MONTRÉAL - Encore un brin ébloui et deux brins étourdi par les deux buts marqués en 91 secondes dans les derniers instants de la troisième période pour transformer ce qui s’annonçait comme une victoire inattendue, mais ô combien bienvenue, du Canadien en véritable cauchemar pour le Tricolore, ses joueurs et leurs partisans, Pat Maroon a lancé cette grande vérité du hockey après le match :

 

« Les bonnes équipes trouvent souvent un moyen pour gagner », que le gros attaquant du Lightning a lancé avec un petit sourire en coin.

 

Auteur du premier but du match – en passant Pat Maroon revendique autant de buts jusqu’ici cette saison (6) que Nick Suzuki qui est le meilleur buteur du Tricolore – Maroon a ensuite pris une grande respiration avant de poursuivre sa réponse.

 

Comme plusieurs partisans du Canadien qui venaient d’encaisser le grand revirement de situation tel un grand coup de masse reçu en plein front, j’ai cru que Maroon poursuivrait sa réponse en lançant que les mauvaises équipes de hockey inventent souvent de nouvelles façons de perdre.

 

Non seulement il s’est bien gardé de le faire, mais il a reconnu que le Canadien avait disputé un solide match de hockey.

 

Ce qui est vrai.

 

Je sais! Le Canadien est un mauvais club de hockey. Un mauvais club qui, en plus, est amputé chaque jour davantage de ses meilleurs éléments – ou de ceux qui devraient l’être – en raison des blessures.

 

Mais mardi soir, au grand plaisir d’une foule qui semblait avoir retrouvé du plaisir à l’encourager, le Canadien disputait un bon match de hockey jusqu’à ce que la meilleure des deux équipes trouve une manière de gagner.

 

Jusqu’à ce que la moins bonne des deux invente une nouvelle façon de perdre.

 

La foule a hurlé des « Go Habs Go! » après quelques arrêts solides de Jake Allen, dont deux aux dépens de Victor Hedman qui a, en plus, frappé un poteau sur un jeu qui aurait bien pu lui permettre de niveler les chances avant la débandade des dernières129 secondes.

 

Ça faisait changement des huées habituelles.

 

On a même eu droit à une vague lancée dans les hauteurs du Centre Bell. Une vague qui est partie du milieu de la glace et qui a pratiquement déferlé sur la moitié de l’enceinte.

 

Vous direz qu’on était encore loin des soirées festives au cours desquelles des vagues soulevées par une salle comble et qui faisaient plusieurs fois le tour du Centre Bell avant de s’apaiser. Je veux bien. Mais ça faisait un contraste avec le chandail tricolore et la casquette du Canadien « garrochés » sur la patinoire en guise de dépit, de dégoût et d’abandon de la semaine dernière.

 

Prêts à gagner au lieu d’être résignés à perdre

 

Pas question ici de vous dire que le Canadien arrivait à défendre sa place en grande finale l’été dernier avec une performance de rêve.

 

Ça non! Ce serait nettement exagéré.

 

Mais pour une rare fois cette année, les joueurs du Canadien étaient engagés, impliqués, motivés, prêts à essayer de gagner au lieu de sembler bêtement résignés à perdre.

 

Et c’est pour cette raison que cette 21e défaite en 27 matchs cette saison, cette 10e défaite en 14 matchs disputés au Centre Bell fait plus mal que toutes les autres.

 

Jake Allen été très solide devant la cage du Canadien. S’il a peut-être encore été le meilleur de son camp, il n’a pas été le seul joueur du Canadien à s’imposer.

 

Nick Suzuki a bien joué.

 

Alexander Romanov, qui s’ancre de plus en plus à la ligne bleue, a asséné de bonnes mises en échec. De vraies bonnes. Il a aussi bloqué des tirs, dont un très dur tir frappé lors d’un des trois désavantages numériques du Canadien. Trois désavantages que le Canadien a écoulés sans accorder de but parce que tous les joueurs sur la glace étaient impliqués.

 

Ben Chiarot et David Savard ont joué un grand match.

 

Mike Hoffman a fait ce qu’il sait faire de mieux. Il a marqué un beau but en décochant un tir aussi puissant et précis dont il a secret du haut des cercles après une mise en jeu gagnée par Suzuki en zone ennemie (le but a depuis été accordé à Jonathan Drouin plutôt que Hoffman, NDLR). Il a aussi affiché une belle présence d’esprit et un bon synchronisme en orchestrant une sortie de zone avec ses patins après que son bâton se soit brisé alors qu’il s’apprêtait à toucher la rondelle en zone défensive.

 

Pas mal pour un gars qui ne sait pas jouer au hockey... Je l’écris avant que vous me l’écriviez!

 

Même Artturi Lehkonen doit être louangé malgré le fait qu’il a raté une occasion en or à la porte de buts et une autre au terme d’une échappée. Un but de Lehkonen, juste un, aurait changé l’allure du match. Il aurait peut-être même confirmé la victoire.

 

Mais si on peut constater – ça saute aux yeux – à quel point Lehkonen bousille des occasions de marquer en séries, il est crucial de lui reconnaître la grande qualité de savoir les créer. C’est déjà ça...

 

Lehkonen aurait pu confirmer la victoire avec un but sur ses deux occasions ratées. C’est vrai.

 

Mais Jonathan Drouin et Mike Hoffman aurait pu sceller l’issue du match s’ils avaient été un brin plus chanceux ou deux brins plus concentrés sur une séquence en fin de match qui aurait pu, et dû, permettre à Drouin de marquer dans un filet désert.

 

Drouin a jonglé avec la rondelle après réception d’une passe de Hoffman. Cela l’a fait mal paraître parce qu’il a aussitôt été rattrapé et n’a pas pu profiter du fait que Vasilevskiy avait été rappelé au banc à la faveur d’un sixième attaquant pour marquer.

 

Hoffman doit prendre une part du blâme lui aussi. Alors qu’il a tout le temps au monde pour bien diriger sa passe vers Drouin, Hoffman précipite son geste en se retournant. Avec les résultats qu’on connaît.

 

En bousillant ce jeu, le Canadien a fait sa part dans le cadre de la défaite qu’il a encaissée.

 

Mais ça n’enlève rien au mérite du Lightning d’avoir fait la sienne dans la victoire.

 

Steven Stamkos a réalisé une belle passe pour permettre à Corey Perry de niveler les chances dans les secondes qui ont suivi le but vide raté par Drouin. Et une fois le Canadien sur les talons après ce but de leur ancien coéquipier, le Québécois Alex Killorn et son coéquipier Ondrej Palat ont profité de la panique qui s’emparait du Tricolore pour marquer le but qui lui coupait les jambes.

 

Bon! Ceux et celles qui ont déjà le nez sur la dernière place du classement général et les probabilités les plus élevées de gagner la prochaine loto-repêchage seront contents. Ou moins déçus. Mais les partisans qui avaient retrouvé un brin de plaisir à venir assister à un match au Centre Bell et les joueurs du Canadien qui leur ont offert un bon spectacle méritaient une récompense.

 

Le fait d’être passé si près d’une victoire et de ne pas même avoir reçu un 4e point de consolation dans le cadre d’un revers encaissé en prolongation ou tirs de barrage ne fait pas contrepoids à la déception de tout un chacun.

 

Savard vs Perry 

 

Survolté après avoir reçu la bague commémorant sa conquête de la coupe Stanley et récompensant le rôle qu’il a joué dans cette grande épopée, David Savard a profité de son premier match contre son ancienne équipe pour disputer l’un de ses meilleurs matchs de la saison dans l’uniforme du Canadien. Peut-être même son meilleur.

 

C’est toutefois Corey Perry, qui croisait lui aussi le club avec qui il a terminé la dernière saison, qui a eu le dernier mot avec son but égalisateur en fin de match qui a pavé la voie à celui de la victoire 91 secondes plus tard.

 

Perry a marqué son 6e but de la saison mardi: son troisième au cours des deux derniers matchs. Limité à une passe au fil de ses 16 premières parties dans l’uniforme des « Bolts » Perry a récolté neuf points (trois buts) à ses neuf derniers matchs.

 

« Sa contribution au succès de l’équipe est inestimable et dépasse largement sa production », a lancé Jon Cooper après la rencontre.

 

« Corey Perry a un pedigree qui oblige tous les joueurs de l’organisation à la respecter. Quand il entre dans le vestiaire, on sent sa présence. Il a perdu les deux dernières finales de la coupe Stanley contre nous. Ce n’est pas évident. Depuis son arrivée, il imite ce que tous les joueurs que Julien (BriseBois) est allé chercher au fil des deux dernières saisons ont fait pour nous. Il s’intègre facilement à l’équipe. Il contribue au succès du club », a poursuivi Cooper.

 

« Corey est une voix imposante dans le vestiaire. On a perdu des joueurs importants l’été dernier. Il fallait en trouver un aussi important. Corey est mon meilleur ami hors de la patinoire. On a joué ensemble à Anaheim. Je me suis assuré de lui faire comprendre qu’une place l’attendait à Tampa. Après avoir perdu deux fois en finale contre nous, il a compris », a expliqué en riant Pat Maroon qui a aussi tenté de faire croire que ses talents de passeurs avaient également joué un rôle dans la décision de son chum.

 

Ce que personne n’a cru...

 

S’il a rendu hommage à Perry et à l’adaptation de son nouveau vétéran, Jon Cooper a tenu à dresser un parallèle avec David Savard.

 

« David a joué un rôle important dans notre conquête de l’été dernier. Oui nous avions un groupe de défenseurs solides. Mais David cadrait bien dans notre système. On lui a donné des tas de grosses minutes à remplir et il l’a fait. Savie n’a pas été avec nous très longtemps – il a été acquis à la date limite des transactions – mais on a vu aujourd’hui à quel point il a laissé sa marque. Nous lui avons donné sa bague de la coupe Stanley autour de 17 h. Bien que cette rencontre se déroulait en plein milieu des routines habituelles de nos joueurs dans leurs préparations de match, ils étaient tous présents pour partager ce moment avec lui. C’est une indication qui ne ment pas », a mentionné Cooper.

 

À moins qu’il ne soit échangé, David Savard n’aura pas la chance de soulever la coupe Stanley cette année. Il pourra toujours se consoler en regardant scintiller sa grosse bague de la coupe Stanley.

 

Dans le cas de Perry, chaque victoire du Lightning le rapproche d’une place en séries et c’est peut-être cette année qu’il se retrouvera du bon côté de la patinoire lorsque la coupe sera soulevée.

 

Entre les lignes

 

  • Kale Clague n’a rien cassé lors de son premier match dans l’uniforme du Canadien. Acquis samedi après qu’il eut été soumis au ballottage par les Kings de Los Angeles, le défenseur s’est rendu coupable de trois revirements dont le premier, très coûteux, s’est transformé en passe parfaite dans l’enclave dont Pat Maroon a hérité pour aussitôt déjouer Jake Allen et marquer le premier but du match...

 

  • Le Canadien a accordé le premier but du match pour la 17e fois en 27 matchs cette saison. Il n’a gagné que deux fois – contre Detroit (6-1) le 23 octobre et Calgary (4-2) le 11 novembre – lors de ces 17 parties (2-14-1)...

 

  • Le Canadien n’affiche qu’un gain jusqu’ici cette saison (1-5-3) dans le cadre des matchs au cours desquels il a perdu une avance d’un but...

 

  • Le Canadien a encaissé un 7e revers cette année (1-4-3) dans le cadre des matchs où il s’est retrouvé à égalité 2-2 avec un adversaire...

 

  • MarcAndré Fleury a raté l’occasion de signer sa 500e victoire en carrière mardi soir. S’il obtient le départ jeudi soir, « Flower » pourrait réaliser cet exploit près de la maison alors que les Hawks feront escale au Centre Bell. Le gardien de Sorel affiche un dossier de 33-18-9 en carrière contre le Canadien. Il a signé contre le Tricolore un seul des 68 jeux blancs qu’il a multipliés au fil des ans...