Peyton Manning a encore une fois offert une grande performance, dimanche, face aux Patriots de la Nouvelle-Angleterre. Il était dans une zone incroyable.

Ce que j’apprécie de lui c’est qu’il travaille beaucoup de la ligne d’engagement. Il va toujours regarder ce que l’adversaire va lui présenter. Souvent, il ne se cassera pas la tête avec sa sélection de jeu.

Ce qui est intéressant avec Peyton Manning, c’est qu’il est l’une des plus grandes vedettes de la NFL. Mais il est capable de mettre son ego de côté quand vient le temps de choisir ses jeux. On en a eu un exemple durant cette finale de l’Association Américaine. En début de match, sur un troisième essai et neuf verges, il s’est aperçu que les Patriots avaient mis beaucoup d’énergie pour arrêter le jeu aérien. Il ne s’est pas obstiné et il a choisi un jeu au sol. Les Broncos ont gagné le premier jeu et cela a mené au premier touché du match de Jacob Tamme. Je trouve qu’il a bien géré la situation. C’est cette facette de Manning qui déstabilise les entraîneurs adverses. Il est toujours à la recherche du meilleur jeu pour l’attaque.

Les Patriots vont toujours tenter d’éliminer le meilleur élément de l’attaque qu’ils affrontent. Ils vont regarder ce que l’adversaire fait de mieux ou qui est le meilleur joueur. Ils vont ensuite essayer de faire déroger l’unité offensive de son plan de match. Mais avec Peyton Manning, c’était impossible de le faire. Il a distribué le ballon à tout le monde. Après deux séquences, il avait déjà rejoint sept receveurs. Quand tu distribues le ballon de cette manière, ça devient tout un casse-tête pour une unité défensive!

La ligne à l’attaque des Broncos a très bien joué. Ce fut un point important alors que Denver a remporté la guerre de tranchées des deux côtés du ballon. Normalement, c’est une facette du jeu où les Patriots se débrouillent bien. Néanmoins, au cours de cette rencontre, c’était clairement à l’avantage des Broncos. À la blague, je dis toujours que quand tu joues avec un pantalon blanc sur du gazon naturel et que tu termines le match avec aucune tache verte sur tes pantalons, c’est que ta ligne offensive a accompli son travail! Manning n’a jamais été dérangé.

La blessure à Aqib Talib a certainement aidé la cause des Broncos. C’est le meilleur demi défensif des Patriots. Avant qu’il ne se blesse, Demaryius Thomas n’avait capté qu’une passe. Par la suite, il a débloqué. Est-ce la seule raison qui explique la défaite? Je ne pense pas.

Mais revenons sur le jeu qui a mené à la blessure de Talib. Il s’est blessé sur une obstruction planifiée. Ce sont des tracés en croisé que toutes les équipes de la NFL utilisent. Les receveurs se croisent au niveau des secondeurs. Lorsque les joueurs se croisent, l’un est à cinq verges et l’autre à sept pour éviter d’entrer en contact. Par contre, on espère que ceux qui nous pourchassent, parce que cette stratégie est souvent utilisée en situation d’homme à homme, entrent en contact un avec l’autre pour se gêner eux-mêmes. Ou sinon, on va demander à un des receveurs de faire de l’obstruction planifiée, comme Wes Welker l’a fait.

Personnellement, je croyais que cet écran méritait une pénalité parce que c’était trop flagrant. On a été chanceux du côté des Broncos de s’en sortir sans infraction. Toutefois, c’est clair que c’était une stratégie pour sortir Aqib Talib du jeu, mais Welker n'avait pas l'intention de le sortir du match.

Je ne suis pas d’accord avec Bill Belichick qui prétend que Welker voulait délibérément sortir Talib de la rencontre. Quand tu es un demi défensif en poursuite de ton receveur et que tu en vois un autre s’approcher à contre-courant pour faire de l’obstruction, ça devient une guerre de nerfs. Qui va flancher? Qui va changer de direction? Qui va aller à gauche et qui va aller à droite? En fin de compte, les deux se sont rentrés dedans. L’objectif de Welker était de faire dévier Talib pour lui faire perdre de la vitesse et parcourir une plus grande distance pour couvrir Demaryius Thomas.

C’est vraiment dommage qu’il se soit blessé là-dessus. Il est clair que cette perte a nui aux Patriots. Les Broncos ont joué tout un match et on ne saura jamais quelle différence la présence de Talib aurait faite.

Tom BradyJ’ai été impressionné par la ligne défensive des Broncos qui a stoppé le jeu au sol pour un deuxième match consécutif. Contre les Chargers, Denver n’avait donné que 65 verges par la course. Contre les Pats, les Broncos n’ont concédé que 64 verges au sol. LeGarrette Blount a seulement récolté six verges en cinq courses. Quand c’était Blount, on a congestionné le centre de la défensive et on le forçait à aller à l’extérieur. C’est un porteur de ballon qui n’a pas des déplacements latéraux rapides et il aime courir entre les bloqueurs.

Du côté du jeu aérien, les Broncos ont forcé Tom Brady à les battre avec ses receveurs. Quand on regarde la brochette de receveurs à la disposition de Brady, ce n’est pas au même niveau que celle de Manning. Le pari a fonctionné. Les receveurs des Patriots ne se sont pas souvent démarqués et cela n’a pas aidé Tom Brady. Les fois où ils l’étaient, Brady a manqué de précision.

À la blague, on disait que les Patriots n’avaient pas leur place à ce match en raison de la saison qu’ils avaient connue et de toutes les blessures qui les affectaient. On se demandait comment ils avaient réussi à se rendre à ce stade des éliminatoires. Je pense que tous ces éléments les ont rattrapés. Le citron a été pressé au maximum et il ne restait plus rien. C’est tout de même tout un exploit.

C’est frustrant pour eux, mais il ne faut pas oublier que c’était leur troisième saison consécutive où ils atteignaient la finale de l’Association Américaine. Il y a bien des équipes qui aimeraient pouvoir dire la même chose.

L’intensité au rendez-vous à Seattle

J’ai adoré la finale de l’Association Nationale qui mettait aux prises les 49ers aux Seahawks. Intensité, robustesse, intimidation, élément physique, c’était de toute beauté. C’était du football à l’ancienne. Le football devient presque un jeu vidéo avec le jeu aérien et tous les règlements qui favorisent l’attaque et le jeu de passe.

Ces deux équipes utilisent encore la vieille recette avec la défensive, le jeu au sol et quelques belles passes. En plus, c’est une rivalité incroyable étant donné que les deux formations ne s’aiment pas. La table était mise pour un match intense et c’est ce que nous avons eu.

Finalement, la défensive des Seahawks aura eu le dessus sur Colin Kaepernick parce que c’est ce qui a fait la différence en fin de compte. Il a été excellent avec ses jambes et il a été très bon pendant trois quarts. Contre une unité défensive comme celle de Seattle, tu ne peux pas te permettre de relâchements et de mauvaises décisions parce qu’elle va te les faire payer.

C’est dommage parce que pendant les éliminatoires, en comptant les trois premiers quarts contre les Seahawks, Kaepernick n’a commis qu’un revirement en 11 quarts. C’était son interception contre les Packers. C’était la clé. Il ne devait pas être victime de revirement.

Chaque jeu est stressant contre la défensive des Seahawks. Chaque jeu, tu sais que tu n’as pas de marge d’erreur. Le stade est bruyant. Travailler dans un stade comme celui des Seahawks, c'est épuisant mentalement quand tu ne peux même pas t’entendre penser. Il faut ajouter à cela une défensive qui frappe tout ce qui bouge et qui est dominante.

Tout s’est écroulé au quatrième quart pour les 49ers. Ils ont eu le ballon durant trois séquences et elles se sont toutes terminées par un revirement. La première interception de Kaepernick était une mauvaise passe et une mauvaise décision.

Sa deuxième interception, c’est sûr que c’est plus facile d’en parler après le match, mais il était quand même à la ligne de 18 lors d’un premier essai avec une trentaine de secondes à faire et avec deux temps d’arrêt. Il n’avait pas besoin de forcer le jeu. Est-ce qu’on a voulu surprendre les Seahawks en attaquant la zone des buts en premier? Et en deuxième en attaquant Richard Sherman? Le pari n’a pas fonctionné.

On doit lever notre chapeau à Sherman. C’était seulement la deuxième fois qu’on l’attaquait dans le match. Plusieurs joueurs auraient décroché mentalement. Quand tu te tournes les pouces durant une rencontre, c’est difficile de rester concentrer. Il y a des joueurs qui commenceraient à se relâcher et à avoir des crampes au cerveau. Et tout d’un coup, tu te fais attaquer et tu réagis mal.

Richard Sherman et Michael CrabtreeDans ce contexte, je suis vraiment impressionné par Richard Sherman. Il ne s’est pas endormi et il est resté concentré pour faire le gros jeu. Il a non seulement rabattu la passe, mais il l’a fait dévier vers son coéquipier Malcolm Smith qui est venu l’intercepter.

Évidemment, Richard Sherman a fait parler de lui pour les mauvaises raisons par la suite. C’est dommage parce que c’était probablement l’un des plus gros jeux de sa carrière. Malheureusement, au lieu de parler de ce jeu, on a parlé de son geste antisportif sur le terrain après l’interception et de ses commentaires d’après-match.

Je n’approuve pas cela. Ce n’est pas mon style. Je suis un ancien joueur de ligne offensive. Les joueurs de ligne à l’attaque, ce sont des forces tranquilles. Les demis défensifs et les receveurs, peu importe les niveaux, ce sont toujours les pires. C’est toujours eux qui jasent le plus et ils en ressentent toujours le besoin. On dirait qu’ils ont besoin d’attaquer l’adversaire pour se donner de la confiance pour mieux jouer. Et c’est ce qu’on a vu entre Michael Crabtree des 49ers et Sherman des Seahawks.

Si tu veux faire taire Sherman, tu dois attraper des ballons contre lui, marquer des touchés et battre les Seahawks. Il faut que je donne le mérite à Sherman. Ce n’est pas mon style de joueur en ce qui a trait à son comportement et ses déclarations, mais il agit. Je n’ai pas de problème dans ce sens-là. Je préférerais qu’il soit plus respectueux par contre. Des gars qui parlent, mais qui réussissent les gros jeux, je suis capable d’accepter cela.

Du côté de l’attaque des Seahawks, je veux voir le baptistère de Russell Wilson. Je n’en reviens pas de la maturité de ce joueur à son âge. C’est seulement sa deuxième année dans la NFL. Il m’impressionne par son calme, son sang-froid et sa confiance. On savait qu’il devait en faire plus et il a répondu.

Wilson a démontré son calme dès le tout début du match. Lors de sa première séquence, il a subi un sac du quart et il a échappé le ballon. Lors de la série suivante, il a failli être victime d’une interception. Il a subi quatre sacs du quart en première demie et il a quand même complété 64 % de ses passes. Il a réussi de longs jeux.

Je l’ai trouvé mature sur sa passe de touché de 35 verges alors qu’il s’est aperçu que c’était un jeu gratuit en raison d’une pénalité de hors-jeu à San Francisco. Il s’est dit pourquoi pas! Les Seahawks ont converti ce jeu pour attaquer les zones profondes comme plusieurs équipes le font lorsqu’elles ont un jeu gratuit.

Russell WilsonCe qui est aussi intéressant avec ce touché, c’est que Pete Carroll voulait envoyer son botteur sur ce quatrième essai. Après le match, le botteur Steven Hauschka a affirmé qu’il est allé dire à son entraîneur qu’il ne devait peut-être pas prendre la décision d’essayer le placement de 53 verges. Il a été assez honnête envers lui-même et son équipe pour dire à son entraîneur que ce n’était pas la meilleure solution. Et Hauschka connaît une bonne saison, mais avec le vent de ce côté, il ne le sentait pas. Finalement, les Seahawks y vont en quatrième essai et marque le touché.           

Sur sa passe de 51 verges, Wilson a couru pendant près de 10 secondes pour étirer le jeu. Colin Kaepernick a comme avantage de pouvoir utiliser ses jambes pour des gains au sol. La grande qualité de Russell Wilson est de courir pour étirer le jeu de passe.

Les Seahawks ont été patients en raison de leur défensive dominante qui gardait le match chaud. Il n’y avait pas de panique. Et on l’a vu au troisième quart avec la course de 40 verges pour un majeur de Marshawn Lynch.

Le week-end de boxe me permet de vous présenter une analogie. Les courses lors des premier et deuxième quarts, ce sont comme des coups au corps pendant un combat de boxe. Les coups au corps vont te permettre de faire baisser la garde de ton adversaire. Et c’est à ce moment que tu vas pouvoir rentrer avec un bon coup de poing.

C’est exactement la même chose avec Lynch. Ce n’était pas de grosses courses en première demie, mais on a martelé l’adversaire et puis tout d’un coup, il court sur 40 verges pour un touché important.

*Propos recueillis par Christian L-Dufresne