L'expert football Matthieu Proulx revient sur cinq éléments qui l'ont marqué durant la dernière semaine dans la Ligue canadienne de football.

Un message au groupe de receveurs

Le constat est encore une fois le même cette année du côté de l’attaque des Alouettes. Je sais que ce point a été martelé, alors que le scénario se répète chaque saison, mais elle n’est pas capable de se mettre en marche.

Lorsqu’on décortique la situation, on a d’un côté la ligne à l’attaque qui n’a toujours pas accordé de sac du quart après trois matchs. Il faut quand même donner un peu de crédit à Darian Durant qui se débarrasse du ballon rapidement et il parvient à se défaire de la pression lorsqu’elle l’atteint. C’est tout de même impressionnant comme chiffre.

Les Alouettes ont aussi une moyenne de 6,2 verges par course si on enlève les faufilades du quart de l’équation. Le jeu au sol fonctionne donc très bien. J’ajoute à ce constat un bon quart-arrière en Durant.

Lorsque l’on prend en compte ces aspects, j’ai l’impression que ce sont les receveurs qui ne font pas le travail. On entend beaucoup les joueurs dire lors des échos de vestiaire, qu’ils doivent jouer de manière intelligente. Cependant, ils prennent parfois des pénalités et ils ne courent pas toujours les bons tracés de passe.

À un moment, le message devra être envoyé à ce groupe. S’ils ne répondent pas aux exigences du système et ne se préparent pas adéquatement, il va falloir qu’un geste soit posé en conséquence. Il peut être question de libérer un joueur ou encore d’asseoir un vétéran sur le banc. Le message est nécessaire, car les Alouettes ne pourront gagner cette saison en inscrivant si peu de points.

Victor Butler n’a pas fini de faire parler de lui

Un nom que l’on risque d’entendre beaucoup cette saison à travers la ligue est celui de l’ailier défensif des Argonauts de Toronto, Victor Butler. D’ailleurs, il vient tout juste d’être nommé parmi les joueurs de la semaine dans la Ligue canadienne. Il a passé cinq saisons dans la NFL, dont quatre avec les Cowboys de Dallas. Plusieurs joueurs ont une certaine expérience après leur séjour au sud de la frontière, mais il a réellement joué durant toutes ces années. Il a encore le feu sacré pour le football même s’il ne joue plus dans la NFL.

Il a fait mal paraître plusieurs joueurs de ligne offensive depuis le début de la campagne, dont les deux bloqueurs d’Ottawa lors du dernier match. Parmi ceux-ci, on retrouvait SirVincent Rogers qui a été nommé joueur de ligne à l’attaque par excellence il y a deux ans. C’est un joueur rapide, fort physiquement et intéressant à regarder. Les statistiques parlent pour lui depuis le début de la campagne. En seulement trois rencontres, l’ailier défensif a réalisé 13 plaqués, dont sept sacs du quart, et il a provoqué deux échappés.

Jusqu’à maintenant, il est franchement impressionnant.

Bo Levi Mitchell sort tout droit d’un jeu vidéo

Un joueur dont le nom est synonyme de victoire présentement est le quart-arrière des Stampeders de Calgary, Bo Levi Mitchell. Tout ce qu’il fait c’est gagner. Il est à l’image de son équipe qui trouve toujours une façon de signer la victoire. Même s’ils n’ont pas connu un début de saison à tout casser, les Stampeders n’ont pas encore encaissé de défaite (2 victoires et un verdict nul). Un tel dossier n’est pas surprenant, je dirais même que c’est dans leur nature de gagner, car ils jouent du football que je qualifierais de complémentaire. Chacune des unités vient compléter le travail de l’autre. Si jamais lors d’un match, l’attaque ne fonctionne pas, la défense va prendre le relais. L’inverse est tout aussi vrai.

On ajoute à cette équation Mitchell qui présente une fiche en saison régulière comme partant de 45 victoires, 7 défaites et 2 nuls. Il s’agit de chiffres que l’on voit habituellement au football universitaire américain ou dans les jeux vidéos. Tu ne vois pas ça dans le football professionnel.

C’est tout à son honneur et c’est ce qui explique les succès au cours des dernières années des Stampeders. Ces derniers trouvent toujours un moyen de quitter le terrain avec la victoire.

Ambrosie est l’homme de la situation

Je veux souligner la nomination de Randy Ambrosie à titre de commissaire de la Ligue canadienne. Nous avons eu la chance de s’entretenir avec lui lors de la dernière mi-temps des Alouettes. Pierre Vercheval nous avait glissé de bons mots à son sujet alors qu’il avait été son ancien coéquipier et ancien colocataire. Non seulement il a connu du succès alors qu’il était joueur, mais également dans le monde des affaires. C’est un chic type qui représente bien l’image que la LCF veut propager. Il est très proche du public et très accessible tout en étant compétent dans ce qu’il fait. Il a donc le profil idéal pour remplir ce mandat.

Randy Ambrosie nommé commissaire de la LCF

Il a la Ligue canadienne tatouée sur le cœur. La LCF c’est une affaire de passion. À cela, on ajoute ses connaissances dans le monde des affaires pour assurer la santé de la ligue à ce chapitre. Cette dernière se porte quand même bien sauf dans quelques marchés, dont Toronto qui est le gros point d’interrogation. À part celui-ci, la ligue est sur la bonne voie alors que les droits de télédiffusion ont été vendus, les commanditaires sont présents et les partisans sont aussi aux rendez-vous.

C’est tout de même encourageant de voir quelqu’un en poste qui pourra continuer de faire fleurir la marque de commerce. Il est selon moi l’homme idéal pour accomplir le tout.

Will Hill soulève des questions

Je veux aborder dans un dernier point le dossier du demi défensif des Tiger-Cats de Hamilton, Will Hill. Ce dernier a été suspendu pour une rencontre et mis à l’amende après avoir empoigné un officiel lors du dernier match des siens contre les Roughriders de la Saskatchewan. C’est un joueur que j’aimais beaucoup regarder jouer lorsqu’il évoluait dans la NFL. Tu vois aussi lorsqu’il arrive sur le terrain que c’est un athlète supérieur. Il est fluide dans ses déplacements, il couvre beaucoup de terrain et il frappe fort.

Lorsque l’on jette un coup d'œil à ses statistiques au fil de sa carrière, il a connu du succès partout où il est passé, notamment avec les Gators de la Floride au niveau universitaire et avec les Ravens de Baltimore chez les pros.

C’est un athlète qui provoque des choses du côté défensif, que ce soit avec des interceptions ou avec des plaqués pour des pertes de terrain. Tout le monde le voudrait dans son unité.

Cependant, il a connu des problèmes à l’extérieur du terrain. Il a été suspendu quatre fois pour un abus de substance alors qu’il était dans la NFL. Les équipes ont donc abandonné avec lui au sud de la frontière.

Je m’interroge lorsque je vois ce dossier sur la ligne directrice de la LCF. Je trouve étrange comme message qu’envoie la Ligue d’accepter de laisser jouer des joueurs qui ont eu des suspensions dans la NFL. La Ligue n’a pas besoin de ça, alors qu’elle a pris en importance. Elle est crédible et mon souhait serait qu’elle ne devienne pas une échappatoire pour ces joueurs afin d’y faire ce qu’ils veulent. Ce n’est pas le message qui veut être envoyé. La LCF est une ligue intègre, qui se respecte et qui demeure sévère dans ces dossiers.

J’ai aimé ce que la Ligue avait fait dans le dossier de Ray Rice il y a plus de deux ans. Personne n’avait pu le mettre sous contrat, car la Ligue n’allait pas honorer celui-ci. Elle a donc déjà pris de telles décisions et je me demande pourquoi Will Hill, qui a été suspendu, quatre fois a tout de même été accepté. C’est donc une question sur laquelle j’aimerais que la Ligue se penche à l’avenir.

*Propos recueillis par Maxime Tousignant