La prolongation de contrat de quatre ans que vient de parapher Michel Therrien illustre encore une fois les profonds changements qui ont marqué le hockey au fil des ans.

Sur le plan salarial, les entraîneurs ont mis beaucoup de temps à être reconnus à leur juste valeur. Quand des entraîneurs touchant 300 000 $ par saison dirigeaient des joueurs plusieurs fois millionnaires, il leur était difficile d'établir solidement leur autorité. Il suffisait que deux ou trois riches salariés glissent à l'oreille de leur directeur général qu'ils en avaient assez de leur entraîneur pour que le plus bas salarié de l'équipe se retrouve au chômage.

Et comme certains d'entre eux en étaient à leur première expérience derrière le banc d'une équipe de la Ligue nationale, certains d'entre eux disparaissaient de la scène pour ne plus jamais revenir. Quelques belles carrières d'entraîneurs ont probablement été perdues de cette façon.

Aujourd'hui, l'entraîneur le mieux rémunéré touche jusqu'à 2 millions $ par saison. Ils sont plusieurs à avoir franchi l'étape du million de dollars, de sorte qu'on se montre parfois un peu plus patient avant de remplacer un coach qui traverse une période difficile puisque tous ces contrats sont respectés. Les organisations bien nanties, qui commettent des erreurs magistrales, comme ce fut le cas à Vancouver avec John Tortorella, congédié après la première année d'une entente de cinq ans évaluée à 10 millions $, paient chèrement le prix pour leur manque de vision et de jugement.

Ce qui nous amène à la situation de Michel Therrien qu'on vient de récompenser pour un parcours étonnant depuis son embauche. C'est une indication que le Canadien a su s'ajuster aux changements dont je parlais plus tôt. C'est aussi pour Bergevin la confirmation de son intention d'instaurer beaucoup de stabilité à la tête de l'équipe. C'est également un signal fort envoyé aux joueurs qui vont devoir faire route avec Therrien, que ça leur plaise ou non.

Non seulement Therrien est-il devenu samedi l'entraîneur le mieux payé dans l'histoire de l'organisation, mais on a accepté de courir un certain risque financier avec lui. De toute évidence, Marc Bergevin, qui s'est montré étonnamment généreux, ne croit pas que son entraîneur soit un simple feu de paille. Ajouter quatre ans à son entente constitue toute une marque de reconnaissance. Une décision entérinée par Geoff Molson qui a une confiance totale en son directeur général.

Molson ne s'est pas trompé en embauchant Bergevin et Bergevin a choisi le bon homme derrière le banc. Ça donne une direction forte dont les succès sont rapides. Que le Canadien se soit hissé parmi les quatre finalistes pour la coupe Stanley n'est pas étranger à ce qui vient de se passer.

Il restait à Therrien une saison à écouler à son contrat original de trois ans. Comme on vient de rajouter quatre ans à cette entente, cela signifie qu'il passera un minimum de sept ans à la barre de l'équipe s'il se rend au bout de ce mandat. Or, à Montréal, les entraîneurs sont généralement remerciés après deux ou trois ans.

Scotty Bowman a dirigé le Canadien durant huit saisons durant les années 70. Depuis, un seul homme a tenu bon durant au moins quatre ans : Pat Burns. Il est parti de lui-même parce qu'il suffoquait sous la pression. En 35 ans à Montréal, aucun entraîneur ne s'est vu offrir la possibilité de passer autant de temps que Therrien derrière le banc.

Personne n'est en mesure de prédire la suite des choses. On souhaite à Therrien d'être à la hauteur de ce vote de confiance. Pour y arriver, il lui faudra de la santé, de la chance, des nerfs solides et une capacité de s'adapter aux joueurs qu'on lui offrira. Même s'il s'est légèrement adouci, Therrien est reconnu comme un entraîneur possédant une main de fer dans un gant d'acier. Il ne fait pas souvent de compromis. Pour espérer durer longtemps, il pourra toujours s'inspirer de l'attitude de Bowman qui, à Pittsburgh et à Detroit, a mis de l'eau dans son vin en tempérant son comportement avec une autre génération de joueurs. Alors qu'on le croyait en fin de carrière, ses deux derniers arrêts à Pittsburgh et à Detroit lui ont permis d'ajouter 865 matchs, 505 victoires et quatre autres conquêtes de la coupe Stanley à un palmarès déjà fort bien garni.

Vanek béni des dieux

Certains athlètes se voient offrir une chance unique de profiter d'un système qui est loin d'être parfait. Thomas Vanek a sûrement été l'un de ceux-là.

À sa deuxième saison dans la Ligue nationale, Vanek a reçu une offre hostile de Kevin Lowe, des Oilers d'Edmonton. Une proposition mirobolante de 50 millions $ pour sept ans après une saison de 84 points, dont 43 buts, qu'il n'a d'ailleurs jamais répétée par la suite. Or, comme les plus hauts salariés de la ligue se voient rarement offrir des contrats au rabais, Vanek s'attend évidemment à obtenir une autre proposition du même genre. Ce qui veut dire qu'on n'a aucune chance de le revoir à Montréal.

Vanek n'aurait jamais dû empocher autant d'argent. Le geste des Oilers avait été jugé irresponsable par ses homologues de la ligue. Au cours de la première année de cette entente, son salaire était passé de 940 000 $ à 10 millions. De la folie pure.

Par son attitude, Vanek a donné de quoi réfléchir à Bergevin durant les séries. Le simple fait qu'il ait été totalement invisible quand le reste de l'équipe se battait avec acharnement pour survivre devrait convaincre le patron du Canadien qu'il n'est pas le type de joueur avec lequel on peut espérer bâtir une équipe championne.

Si Vanek avait adopté pareil comportement parmi les Glorieux qui ont gagné six coupes Stanley en neuf ans durant les années 70, il se serait joyeusement fait remettre à sa place. Mais qui dans le vestiaire actuel du Canadien aurait pu lui parler entre quatre yeux? Malheureusement, personne n'était assez fort pour cela.

Dommage pour Saint-Louis

Dans la spectaculaire victoire des Kings de Los Angeles, on était tous un peu désolé pour Martin Saint-Louis dont il s'agissait d'une dernière chance d'ajouter une autre coupe Stanley à son extraordinaire parcours dans la Ligue nationale.

Saint-Louis écoulera l'an prochain la dernière année d'un contrat lui rapportant 5 millions $, mais il serait étonnant que les Rangers soient de retour en finale.

Sur un plan personnel, il faut s'attendre à ce qu'il se voit offrir un autre contrat, malgré le fait qu'il aura 39 ans mercredi. Avant que Saint-Louis ne soit échangé aux Rangers, Julien Brisebois s'était dit assuré de voir son patron, Steve Yzerman, renouveler son contrat à Tampa. Qualifiant Saint-Louis de joueur sans âge, il ne voyait pas pourquoi sa carrière prendrait fin prochainement puisqu'il continue de produire à un rythme vraiment impressionnant, lui qui vient de connaître une saison de 30 buts.

Le public québécois a toutes les raisons d'être fier de Saint-Louis et de tout ce qu'il a accompli jusqu'ici. Son total de points en carrière fait de lui le meilleur marqueur de tous les temps parmi les Québécois qui n'ont jamais été repêchés. Mieux encore, il est le seul joueur dans l'histoire de la ligue à avoir remporté le championnat des marqueurs (deux fois) et le trophée Hart sans avoir été repêché.

Toute une histoire que la sienne!