« On est très conscients que ce sera très difficile de faire les séries. »

Voilà ce qu’a convenu Michel Therrien après qu’il eut été témoin, comme tout le monde, de l’effondrement de son équipe en troisième période. Un effondrement qui a transformé l’avance de 2-1 dont profitait son équipe et la victoire qui semblait à la portée du Canadien en défaite un brin gênante aux mains des Sabres de Buffalo.

Eh oui! Après avoir perdu deux matchs de suite contre les « puissants » Blue Jackets de Columbus, voilà que le Canadien n’a pas été fichu de tenir tête aux tout aussi « puissants » Sabres de Buffalo qui sont venus battre le Tricolore 4-2 au Centre Bell mardi soir. Ironie du sort, c’est Brian Gionta, l’ancien capitaine du Tricolore, qui a marqué dans un filet désert pour sceller l’issue de la rencontre.

Le Canadien vient donc de perdre deux fois de suite au lendemain de la pause du Match des étoiles. Ça lui fait quatre revers consécutifs, une victoire à ses 10 derniers matchs et il affiche maintenant 20 défaites en temps réglementaire (5-20-1) à ses 26 derniers matchs.

Comme quoi le Canadien est vraiment la pire des pires équipes de la LNH depuis le début du mois de décembre dernier.

Pas surprenant alors que l’entraîneur-chef Michel Therrien ait reconnu que les séries semblent de moins en moins à la portée de son club qui a pourtant encore 30 matchs à disputer avant la fin de la saison régulière. Mais voilà : de ces 30 parties, le Canadien devra en gagner une vingtaine pour au moins se donner une chance de faire mentir ceux qui croient – et ils sont nombreux – qu’il est rendu utopique de penser que le Tricolore prolongera sa saison au-delà du 9 avril.

Car si le Canadien n’est pas en mesure de protéger une avance d’un but, en troisième période, chez lui, contre des Sabres de Buffalo qui sont loin, très loin, de former une équipe prête à se tailler une place en séries, comment diable peut-on croire qu’il sera en mesure de gagner deux matchs sur trois d’ici la fin du calendrier?

Encore des cadeaux

Le Canadien qui s’est contenté de marquer 50 petits buts à ses 26 derniers matchs a miné ses chances de victoire en offrant deux buts en cadeaux à ses adversaires encore hier.

Marcus Foligno a enfilé le premier but du match après qu’il eut reçu une passe parfaite de Zemgus Girgensons dans l’enclave. Foligno a pu prendre tout son temps avant de tirer parce qu’il était fin seul dans l’enclave.

Pourquoi s’est-il retrouvé aussi seul?

Parce que Jeff Petry a perdu sans raison aucune la rondelle le long de la bande dans une bataille qui n’en était pas vraiment une aux dépens de Girgensons.

Parce qu’Alexei Emelin, voyant Girgensons sortir du coin a décidé de quitter l’enclave pour aller frapper l’attaquant des Sabres.

Mais voilà! Comme tous les attaquants du Canadien brillaient par leur absence en zone défensive et que Girgensons a eu le temps de voir Emelin prendre une chance qu’il n’aurait jamais dû prendre, l’attaquant des Sabres a habilement rejoint son coéquipier dans l’enclave, qui aurait pu changer le ruban sur la lame de son bâton avant de tirer tant il était seul devant Mike Condon.

Tom Gilbert et Nathan Beaulieu n’ont pas mieux paru sur le but de la victoire alors que Johan Larsson s’est faufilé entre eux sans la moindre difficulté pour rediriger une passe de Jake McCabe derrière Condon, qui ne pouvait rien de rien sur ce jeu.

« Les premier et troisième buts n’auraient jamais dû arriver. Tu ne peux pas gagner si tu ne te défends pas bien », que l’entraîneur-chef a plaidé après la rencontre. Surtout quand ton équipe se contente de moins de deux buts par match.

Pourquoi quatre trios?

Bien que son équipe soit aussi lamentable en attaque, Michel Therrien a fait appel à ses quatre trios en fin de rencontre malgré l’urgence d’aller inscrire un but qui aurait propulsé le match en prolongation et ainsi permis de récolter au moins un point.

Lorsqu’un collègue a demandé au coach pourquoi il n’avait pas plutôt « coupé » son banc pour faire appel à ses meilleurs éléments, Therrien a refusé de répondre prétextant que le collègue remettait simplement sa décision en question.

La question était pourtant bien légitime. Surtout que quelques questions plus tard, le coach est revenu sur le sujet, imputant au besoin de reposer l’ensemble de ses trios l’utilisation des joueurs de soutien avec moins de quatre minutes à faire au match.

La position de Michel Therrien se défend.

Remarquez qu’il aurait aussi pu réclamer un temps d’arrêt pour reposer ses meilleurs joueurs. Ce qu’il a d’ailleurs fait une fois son gardien rappelé au banc.

L’utilisation systématique des quatre trios du Tricolore, surtout en fin de rencontre, démontre à quel point les meilleurs éléments de l’équipe peinent à produire. Si les Pacioretty, Plekanec, Gallagher et Desharnais transformaient plus souvent leurs tirs en bonnes occasions de marquer, et leurs bonnes occasions de marquer en buts, l'entraîneur serait peut-être plus enclin à maximiser leur utilisation lorsque son équipe a besoin d’un but.

Mais encore hier soir, le Canadien avait-il plus de chance de marquer avec le trio de Plekanec sur la patinoire qu’avec celui de Torrey Mitchell?

Le fait qu’il soit difficile de répondre un oui bien franc aide la cause du coach. Du moins un peu.

Sauf que lorsqu’on remarque qu’Alex Galchenyuk, de loin l’attaquant le plus menaçant du Canadien encore hier, n’a pas été celui qui été le plus utilisé, il est permis de se demander pourquoi on ne lui accorde pas plus de temps d’utilisation.

Surtout que de l’aveu même de l’entraîneur-chef, « il sera très difficile de faire les séries… »

Gallagher assommé

Contrairement à leur entraîneur-chef, les joueurs – du moins ceux que j’ai croisés dans le vestiaire – n’ont pas convenu qu’il sera très difficile d’accéder aux séries. Mais il était clair que cette 21e défaite lors des 26 derniers matchs faisait mal. Très mal.

Fougueux sur la patinoire, Brendan Gallagher semblait encore sonné par l’issue de la rencontre lorsqu’il a affronté les journalistes. « Nous avons été une très bonne équipe en début de saison. Nous ne le sommes plus. Nous trouvons maintenant de nouvelles façons de perdre. Je ne sais plus quels mots utiliser pour décrire ce qui nous arrive. En avant 2-1, en troisième période, à la maison, nous nous devions de garder l’avance jusqu’à la fin », a mentionné un Gallagher très émotif. Un Gallagher qui semblait sur le bord des larmes sans toutefois nous laisser voir s’il s’agissait de larmes de rage ou de dépit.

« Ça n’a pas de bon sens de nous écraser comme nous l’avons fait en fin de match. On s’est mis en mode défensif. C’est comme ça tous les soirs », a ajouté Dale Weise de l’autre côté d’un vestiaire à l’intérieur duquel les rares joueurs venus répondre aux questions des journalistes le faisaient à voix basse tant l’atmosphère était lourde. Aussi lourde que le poids des défaites qui s’accumulent. Qui se multiplient.

« Quand tu perds, tu dois vite mettre la défaite de côté et te concentrer sur la prochaine rencontre. Habituellement, on y arrive. Mais honnêtement, ça devient vraiment difficile de mettre toutes ces défaites de côté. On doit garder confiance. On doit se motiver en nous disant que nous sommes seuls contre le monde entier », a ajouté Weise.

Sans Carey Price

Déjà que les défaites en séries représentent une source immense de découragement, voilà que les nouvelles concernant Carey Price semblent loin d’être encourageantes.

Comme on l’a vu sur les images captées par RDS mercredi matin à Brossard, Carey Price n’a toujours pas remis l’équipement. De fait, il patine toujours en solitaire et loin de s’améliorer, son état semble même se détériorer au point que Price a fracassé un bâton en signe de dépit lors de sa séance personnelle d’entraînement.

Un geste loin d’être rassurant pour une équipe qui s’éloigne dangereusement des séries et qui s’en éloignera plus encore si son gardien et leader incontesté n’est pas en mesure de vite reprendre sa place devant le filet et dans le vestiaire.

« Ça n’a rien à voir avec les gardiens. Mike (Condon) ou Ben (Scrivens) ne sont pas à blâmer dans nos défaites. Ce sont les mêmes joueurs qui gagnaient en début de saison qui perdent aujourd’hui. On ne perd pas en raison des gardiens, on perd parce qu’on ne marque pas assez de buts, parce qu’on commet trop d’erreurs et qu’on accorde des buts à de très mauvais moments », a plaidé Dale Weise.

À l’aube de la traditionnelle fin de semaine du Super Bowl, fin de semaine au cours de laquelle le Canadien recevra Connor McDavid et les Oilers samedi avant de recevoir les Hurricanes de la Caroline dimanche, je me demande comment les joueurs du Canadien, le directeur général Marc Bergevin et surtout le propriétaire Geoff Molson encaisseront le commentaire de Michel Therrien à l’effet qu’il sera très difficile de faire les séries.

Remarquez que l’entraîneur-chef n’a fait que confirmer ce que bien des observateurs, des amateurs et même des partisans désabusés du Canadien avancent depuis un bon moment déjà.

Il est toutefois clair qu’à la lumière de cette remarque, la direction de l’équipe devra profiter du congé d’aujourd’hui pour dresser un plan en vue des prochaines semaines.

Car à moins que le Canadien ait décidé de plonger tête première jusqu’au bas du classement afin de maximiser ses chances d’obtenir le premier choix au repêchage en juin prochain, il semble impossible que la direction puisse accepter que l’équipe abandonne trois semaines avant la date limite des transactions et avec encore 30 matchs à disputer.

Du moins je l’espère. Sans quoi les deux derniers mois de la saison seront plus misérables encore que les deux que le Canadien vient de traverser. Et on peut écrire sans risque d’exagérer qu’ils ont été pas mal misérables merci!

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