« Quelque part avant les Fêtes, le premier janvier avec la Classique hivernale, au mieux tard en novembre… »

Voilà un échantillon des prédictions de plusieurs collègues, joueurs, entraîneurs, observateurs ou simples amateurs entendus dès le printemps dernier quant au dénouement de l'impasse contractuelle entre joueurs et propriétaires dans la Ligue nationale de hockey. Peut-être étiez-vous de ceux-là, vous-mêmes. Alors, vous êtes surpris par l'annonce de l'annulation de tout le calendrier de novembre ?

Peut-être pas surpris, mais certainement déçus, comme je le suis, car il y avait vraiment apparence d'un rapprochement possible, la semaine dernière, à pareille heure. Mais voilà que tout bascule brutalement, sans le moindre indice de mouvement à l'horizon. Novembre s'amène dans moins d'une semaine et soudainement, devant cette occlusion, voilà que même la perspective de voir des matchs tôt en décembre devient sérieusement douteuse.

Mais que peut donc justifier cette situation en apparence ridicule? Avons-nous tous si mal compris les enjeux pour croire que les deux clans ne peuvent même pas s'asseoir dans la même pièce? Je ne crois pas.

Il y a d'abord toute la notion de stratégie. La ligne dure, celle de l'imposition d'un lock-out rapide dès les premiers échecs à la table de négociations, fut aussi adoptée par la NFL et la NBA, avec un succès indéniable pour les propriétaires. Or, fait intéressant, les trois grands circuits ont recours aux services de la même puissante firme d'avocats, Proskauer Rose, spécialisée notamment en relations et lois du travail, firme pour laquelle David Stern, commissaire de la NBA, Gary Bettman, commissaire de la LNH et David Zimmerman, conseiller général auprès de la LNH, ont tous œuvré plus tôt dans leur carrière. On commence donc à mieux saisir le lien entre les trois démarches.

Puis, il y a l'entêtement des deux parties sur leurs « véritables » intentions quant à un éventuel partage des revenus à parts égales. Quelque part, bien caché à travers des paragraphes, des mots, des virgules et des alinéas, il semble y avoir un trou profond quant à la notion de respect des contrats actuels liée à ce fameux 50-50. La LNH, à tort ou à raison, veut assurément des concessions immédiates, peu importe comment elles sont maquillées. Les joueurs, à tort ou à raison, refusent systématiquement la moindre ouverture à ce chapitre et c'est sans doute pourquoi Donald Fehr a concocté cette approche à trois volets (rejetée rapidement par la LNH), un habile maquillage en sens inverse. Si Gary Bettman veut un nouveau contrat visant, par exemple, à aider Nashville à survivre après avoir « obligatoirement » consenti un contrat aussi lourd à Shea Weber, Donald Fehr aimerait bien inversement défendre le droit de certaines équipes à continuer à faire monter allègrement les enchères et à défier les lois non-écrites entre les équipes, même à l'intérieur d'un système de plafond salarial. Quand les deux adversaires disent qu'ils ne « parlent même pas le même langage », c'est bien vrai.

Pression sur les deux leaders

Si Donald Fehr a obtenu en apparence un appui unanime et indéfectible de la part des joueurs quant à son approche et si Gary Bettman peut mener la barque à sa guise avec l'appui de seulement six propriétaires (n'oublions pas que Phoenix appartient à la LNH), il n'en demeure pas moins qu'il serait intéressant de connaître les états d'âme de différents joueurs ou propriétaires, à cette étape du processus. Si des sommes importantes ont été perdues lors de la période des matchs préparatoires, des sommes colossales seront perdues des deux côtés à compter de maintenant, des sommes qui ne reviendront jamais. On a beau dire qu'il s'agit d'une guerre de riches, personne au monde n'aime perdre de l'argent et il est très légitime de se demander si TOUS les joueurs et propriétaires croient fermement qu'il n'y a aucun compromis possible.

Il est donc temps que différents mouvements de pression s'exercent, ne serait-ce qu'en coulisses, sur les deux « têtes dures » qui s'affrontent. Je suis d'accord avec mon collègue Marc Denis quand il affirme que certains joueurs d'impact devraient exprimer leur volonté de voir les deux parties se réunir le plus rapidement possible et d'ouvrir à nouveau le canal de communication. Je crois aussi fermement que des propriétaires plus modérés ou plus souples devraient eux aussi avoir le droit d'influencer en privé l'homme qu'ils paient eux-mêmes très cher pour diriger le circuit.

Et les agents dans tout cela? Vous vous souvenez comment ils étaient volubiles lors de la guerre du plafond salarial en 2004-2005? Où sont-ils cette fois? Les Don Meehan, Pat Brisson, Rich Curran, Bobby Orr et autres ont un impact majeur dans la réalité économique du hockey, leur pouvoir est indéniable et ils ont tous grandement profité de la santé globale de la LNH au cours des dernières années. Or, ils devraient être les premiers à mettre de la pression pour que le pragmatisme s'installe entre les adversaires, au lieu de chercher à trouver résolument une équipe européenne pour quelques-uns des leurs protégés!

Finalement, la seule pression qui existe présentement, mes amis, c'est celle des amateurs de hockey qui commencent sérieusement à en avoir marre. Même s'ils représentent la base même de la prospérité économique du sport qu'ils aiment, ils n'ont aucun impact sur le processus de négociations. Malheureusement!

Il est donc temps de crier…à l'aide! De nouveaux pôles d'influence doivent apparaître, à partir même des différentes parties impliquées. Sans cela