MONTREAL (PC) - "Je m'en vais au Super Bowl!"

C'est sans doute la première pensée qui est venue à l'esprit de Rex Grossman et de Peyton Manning lorsqu'ils ont ouvert les yeux, lundi matin.

Ce fut du moins le cas de Jean-Philippe Darche, l'an dernier, au lendemain des finales d'association.

"Notre match de championnat de la NFC a été relativement à sens unique, même si les Panthers (de la Caroline) ont marqué un touché vers la fin. C'est là que tu commences à penser, wow, on s'en va au Super Bowl. Mais ce n'est pas encore concret. Parce que jusque-là, tu ne pensais qu'à la finale de conférence", a raconté Darche depuis Seattle, lors d'une entrevue téléphonique réalisée à quelques jours du Super Bowl, qui mettra aux prises les Bears de Chicago et les Colts d'Indianapolis le 4 février prochain.

C'est au moment du réveil, le lendemain, que la réalité du Super Bowl se manifeste plus clairement, précise Darche.

"Tu commences à te demander comment ça va se passer, affirme celui a participé au match ultime de la NFL l'an dernier avec les Seahawks. Et c'est à ce moment-là que commence la partie la moins plaisante de l'expérience du Super Bowl."

Le séjour des joueurs est pris en charge par l'équipe, comme d'habitude. Mais pour cette occasion spéciale, les joueurs ont aussi droit à un certain nombre de billets, et peuvent donc inviter leurs proches sur place.

"C'est ça le plus "plate", dit Darche. Il faut s'arranger avec les billets et les réservations de chambres d'hôtel. Tu n'as qu'un nombre limité de billets, tu ne sais pas qui vient ou pas... Les Seahawks nous avaient demandé de tout régler pour le jeudi de la première semaine, pour qu'on n'ait plus à y penser après."

La réunion du lundi, habituellement consacrée au visionnement du film du match de la veille, sert cette fois à passer en revue les détails à régler en vue de la semaine du Super Bowl. Les jours suivants se déroulent normalement: congé mardi, puis réunions et entraînements, qui se passent de la même façon qu'en saison régulière, jusqu'au départ le dimanche.

Dans le cas des Seahawks, le vol en direction de Detroit a été émotif au possible.

"Les joueurs se sont réunis au complexe d'entraînement de l'équipe pour y prendre l'autobus, qui nous a emmenés au stade. La direction ne nous l'avait pas dit, mais il y avait 25 000 personnes pour un rallye. Un dimanche matin à 7h, alors qu'il faisait froid et qu'il pleuvait, raconte Darche. Après ça, je peux vous dire que ça nous tentait d'aller au Super Bowl!"

Après un entraînement léger le lundi, à Detroit, le mardi était consacré à la journée des médias.

"Il y a des centaines et des centaines de journalistes, relate Darche. C'est là que tu réalises, wow, tu es au Super Bowl."

Darche, qui occupe une position plutôt anonyme, celle de spécialiste des longues remises, a alors eu l'occasion de mieux se faire connaître, mais aussi de goûter au stress que vivront les Manning et Grossman la semaine prochaine à Miami.

"Habituellement, à Seattle, je me fais interviewer à peu près deux fois par saison. Les journalistes entourent les 15 mêmes joueurs et laissent les autres tranquilles, et je m'attendais à la même chose à Detroit. Mais ç'a été l'inverse. Il y avait des journalistes québécois et canadiens qui me suivaient à tous les jours. C'a attiré la curiosité des autres et à la fin, j'ai fait des entrevues avec le New York Times, et tous les journaux de Seattle."

A chaque jour à partir du mercredi, la réunion d'équipe matinale était suivie d'une séance d'une à deux heures avec les médias à l'hôtel, puis d'un entraînement. Darche avait ensuite des entrevues téléphoniques à faire lorsqu'il rentrait à sa chambre, vers 16h.

"A chaque fin de journée, j'étais épuisé, indique Darche. Juste la pression de jouer au Super Bowl, c'est fatigant. Mais il y a les médias, un paquet de chose d'organisées, les membres de la famille qui arrivent le jeudi... ça n'arrête pas une minute.

"Le vendredi, j'avais hâte que le match arrive, qu'on arrête d'en parler, d'analyser... Le samedi à cinq heures, je voulais juste me reposer."

Darche a bien dormi cette nuit-là.

"J'étais tellement fatigué, et j'étais prêt à disputer le match", dit-il.

La journée du Super Bowl est très longue, affirme Darche: déjeuner d'équipe, brève réunion, puis les joueurs retournent à leur chambre jusqu'au repas d'avant-match. A 14h30, c'est le départ vers le stade.

"Dans le vestiaire, c'est fébrile. Il y a beaucoup d'intensité, de nervosité."

Un élément qui a surpris le Québécois, même si des coéquipiers l'avaient prévenu: la foule est peu bruyante pendant un match du Super Bowl.

"Parce qu'il n'y a pas d'équipe locale, et les billets sont tellement chers que ce ne sont pas les vrais fanatiques qui sont là, explique-t-il. Avant le match, c'est la fête du Super Bowl et c'est excitant, mais pendant, c'est excessivement peu bruyant."

Ce qui n'a pas empêché Darche de savourer le moment.

"Sur les lignes de côté, je regardais autour de moi, en me disant wow, c'est le Super Bowl. Mais une fois sur le terrain, j'étais calme, je revenais à ce qui m'était naturel."

Sur le terrain, l'intensité était à son comble.

"Blessés ou pas, les joueurs vont chercher tout ce qu'ils sont capables d'aller chercher pour gagner", dit-il.

Une fois le match terminé, la chute du piédestal est rapide et brutale pour les perdants, a constaté Darche.

"Il y a 200 gardes de sécurité qui te demandent de quitter le terrain, alors tu ne peux pas regarder les festivités.

"Dans les jours qui suivent, tu vis avec la colère d'avoir perdu. Mais le temps passe, et après tu réalises quelle expérience spéciale tu as vécue."