Générosité coûteuse
MONTRÉAL - Martin St-Louis avait raison de se dire satisfait de la performance de son équipe en dépit du revers de 4-3 encaissé, jeudi soir, en prolongation aux mains de Kirill Kaprisov et du Wild au Minnesota.
L'entraîneur-chef du Canadien avait tout autant raison de louanger « l'attitude » affichée par sa troupe.
Après tout, Nick Suzuki qui a disputé son meilleur match depuis un sapré bout de temps, l'un de ses meilleurs de la saison, et David Savard ont permis au Tricolore d'effacer un recul de 0-2 après une première période difficile.
Juraj Slafkovsky, en bataillant devant le filet, a redirigé une rondelle derrière le gardien Filip Gustavsson pour niveler les chances 3-3 en fin de troisième période.
Son capitaine, en plus d'avoir marqué et d'avoir ajouté une passe plus tôt dans le match, a contribué à envoyer le match en prolongation en plongeant devant un tir de Brock Faber avec six secondes à faire au dernier tiers. Un plongeon efficace, courageux et ô combien nécessaire, car à ce moment, le Wild, fort d'une attaque massive, bourdonnait dangereusement autour de la cage de Samuel Montembeault.
Je l'ai écrit plus haut, Suzuki a assumé pleinement son rôle de leader au sein de son équipe et de son trio jeudi soir. C'est lui qui a traîné ses ailiers au lieu d'être traîné par Slafkovsky au cours des dernières rencontres. C'est lui qui a donné le ton. Comme il doit le faire à toutes les rencontres.
Il n'a pas l'obligation de résultat. J'en conviens. Mais à titre de capitaine et de meilleur joueur de son équipe, Suzuki à une obligation de moyen. Il doit être le leader qu'il a été face au Wild au moins trois matchs sur cinq, et non un de temps en temps.
À la gauche de Suzuki et Slafkovsky, Cole Caufield a connu un autre match difficile. Avec une passe récoltée sur le but de David Savard, quatre tirs cadrés sur les sept qu'il a décochés tout ça en 24 présences totalisant 22 min 27 s d'utilisation, les statistiques indiquent qu'il a disputé un fort match.
Pas question ici de prétendre que Caufield a été mauvais. Mais au lieu de foncer dans la zone payante pour maximiser la dangerosité de ses tirs, Caufield a passé le match à tourner en zone ennemie le long des bandes.
Il me semble que St-Louis lui demande d'aller à l'intérieur. Ce que Suzuki et Slafkovsky ont fait sur les buts qu'ils ont marqués.
Bons mots, ton sec!
Cela dit, si les mots choisis par Martin St-Louis étaient positifs, le ton avec lequel l'entraîneur-chef les défilait l'était moins. C'est du moins l'impression qu'il donnait alors que ses phrases étaient courtes et même tranchantes. Le ton parfois sec laissait même poindre un peu d'impatience de la part du coach.
Ce ne peut pas juste être parce qu'il avait hâte de quitter St.Paul. Parce qu'il tenait à disputer le plus vite possible le match de ce soir, à Chicago contre les Blackhawks, afin d'être certain de ne pas rater la visite du père Noël.
Surtout qu'au-delà le fait que son équipe a affiché «la bonne attitude» en se repliant les manches pour combler des reculs de deux et un but – ce qui faisait changement avec les pertes d'avance dont son club s'est rendu coupable au fil des derniers matchs – Saint-Louis avait facilement le droit d'être en furie pour quelques raisons.
À commencer par la générosité affichée sur les deux premiers buts accordés au Wild.
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Bien défendre avant d'attaquer
Sur le premier, un autre accordé en désavantage numérique, Joel Armia et Mike Matheson protègent très mal la zone défensive.
Armia, qui se devait de remplacer Johnathan Kovacevic en poursuite de Marco Rossi qui l'a traîné jusqu'à la ligne bleue, a complètement oublié Matt Boldy derrière lui.
Non seulement l'a-t-il oublié, mais quand on regarde la reprise avec attention, on réalise qu'Armia, croyant que Kovacevic et Evans venu lui prêter main forte sont sur le point d'enlever le disque à Rossi, donne un coup de patin vers la zone ennemie afin de profiter d'une éventuelle échappée.
Non seulement a-t-il mal lu le jeu, mais une fois déporté vers l'avant en plus d'être très mal positionné dans sa zone, il est incapable de contrer la passe acheminée vers le joueur qu'il doit surveiller. Il est encore moins en mesure de nuire à Boldy qui a eu tout le temps au monde et tout l'espace voulu pour décocher un tir que Samuel Montembeault n'a jamais pu stopper.
Matheson, lui? Il marque en couverture homme-à-homme Joel Eriksson Ek. Ce qui est loin d'être une mauvaise idée considérant l'efficacité de ce gros joueur de centre.
Mais Matheson se sort carrément du jeu en suivant Ek jusque dans le coin de la patinoire. Le vétéran défenseur aurait été – peut-être? – en mesure de sauver les fesses d'Armia et d'aider la cause de son gardien s'il était demeuré dans l'enclave.
Mais bon!
La reprise démontre aussi que Matheson, comme Armia, se lance vers l'avant quand il flaire, par gourmandise, un revirement qui n'est jamais venu.
Peut-être que les joueurs du Canadien sont invités à être agressifs en zone défensive lorsqu'ils évoluent à court d'un homme.
Il n'y a rien de mal à ça. Au contraire.
Mais comme le Canadien est 28e dans la LNH avec une piètre efficacité à court d'un homme (31 buts accordés en 114 occasions = 72,8 %) il serait sage de s'assurer de bien protéger sa zone avant de songer à conquérir celle de l'ennemi.
Trop de pénalités
Il serait plus sage encore de cesser d'être généreux en multipliant les pénalités mineures accordées.
Jeudi, au Minnesota, le Canadien a offert six attaques massives au Wild. Il s'est fait poivrer deux buts. Ça mine des chances de victoire un brin ou deux.
Surtout quand ton attaque massive – qui a donné un but jeudi – frappe seulement pour 18,1 % comme celle du Tricolore.
Les efficacités combinées du Canadien en attaque massive (18,1 5) et en désavantages numériques (72,8 %) totalisent 90,9 %. Loin, très loin, trop loin du seuil minimum de respectabilité qui est de 100 %.
Le Canadien est 28e dans la LNH avec ses 114 attaques massives offertes à ses adversaires. Martin St-Louis a plusieurs fois pointé du doigt l'indiscipline de ses joueurs depuis qu'il est débarqué derrière le banc du Canadien.
Il ne l'a pas fait jeudi. Je croyais même qu'il allait offrir quelques commentaires laissant poindre une quelconque insatisfaction à l'endroit des arbitres. Ce qui n'a pas fait. Mais peut-être que le ton sec avait quelque chose à voir avec cette générosité qui a coûté au moins un point à son équipe encore jeudi.
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Evans spectateur
Parlant de générosité, je peine encore à comprendre celle affichée par Jake Evans sur le deuxième but du Wild.
Evans est un patineur rapide. Il est un joueur combatif. Le genre de gars qui doit se démener sur la patinoire – et qui se démène – pour maximiser son temps d'utilisation à titre de centre de quatrième trio. Et il le fait la plupart du temps.
Il est donc difficile à comprendre et impossible à accepter qu'il se soit contenté de se laisser glisser derrière Marco Rossi en repli défensif comme il l'a fait sur le deuxième but. Evans avait le temps et encore plus l'obligation de nuire à Marco Rossi sur ce jeu. Avec juste un brin de combativité, il aurait même pu l'empêcher de tirer.
Il s'est contenté de le garder marquer.
Et comme il s'est fait poivrer (1-9) aux cercles des mises en jeu, qu'il n'a pas obtenu le moindre point, qu'il s'est contenté de décocher un petit tir qui a raté la cible, qu'il n'a rien bloqué, qu'il n'a pas volé de rondelle, Evans n'avait pas le droit de se transformer en spectateur sur le jeu.
Un rôle qui a contribué au différentiel de moins-2 associé à son nom sur la feuille de pointage.
2500 $ d'amende pour Heineman
J'aimerais avoir de belle chose à dire du premier match d'Emil Heineman avec le Canadien. Mais je peux difficilement le faire.
Pas parce qu'il a mal joué. Mais bien parce qu'il n'a pas assez joué. En dix présences d'une durée moyenne de 35 secondes, le Suédois n'a pas vraiment pu se faire justice.
Cela dit, les joueurs de quatrième trio ont l'obligation de maximiser le peu de temps d'utilisation qu'ils obtiennent. C'est ingrat, j'en conviens.
Mais en combinant le travail de Mitchell Stephens, de Jesse Ylonen et d'Emil Heineman, le quatrième trio a donné au Canadien un seul tir – au moins Ylonen a atteint la cible – et deux mises en échec : une chacune pour Mitchell et Heineman.
C'est tout? Oui c'est tout!
Ce n'est pas beaucoup. Et en jouant aussi peu, il n'est certainement pas évident pour Ylonen d'être efficace lorsqu'il est envoyé sur la patinoire en deuxième vague d'attaque massive.
Mais ça, c'est une autre histoire.
Le seul fait saillant du premier match d'Emil Heineman sera son tour de patinoire en solitaire en début de période d'échauffement. Ce qui est maintenant un rituel pour les joueurs disputant un premier match en carrière dans la LNH.
Parce qu'il a fait son tour d'honneur sans casque protecteur, Heineman recevra, en prime, une amende de 2500 $ de la LNH.
Depuis le début de la saison 2020, tous les nouveaux joueurs arrivant dans la LNH doivent porter le casque lors des périodes d'échauffement, laissant à quelques vétérans la possibilité de mousser les risques de blessures en patinant les cheveux au vent alors que les rondelles volent aux quatre coins de la patinoire.
Peut-être qu'Emil Heineman aura la chance de mettre plus que ses cheveux blonds en évidence s'il obtient un deuxième match consécutif en remplacement de Michael Pezzetta au sein du quatrième trio, vendredi soir, à Chicago où le Tricolore complétera la première portion de son traditionnel voyage (de sept matchs) des Fêtes.