BROSSARD, Québec – Pas plus fou qu’un autre, Bokondji Imama est arrivé au camp de perfectionnement du Canadien avec la même intention que tout le monde : faire bonne impression devant l’état-major d’une équipe de la Ligue nationale.  

Mais il y a aussi vu une occasion de répondre à ses propres interrogations.

Imama est un homme fort assumé. Conscient de ses limites, il sait bien qu’il ne peut rivaliser d’adresse avec les surdoués de son âge. Mais dans un contexte hostile aux mises en échec et où les combats sont interdits, le jeune vétéran du Drakkar de Baie-Comeau voulait faire l’étalage d’un éventail d’atouts que ses statistiques ne laissent pas encore deviner.

« C’est beau être fort, être le plus imposant, savoir se battre. Mais le but demeure de gagner le match et pour ça, tu as besoin de douze attaquants. Si tu ne fais que te battre, il arrivera un moment où ça ne vaudra pas la peine. La chance que j’avais en venant ici, c’était de montrer ce que je suis capable de faire comme joueur de hockey », expose celui qui a jeté les gants onze fois et passé plus de cent minutes au cachot à sa deuxième saison dans la LHJMQ.

« Des fois, comme bagarreur, tu te poses des questions. Après sept batailles en ligne, quand ton temps de jeu est limité, il arrive que tu te demandes si tu es capable de faire autre chose, admet-il sans filtre. Mais en me présentant ici, je pouvais montrer ce que j’ai dans le ventre et prouver au monde que je suis un joueur comme les autres, seulement avec un aspect plus costaud. »

En ce sens, Imama considère qu’il peut officiellement apposer un sceau de validation sur le travail qu’il a accompli cette semaine.

« Je crois avoir fait deux bons matchs, estimait-il après la première moitié des parties simulées prévues à l’horaire du camp. C’est sûr que je demeure un joueur robuste. Je ne suis pas celui qui va marquer 50 buts par saison. Par contre, j’ai des habiletés et je crois l’avoir démontré. »

« Je pense que j’ai quand même un bon coup de patin pour un gars de ma taille. On m’a dit que j’étais probablement l’un des joueurs les plus rapides avec le Drakkar. Ce que je devrai améliorer dans mon jeu, ce sont plutôt les petits détails défensifs qui feraient en sorte de m’apporter un peu plus de temps de glace. »

Mais le sympathique colosse de 17 ans ne s’éloignera jamais trop loin du style qui lui a jusqu’ici permis de défricher son chemin.

Bokondji Imama« À Baie-Comeau, personne ne m’a jamais demandé de me battre. J’ai simplement réalisé que j’étais celui qui était le mieux placé pour le faire. Je pense que ça aurait été un peu bizarre qu’un gars de quatrième trio, avec un physique comme le mien, ne prenne pas cette responsabilité. J’ai aussi compris que si je voulais jouer plus haut, je n’avais pas le choix de faire ressortir cet aspect de mon jeu. Des gars avec mon talent, il y en a des milliers... »

Le hockey avant le football

« Boko », comme il préfère qu’on le surnomme, est né de parents congolais dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce de Montréal. Son père, en plus de lui léguer un prénom, lui a fait cadeau de son amour du sport.

« C’est lui l’athlète de la famille. L’hiver, je jouais au hockey et l’été, je pratiquais trois sports en même temps : le soccer, le baseball et le football. J’ai même un peu joué au basket. »

À 14 ans, Imama a été confronté à un choix difficile. Devant l’impossibilité de combiner deux programmes de Sport-études, le jeune porteur de ballon a accroché ses crampons pour chausser les patins à temps plein.

« Le football, c’est un sport discret. Je ne me faisais pas lancer beaucoup de fleurs, mais dès que j’ai lâché, j’ai entendu dire que plusieurs équipes avaient un œil sur moi. On me voyait comme un beau projet, apparemment, mais je ne l’ai jamais su. Aujourd’hui, je ne regrette rien. »

Imama a disputé une saison au niveau Midget AAA, avec le Royal Rousseau de Laval-Montréal. Le Drakkar en a fait un choix de quatrième ronde en 2012 et il est parvenu à se tailler une place avec l’équipe dès l’âge de 16 ans. En 44 matchs, il a récolté six points et 34 minutes de pénalité.

 « Ma première année à Baie-Comeau en a été une d’apprentissage. Que je joue ou non, ça ne changeait rien pour moi. Je prenais des notes pour mon année de 17 ans. C’est donc l’an dernier que j’ai réellement pris ma place dans l’équipe. »

Revenu dans la métropole avec le sentiment du devoir accompli, Imama a quitté la Côte-Nord avec l’impression que l’entraîneur Éric Veilleux était prêt à lui confier davantage de responsabilités la saison prochaine. Ignoré au plus récent repêchage de la LNH, il ne perd pas espoir d’attirer l’attention en vue du prochain encan, mais n’a pas l’intention d’en faire le point central de sa campagne.    

« Cette année, j’ai commencé à penser au repêchage quand on a perdu en finale contre Val-d’Or. J’y serai encore admissible l’an prochain, mais je ne veux pas baser mon année là-dessus. »