Il y a six mois, Laurent Duvernay-Tardif complétait sa troisième saison dans la NFL. Un mois et demi plus tard, les Chiefs de Kansas City lui témoignaient toute leur confiance en lui offrant une prolongation de contrat de cinq ans et 41,25 millions $.

De quoi mettre la table à un été de rêve...

Laurent Duvernay-Tardif n’est toutefois pas un joueur de football commun.

« Immédiatement après le mini-camp (d’entraînement) à Kansas City, je suis parti 10 jours en Europe pour vraiment recharger les batteries et prendre du temps pour moi, a-t-il raconté à l’animateur de la baladodiffusion Le sac du quart, Didier Orméjuste.

« Je suis ensuite revenu à Montréal et le lendemain je recommençais l’université. »

Athlète-étudiant avant tout, le sympathique garde québécois avait des études en médecine à poursuivre, un stage en anesthésie qui l’attendait à l’hôpital Royal-Victoria et... une fondation naissante à lancer.

« Je suis quand même assez occupé, mais en même temps, j’aime ça. Ça me drive », a ajouté LDT, dont la fondation a pour principal mandat de faire la promotion de l’activité physique en milieu scolaire.

« On veut une jeunesse plus active et renforcer le modèle de l’athlète-étudiant. C’est ce que j’essaie de promouvoir avec mon histoire en combinant la médecine et le football au plus haut niveau. »

Une union complémentaire

D’ici à son retour à Kansas City pour le lancement officiel du camp d’entraînement des Chiefs le 27 juillet prochain, Duvernay-Tardif poursuit son apprentissage dans les salles d’opération.

« [L’anesthésie], c’est assez connexe avec ce que je veux faire plus tard, c’est-à-dire de la médecine d’urgence. [Ça exige] beaucoup de procédures et d’habiletés techniques dont on a besoin en urgence comme les intubations, les lignes artérielles, etc. Faire ça dans un environnement plus contrôlé comme une salle d’opération, ça me donne beaucoup l’opportunité de pratiquer. »

Un contexte qui lui permet aussi de parfaire ses aptitudes mentales sous pression. Une salle d’opération ce n’est certes pas un terrain de football, mais on n’y pénètre pas sans un degré de concentration similaire, estime Duvernay-Tardif.

« Le sport d’équipe, surtout à un haut niveau quand il y a 80 000 personnes en délire autour de toi, c’est de la pression. Un match de football c’est 60 jeux, mais les derniers jeux d’un match serré sont tellement cruciaux. Faire abstraction de tout ce qui se passe autour de toi, aborder le jeu de manière vraiment rationnelle et ne pas laisser les émotions avoir le meilleur de toi-même, c’est quelque chose que tu apprends relativement vite au football et ça se transpose vraiment bien en médecine quand un patient saigne abondamment ou qu’il est instable », compare-t-il.

« On dit souvent au football que tes performances passées ne sont en aucun moment reliées à tes performances futures. [...] Chaque jeu est un petit match en soi, au même titre que quand tu vois un nouveau patient dans la salle d’urgence. Il faut être capable de bien segmenter sa journée et offrir le même niveau de concentration à chaque patient. »

Au football, à moins de circonstances exceptionnelles, on ne côtoie cependant pas la mort.

« Ça vient quand même te chercher, reconnaît le colosse de 6 pi 5 po et 321 livres. Le plus difficile, c’est de prendre une grande respiration quand les manœuvres de réanimation sont terminées pour réaliser ce qui vient de se passer. Dans le feu de l’action, tu opères selon des algorithmes et des plans mis en place, mais quand tout ça est fini, tu fais un pas en arrière pour regarder devant toi et tu réalises que crime, c’est difficile de voir quelqu’un perdre la vie. »

Duvernay-Tardif a donc beau faire sensation chez lui et de plus en plus au sud de la frontière, son quotidien se charge donc de le garder les deux pieds bien vissés sur terre.

« Tu finis ta saison à Kansas City et tu te sens un peu comme si tu étais au sommet de tout, au sommet de ton art à jouer devant des centaines de milliers de personnes. Mais quand tu reviens à l’hôpital, tu vois des jeunes de ton âge dans tes situations que tu n’envies pas du tout, que ce soit un accident ou une maladie chronique. Tu te dis alors : " Oh my God!  Et moi je stressais durant telle parte! ". Ça remet les choses en perspectives. Au bout du compte, ce n’est qu’un jeu. »

Un jeu qu’il promet toutefois d’approcher encore avec tout le sérieux qui le caractérise.

*Pour écouter l’entrevue complète de Laurent Duvernay-Tardif, cliquez ici.