Chaque semaine, notre chroniqueur Matthieu Proulx relate cinq histoires qui ont marqué la dernière semaine d’activités dans la NFL.

La Matrice

Impossible d’écrire cette chronique sans parler d’Aaron Rodgers.

ContentId(3.1214723):Pas en mesure d'arrêter Rodgers
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Ç’a été dit sur toutes les plateformes, dans toutes les émissions et par pratiquement tout le monde, je le sais, mais on doit en jaser encore.

Rodgers est au-dessus de tout le monde. On dirait qu’à chaque trois ans, il nous le rappelle sur la plus grande scène. C’est la Matrice. Il voit tout et il contrôle tout, la défense adverse comme ses propres joueurs.

La passe à Jared Cook, qui a mis la table au placement victorieux face aux Cowboys de Dallas, en est la plus récente preuve. Ce jeu, il l’a dessiné dans le caucus. Il est en plein contrôle de la situation. On ne voit personne d’autre faire cela.

Pourquoi s’élève-t-il à un niveau au-dessus de tous les autres? Parce qu’il fait tout, et bien en plus.

Je ne veux rien enlever à Tom Brady, qui joue bien et qui est probablement le meilleur de tous les temps pour ce qu’il a accompli dans sa carrière, mais quand Rodgers est au sommet de sa forme, personne n’est meilleur que lui.

Il est capable de courir mieux que n’importe qui, il est capable d’improviser mieux que n’importe qui, sans compter qu’il est capable de lancer des passes extrêmement précises alors qu’il est pourtant en déséquilibre. La réalité de la NFL c’est qu’une pochette protectrice ne peut être toujours parfaite et permettre chaque fois à son quart de bien planter ses pieds et de rentrer dans sa passe.

Pas grave. Rodgers lance sur le pied arrière et de toutes les façons : en mouvement ou à contre-courant, mais il réussit tout de même à être précis, en plus de dégainer très rapidement.

Lorsqu’il maîtrise bien tous ses outils, je me répète, personne n’est capable de le battre. Impressionnant.

Antonio Brown en échappe une… dans le vestiaire

Depuis deux jours, Antonio Brown fait jaser de lui, mais pour les mauvaises raisons.

À la suite de la victoire des siens face aux Chiefs de Kansas City, le receveur des Steelers de Pittsburgh a filmé et diffusé en direct sur Facebook Live le discours d’après-match de son entraîneur-chef Mike Tomlin, prononcé dans le vestiaire.

Je n’ai visionné que trois des 17 minutes de cette vidéo sur le site YouTube. C’était bien suffisant.

Tomlin, furieux, a depuis réagi avec justesse en conférence de presse, déclarant que les actions son joueur étoile avaient été « insensées, égoïstes et irréfléchies ».

Le vétéran quart-arrière Ben Roethlisberger a aussi fait part de son mécontentement, et je peux comprendre. Le vestiaire, c’est un sanctuaire. Personne ne peut y pénétrer en tout temps. Des moments comme ceux qu’ont pu vivre les joueurs des Steelers après ce match sont précieux. Ce n’est pas tous les jours qu’on peut célébrer pareil triomphe dans l’intimité : les 53 joueurs, les 10 entraîneurs et l’entourage de l’équipe.

Il y a constamment des « étrangers » dans ce monde, les médias, le public, etc..

Antonio Brown est passé complètement à côté de tout ça. C’est triste pour lui et complètement ridicule pour le reste de l’équipe. Ce qu’il a fait, c’est exactement ce que Tomlin disait justement de ne pas faire dans son discours en gardant tout cela dans la famille.

Jamais je ne me serais attendu à cela de Brown. Il m’apparaît comme un bon joueur d’équipe. Il faut croire que cette fois, il l’a vraiment échappé.

Un marché saturé

Alors que les éliminatoires monopolisent l’attention, le déménagement des Chargers de San Diego à Los Angeles passe quant à lui un peu plus inaperçu.

Reste que la NFL en est à une deuxième relocalisation d’une franchise en autant de saisons et qu’une troisième, celle des Raiders d’Oakland, se dessine de plus en plus.

Le circuit, qui se vantait de ne pas avoir connu pareil bouleversement pendant plusieurs années, paraît de moins en moins bien. Les autorités de la ligue ne sont pas en mesure de conclure des ententes ou de trouver des solutions pour des marchés qui en arrachent. La seule issue semble être le déménagement.

C’est loin d’être souhaitable. Au Québec, on est bien placé pour en témoigner après avoir vécu les tristes départs des Expos et des Nordiques, qu’on essaie maintenant de ramener.

C’est sur 55 ans d’histoire à San Diego que la NFL tourne la page pour s’orienter encore une fois sur Los Angeles, un marché déjà saturé sur le plan sportif.

D’ailleurs, dans cette ville, on ne célèbre pas l’arrivée de cette autre franchise. Prenez l’exemple des Rams, qui à leur retour à L-A ont attiré les foules en début de saison avant de peiner à remplir leurs gradins en fin de calendrier. À Los Angeles, il n’est jamais facile de gagner son pari et d’attirer les spectateurs lors de chacun de ses matchs, sauf si on s’appelle les Lakers. Autrement, il faut gagner régulièrement et décrocher des championnats.

Le propriétaire des Chargers fait néanmoins le pari que ça fonctionnera, et dans un stade de 30 000 personnes pour commencer de surcroît.

Un fait demeure, un deuxième transfert dans une même ville en autant d’années est risqué pour la NFL.

On verra bien de quoi tout ça aura l’air dans 5 ou 10 ans.

La jeune jeunesse

Parlant de Los Angeles... Les Rams ont embauché un très jeune entraîneur-chef en la personne de Sean McVay.

À 30 ans, il est devenu le plus jeune homme de sa profession à hériter des commandes d’une équipe de la NFL jeudi dernier.

C’est hallucinant! On le dit très compétent. Candidat intéressant à convoquer en entrevue d’abord, McVay aurait épaté la galerie au moment de rencontre la direction des Rams. Pour l’avoir entendu parler, c’est vrai qu’il est impressionnant. Il affiche une belle prestance, il s’exprime bien et il a l’air en confiance.

En faisant ce choix, les Rams démontrent leur volonté à établir une meilleure communication avec la nouvelle génération de joueurs, les fameux milléniaux. Les motivations de ceux-ci sont différentes de leurs prédécesseurs, tout comme leur approche et leur philosophie en lien avec le football. Ils sont beaucoup plus individualistes, ce qui ne convient sans doute pas à la vieille garde des entraîneurs qui tâchent de tout contrôler.

C’est à mon avis ce qui explique le rajeunissement de la profession. Reste qu’être entraîneur-chef à 30 ans dans la NFL, ça dépasse l’entendement. En 2007, il concluait sa carrière de joueur universitaire à l’Université Miami, en Ohio...

Quand on occupe ces fonctions, l’expérience est inestimable. McVay a beau avoir le football dans le sang – son grand-père John a notamment été directeur général des 49ers dans leurs balles années  – et d’avoir appris sous de très bons entraîneurs-chefs (John Gruden, Mike Shanahan), c’est quand même jeune 30 ans pour exercer son emprise sur toute une équipe. Heureusement pour lui, il s’est adjoint les services de Wade Phillips, un vieux routier, pour l’épauler.

Chapeau, les botteurs!

On ne les épargne pas lorsqu’ils éprouvent des ennuis, alors quand ils excellent et que leur travail est si déterminant, il importe d’en parler.

Les botteurs ont en effet fait la différence en fin de semaine dans deux rencontres. À commencer par Chris Boswell, qui a réussi chacune de ses six tentatives de placement dans la victoire des Steelers.

Ces derniers ont peut-être dominé les Chiefs, ils ont été incapables d’inscrire un touché. Ils ont donc dû s’appuyer sur la jambe de Boswell, dont une seule tentative ratée aurait pu changer complètement l’issue de cette rencontre.

Mason Crosby et Dan Bailey ont eux aussi brillé dans le duel enlevant entre les Packers et les Cowboys, réussissant trois bottés de 56, 52 et 51 verges dans les deux dernières minutes de jeu.

Il faut le souligner.

*Propos recueillis par Mikaël Filion