus bien sûr, ce qu'on retient, c'est la victoire ou la défaite. Un entraîneur-chef réputé de la NFL, Bill Parcells, a un jour dit « You are what your record says you are ». Tu es ce que ta fiche dit que tu es. Mais parfois, ça ne reflète pas toujours la vraie histoire. Parce que quand je regarde ce que les Alouettes ont comme fiche, ou ce qu'ils ont offert comme performance, parfois des victoires ou des défaites devraient être inversées. Je ne veux pas dire que Montréal aurait dû perdre cette semaine contre Toronto, ils ont joué de façon suffisamment solide pour l'emporter face à une équipe qui évoluait sans son joueur vedette Ricky Ray. Défensivement, ils ont été très solides. Les unités spéciales ont été correctes et l'attaque aurait pu en donner plus, mais ils ont quand même gagné. Ce que je veux dire, c'est que parfois, les Alouettes ont encaissé une défaite et ils auraient dû l'emporter, ou vice versa cette saison.

Face à Winnipeg cette saison, ou contre Ottawa, ce sont des matchs que les Alouettes ont perdus, mais qu'ils auraient dû gagner. La fiche des Alouettes est de 3 victoires et 4 revers et ils sont au premier rang de la section Est. C'est tout ce qui compte! C'était loin d'être leur meilleure performance de l'année, il y a beaucoup de choses à corriger et en particulier l'attaque, qui devra être plus productive la semaine prochaine. Elle devra ressembler à ce qu'elle a été contre Winnipeg.

Une performance que l'on n'oubliera pas de sitôt

L'ancien joueur des Alouettes et des Tiger-Cats Ed Gainey, maintenant avec les Roughriders de la Saskatchewan, a connu une rencontre absolument spectaculaire cette semaine. Il a terminé le match en défense avec quatre interceptions, une échappée recouvrée et un touché dans la victoire des Roughriders. Un gars qui a toujours eu beaucoup de talent, qui roule sa bosse depuis longtemps, mais qui n'avait jamais véritablement trouvé sa niche. Mais pour réaliser un exploit comme ça, une première depuis 1986 d'ailleurs (4 interceptions dans un match), il faut avoir du talent et évidemment un peu de chance. En plus de cela, il a réalisé de beaux jeux, ce n'était vraiment pas des cadeaux de l'attaque à son endroit. Il est allé chercher les ballons, a bien lu les unités offensives adverses et a permis à son équipe de l'emporter.

Soit dit en passant, une fiche de 3 victoires et 1 défaite pour la Saskatchewan dans leur nouveau stade inauguré cette année. Ils ont reçu beaucoup de critiques dans les dernières années, ça semble être une équipe qui tranquillement prend son envol et devient très difficile à vaincre à domicile.

Avec une fiche de 3-4, ils seraient premiers dans l'Est, malheureusement pour eux, dans l'Ouest, ils se retrouvent au dernier rang.

Un ancien de l'université Laval qui continue de faire sa marque

Je veux maintenant parler d'un ancien du Rouge et Or de l'Université Laval, Julian Feoli-Gudino, qui en est maintenant à sa sixième saison dans la LCF. Après avoir débuté en 2012 avec les Argonauts, il a quitté avec l'entraîneur-chef Mike O'Shea pour Winnipeg en 2014. Et depuis qu'il est avec les Blue Bombers, il est utilisé de façon sporadique en attaque et régulièrement sur les unités spéciales. Il est en voie de connaître sa meilleure saison en carrière. Encore cette semaine, il a récolté un touché, son deuxième de la saison ce qui égale un sommet personnel en carrière, acquis en 2014.

Il a également 20 réceptions pour 204 verges, tout près de ses sommets en carrière aussi. Plusieurs évènements ont ouvert la porte à Feoli-Gudino avec les Bombers sur leur unité de receveurs et après six ans à travailler fort, il commence enfin à être récompensé et obtenir du temps de jeu de qualité. Il est utilisé à sa juste valeur et il répond à l'appel lorsqu'on fait appel à lui.

Matt Nichols commence vraiment à m'impressionner

Si l'on reste à Winnipeg, un autre qui mérite d'être souligné, c'est le quart Matt Nichols. Il commence vraiment à m'impressionner. Le quart partant des Blue Bombers ne m'avait pas convaincu lorsqu'il était arrivé là-bas. Il avait débuté sa carrière à Winnipeg avec sept victoires consécutives et il ne m'avait quand même pas convaincu, et pas non plus cette année au début de la saison. Mais il gagne des matchs et ne fait pas d'erreur. Et c'est ce qu'on veut d'un quart-arrière de premier plan.

Il complète 69% de ses passes, a lancé 13 passes de touchés contre seulement 4 interceptions. Il a aidé son équipe à se forger une fiche de cinq victoires et deux revers. Ce que j'aime de lui, c'est que c'est un quart qui fait bien paraître ses coéquipiers dans un match. Il n'est pas le genre à lancer pour 400 ou 500 verges par match, mais il répond toujours présent au quatrième quart quand le moment compte. Sans prendre toute la pression sur ses épaules, il permet aux autres de se mettre en valeur.

Que ce soit par les passes courtes, les longues passes, les jeux en fin de match, il ne fait pas d'erreur. En voilà un qui commence réellement à s'imposer comme un quart-arrière de premier plan dans la LCF.

Quelle sera la prochaine décision des Tiger-Cats?

Rien ne va plus à Hamilton, alors que les Tigers-Cats sont toujours à la recherche d'une première victoire. Chaque semaine, j'ai l'impression de parler d'eux, parfois en bien et parfois en mal. Cette semaine, c'est en mal. Encore une fois ils ont subi la défaite ce week-end et de façon convaincante, 39 à 12, dans une rencontre qui aurait pu avoir encore pire allure pour eux. Ils ont congédié leur coordonnateur défensif la semaine dernière et visiblement son remplaçant ne trouve pas la solution.

À l'attaque, ça ne fonctionne pas non plus avec seulement 188 verges d'attaque ce week-end, c'est nettement insuffisant. Même Kent Austin, entraîneur-chef de l'équipe, a laissé sous-entendre qu'il n'était pas nécessairement satisfait du travail de son quart-arrière. Et ça, ça commence à être dangereux. Non pas qu'il n'a pas raison, toute l'équipe doit en donner davantage. Mais dans une organisation, quand ça va mal, et je l'ai déjà vécu en perdant six matchs de suite en 2006, le danger c'est de commencer à pointer tout le monde du doigt. On doit d'abord se regarder soi-même et faire attention avant de critiquer publiquement quelqu'un. D'autant plus quand il s'agit de critique le quart-arrière vedette de l'équipe.

On a donc décidé que la semaine prochaine, on changerait de sélectionneur de jeux à l'attaque. On commence à essayer plein de choses, on a déjà changé plusieurs joueurs et changer de sélectionneur de jeux en défense. À quelque part, l'entraîneur-chef Kent Austin doit être pointé du doigt. Ses joueurs ne sont pas de calibre cette saison et j'ai hâte de voir quelle sera leur prochaine décision, parce que le bateau est en train de couler et je vois mal ce qui pourrait le sortir de l'océan.

Propos recueillis par Jasmin Leroux