Les Européens ont encore une fois eu le meilleur sur les Américains lors de la présentation de la Coupe Ryder. On avait beau s’y attendre, reste que cette huitième victoire lors des dix dernières éditions du tournoi prend des proportions de plus en plus inquiétantes pour les perdants.

Les Américains sont à court d’excuses et ces défaites à répétition minent non seulement le moral de ceux qui portent fièrement les couleurs des États-Unis, mais surtout la crédibilité qu’ils ont mis des années à établir en tant que meilleurs golfeurs de la planète. On sait depuis un bout de temps que cette dernière affirmation ne tient plus et la journée que la délégation américaine sera vaincue par l’équipe internationale lors de la Coupe des Présidents viendra confirmer que leur monopole de l’excellence est bel et bien terminé.

Comment expliquer cette situation?

Il y a d’abord et avant tout cet objectif commun chez tous les professionnels d’Europe : gagner les deux plus importants tournois du monde à savoir l’Omnium britannique et la Coupe Ryder. Toutes les autres compétitions ont certes leur importance, mais rien, absolument rien, ne peut surpasser la grandeur de ces deux championnats. Ni le Tournoi des Maîtres, ni l’Omnium américain ou le Championnat de la PGA.

Chez les Américains, on a l’impression qu’on a le choix d’une victoire d’importance sur le circuit PGA Tour. Le Tournoi des Maîtres revêt un caractère particulier avec son côté mythique on en conviendra, mais les autres championnats, y compris le Championnat des joueurs et le Championnat du circuit, n’auront jamais le même cachet ni ne revêtiront la même importance que le plus ancien tournoi individuel et le championnat par équipe le plus réputé.

Les « Bleus » ont donc dans le sang la dose d’acharnement requise pour gagner ces deux titres à tout prix. Ce qu’on ne retrouve pas chez les Américains. Ce qu’on n’a pas encore trouvé chez les Internationaux pour qu’ils veuillent vraiment décrocher la victoire lors de la Coupe des Présidents.

Lors de la dernière victoire américaine en 2008 à Valhalla, c’est Paul Azinger qui a dirigé l’équipe des États-Unis. Il avait constamment arpenté le terrain fouettant ses troupes tel un général sur un champ de bataille. Les spectateurs avaient été mis à profit pour veiller à ce que personne n’ait un relâchement. Les manifestations lors des bons coups et à la suite de chacune des victoires donnaient lieu à des cris de joie et à des gestes qui ne conviennent pas généralement aux amateurs de golf. La Coupe Ryder était à peine attribuée qu’on voulait remettre Azinger en place prétextant que lui sait comment gagner.

Dimanche dernier, Patrick Reed, un des jeunes joueurs de l’équipe américaine a défié la foule après avoir égalé le pointage de son rival en levant le doigt pour imposer le silence aux spectateurs. Ce simple geste n’en était pas un de célébration, mais d’arrogance. Lorsque Poulter a renversé la vapeur lors de la Coupe en 2012 à Medinah, le geste qu’il a alors posé en fut un de célébration et d’encouragement pour ses équipiers. Reed dimanche dernier est allé à la guerre. Tout seul. La Coupe Ryder n’est pas une guerre, c’est un tournoi sportif. Qu’on sorte l’équipe américaine de cette mentalité qu’on est constamment à la recherche d’un conflit.

Plutôt que de miser sur cette arrogance qui leur colle à la peau dans plusieurs autres domaines, les golfeurs américains devraient plutôt apprendre à manifester avec le sourire et la force tranquille de quelqu'un qui sait qu’il vient de faire un bon coup et qu’il sera ainsi capable de remporter la victoire. Ce message peut probablement rapporter davantage sans pour autant offenser qui que ce soit et provoquer des réactions négatives.

Les Américains doivent complètement changer leur approche. Le patriotisme outrancier n’apporte rien de plus à la préparation sportive des athlètes engagés dans une compétition comme la Coupe Ryder. Il  faut chercher ailleurs.

Il faut qu’ils réalisent qu’ils ont du travail à faire afin de remonter la pente. Le championnat se gagnera sur le terrain et nulle part ailleurs.

 Les impressions que donnaient les deux équipes lors de la finale étaient à l’opposé : d’un côté le rassemblement des joueurs qui sont de petites et moyennes entreprises, et dans certains cas de grosses entreprises qui ne pensent qu’en fonction de leur bien-être. De l’autre côté, un groupe de golfeurs professionnels qui vivent ensemble à longueur d’année, qui forment une famille, et qui éprouvent énormément de plaisir à faire ce qu’ils font de mieux, jouer au golf avec passion.

Ces revers à répétition pourraient aussi avoir à court terme des répercussions négatives sur la crédibilité du circuit nord-américain. Bien que plus riche, le PGA Tour doit continuellement être à la recherche de nouveaux partenaires afin de faire vivre un calendrier doté de bourses de près de 300 000 000$. Pour conserver des alliés financiers importants, il faut aligner les meilleurs golfeurs. Or, le circuit européen a gagné en popularité et en crédibilité au cours des dernières saisons. Et cette récente victoire lors de la Coupe Ryder donne encore plus d’arguments aux responsables pour améliorer les bourses et les infrastructures de cette ligue professionnelle en croissance. Cette situation doit, j’en suis convaincu, commencer à inquiéter les dirigeants du PGA Tour.

Un dernier mot. Chaque équipe compte 12 joueurs. Pourquoi ne pas leur permettre d’être tous à l’œuvre à chacune des sessions. Actuellement, quatre joueurs sont laissés de côté à chaque session des compétitions selon les formules en coups alternatifs et meilleure balle. Cela ne modifierait que très peu l’horaire des deux premières journées. Plutôt que 28 points, ça donnerait un total de 36 points et l’avantage de cette formule permettrait aux amateurs de voir tous les joueurs disponibles à chaque jour. Pas de chicane pour les capitaines pour ne pas brimer qui que ce soit et la possibilité de voir les meilleurs golfeurs s’exprimer pendant trois jours consécutifs.