Pas de plan de retraite pour Carey Price
BROSSARD – Parfois, Carey Price repense au petit garçon qu'il était lorsqu'il rêvait, vers 8 ans, à la LNH. Dans son imaginaire d'enfant, tout était possible même s'il habitait dans un lointain territoire autochtone à Anahim Lake. Aujourd'hui, à peine âgé de 35 ans, son corps en arrache, mais il paierait ce même prix demain matin s'il devait recommencer cette fabuleuse, mais éprouvante aventure.
« Les gardiens sont meilleurs que jamais et c'est le cas en raison de la manière dont la position se joue désormais. C'est un milieu très compétitif, tout le monde veut jouer dans la LNH. Pas un jeune ne voudrait pas effectuer des sacrifices pour être ici. C'est le prix à payer, je l'ai fait et je le referais encore. Mais ce sera difficile et tu ne peux pas embellir la réalité », a lancé Price, lundi, avec une conviction évidente.
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Pour ceux qui n'ont pas regardé cet extrait, Price parlait avec ses tripes comme il le fait rarement devant les médias. Ça faisait près de six mois que Price n'avait pas rencontré les journalistes et on a senti toute sa passion particulièrement dans cette réponse.
Sans être un gardien, c'est plus difficile de comprendre le poids que cette profession impose sur le physique. Cette réalité a augmenté de plusieurs niveaux avec le calibre très compétitif du hockey moderne. Le jeu se joue avec une telle rapidité et des habiletés si élevées que le gardien ne dispose d'aucun répit.
Mais pour vous donner une idée, même les gardiens qui passent leur « carrière » dans une ligue amicale finissent souvent avec le corps amoché. Alors ne pensez pas que les pépins physiques de Price ont démarré avec l'incident de Chris Kreider.
« Tout a commencé quand j'avais environ 8 ans..., a évoqué Price ne pouvant qu'en rire. C'est une position exigeante pour le corps surtout quand tu arrives dans la trentaine. J'ai également eu des enjeux aux chevilles et au dos. Tu ne t'en remets pas, ça provient de l'accumulation. »
Puisque non, Price n'est pas rétabli malgré les experts consultés. À ce sujet, le scénario qui lui a été proposé ne l'enchante guère et on peut le comprendre.
« L'idée est de prendre un bouchon de cartilage et d'os dans une portion de mon genou pour aller combler le trou qui existe dans la partie amochée de mon genou. C'est une intervention plutôt intrusive avec un taux succès légèrement supérieur à 50 %. Mais ça veut aussi dire qu'il y a entre 30 à 50 % de probabilités que ça ne fonctionne pas. Si je devais absolument le faire pour avoir une meilleure vie, je pourrais le considérer. Mais je regarde mes enfants et je veux pouvoir jouer avec eux, c'est la chose la plus importante », a-t-il exposé.
« Je ne suis pas si chaud à l'idée. À mon avis, c'est une opération risquée pour ma qualité de vie après et ça m'inquiète un peu », a ajouté le numéro 31.
Alors Price ne peut qu'aborder la suite ainsi.
« Je n'ai pas de plan pour me retirer présentement, il faudra prendre les choses une étape à la fois. Mon but est de ne plus ressentir de douleur au quotidien. C'est encore douloureux dans les marches ou pour transporter mes enfants en haut des escaliers », a décrit le gardien.
Après 712 parties régulières dans la LNH, près d'une centaine en séries, une présence en finale de la Coupe Stanley, difficile de ne pas ressentir d'amertume dans un rôle de spectateur.
« C'est frustrant, aucun doute. Tu passes de jouer en finale à être assis ici en si peu de temps, je n'avais pas prévu me retrouver dans cette position. Ce fut des montagnes russes émotives. Mais j'ai ma femme, mes enfants et ma famille qui me supportent. De plus, toutes les interactions avec les partisans depuis un an ont été très positives, j'en suis vraiment reconnaissant », a admis le cinquième choix du repêchage de 2005.
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Dans un tel contexte, voilà pourquoi la touchante ovation déployée lors du match d'ouverture, il y a une dizaine de jours, était la bienvenue.
« Un immense sentiment de reconnaissance, ça m'a fait chaud au cœur », a confié Price qui parlait avec une belle candeur.
Mais l'idée d'avoir joué son dernier match avec le Canadien n'a pas encore fait son chemin.
« C'est quelque chose à digérer, je ne l'ai pas encore fait entièrement. Je garde un petit espoir qu'un miracle pourrait se produire. J'ai toujours été plus un optimiste, je n'ai surtout pas abandonné l'idée de gagner une coupe peu importe la position dans laquelle ça surviendrait. Je me concentre donc sur le positif. Les enfants et ma femme me procurent ça. Je suis très chanceux et je garde ça en tête », a raconté Price qui a blagué en disant qu'il ne détesterait pas revenir comme ailier afin de pouvoir décocher quelques rondelles à la tête de certains gardiens.
Fidèle à ses racines depuis le premier jour
Price a sonné nostalgique en parlant de ses trois enfants et surtout de sa plus grande, Liv, qui réalise davantage ce qui se passe.
« Liv, surtout, s'ennuiera du fait que j'aille la saluer pendant la période d'échauffement. C'était notre petit rituel, ça va lui manquer », a dit Price qui pouvait d'ailleurs compter sur Liv, sa jeune assistante personnelle, samedi, au match des Alouettes, pour lui donner de petits ballons à autographier pour les partisans.
Price est heureux de pouvoir faire partie de la routine quotidienne de ses enfants et il se promet de rester dans l'entourage du Tricolore cette année.
« Je ne veux pas être là tous les jours et utiliser les ressources médicales pendant qu'eux jouent les matchs. Mais ce dont les gars s'ennuient le plus quand ils arrêtent, c'est de rigoler avec les autres. »
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Viendra un jour où Price pourra mieux réaliser l'ampleur de ses exploits sur la patinoire.
« Je ne pense pas vraiment à l'héritage que je vais laisser, je songe toujours à ce que je veux accomplir ensuite. Je ne me vois pas le faire avant la retraite. J'aimerais surtout que les gens se rappellent de moi comme un grand travaillant et une bonne personne », a-t-il évoqué.
Les partisans se souviendront également d'un athlète avec une personnalité unique. Price n'était pas le gardien ou le joueur de hockey typique. Ce qui le rend fier, c'est notamment d'être demeuré fidèles à ses valeurs jusqu'à ce jour.
Il y a quelques semaines, d'anciens coéquipiers nous racontaient, à titre d'exemple, qu'ils étaient persuadés que Price laisserait son chapeau de cowboy de côté pour s'adapter au monde de la LNH.
« Je n'ai jamais voulu oublier d'où je viens, j'en suis très fier et j'ai toujours été conscient de ça. J'ai été élevé dans une famille avec beaucoup d'amour et je suis très fier de mes proches », a exprimé le gardien.
Price se considère privilégié d'avoir vécu tant de belles expériences à Montréal.
« Je n'en reviens pas à quel point le temps a passé vite. La LNH est meilleure que jamais et je suis donc juste très envieux des jeunes qui arrivent, ils sont très chanceux d'être ici », a-t-il conclu avec son côté compétitif.
Dans les prochains mois, Price a l'intention de s'impliquer davantage dans la communauté via les initiatives organisées par le CH.
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