NEW YORK - Le Canadien est dans le gros trouble. À une défaite de l’élimination. À un revers des vacances. Et s’il se retrouve en aussi fâcheuse position, le Tricolore n’a que lui-même à blâmer. Misérable en première moitié de partie jeudi, le Tricolore n’a pas été meilleur en première moitié de rencontre dimanche. Au risque d’être lapidé une fois encore de critiques, j’irais même jusqu’à prétendre que le Canadien a été pire que jeudi.

Mais contrairement à jeudi, il n’a pu compter sur les arrêts de Dustin Tokarski pour gagner. Déjoué trois fois, dont la dernière en prolongation par Martin St-Louis, Tokarski a encaissé un revers de 3-2.

Mardi, au Centre Bell, il fera donc face à l’élimination pour la troisième fois depuis le début des séries. S’il a évité le pire à deux reprises contre les Bruins, le Canadien aura fort à faire maintenant qu’il accuse un recul de 1-3 face aux Rangers. Des Rangers qui forment, et de loin, la meilleure équipe depuis le début de cette série. Des Rangers qui auraient facilement pu, voire dû, gagner jeudi et qui ont finalement été récompensé dimanche alors que la prolongation a permis à la meilleure équipe de l’emporter. Car oui, c’est la meilleure équipe qui a gagné dimanche.

Le Canadien ne méritait pas de gagner dimanche. Il ne méritait pas même que cette partie ne se décide en prolongation.

Le Tricolore a bousillé une, deux, trois attaques massives en première période, se permettant même d’accorder un but au cours de son deuxième avantage numérique.

Il a bousillé deux autres attaques massives en deuxième avant de profiter de son sixième avantage numérique pour enfin toucher le fond du filet. C’était son premier but en 15 supériorités numériques depuis le début de cette série.

Mais voilà !

Au lieu de bâtir sur cet éveil tardif, le Canadien a bousillé une autre chance en début de troisième. Oui, oui ! Encore en avantage numérique. Histoire d’ajouter l’injure à l’insulte, le Canadien a ensuite littéralement «scrapé» une autre attaque massive en prolongation.

Vous avez perdu le compte ? Le voici. Un but en huit attaques massives. Un but, ce n’est vraiment pas assez. Pis encore, le Canadien s’est contenté de huit bien petits tirs lors des ces huit attaques massives.

Et ce n’est pas parce que les Rangers ont multiplié les tirs bloqués devant leur gardien Henrik Lundqvist. Car en tout et partout, les Rangers ont bloqué 17 tirs et 10 autres décochés par le Canadien ont raté la cible.

Qu’est-ce que ces deux statistiques révèlent ? Que le Canadien n’a jamais été fichu de s’installer en zone des Rangers pendant sept de ses huit attaques massives. Qu’il a raté des entrées en zone offensive. Qu’il a mal fait circuler la rondelle. Et même lorsqu’il s’est mis à simplement tirer la rondelle dans le fond du territoire des Blue Shirts afin de profiter de l’avantage d’un homme pour d’aller cueillir la rondelle, ce sont les Rangers qui la récupéraient les premiers et qui l’a dégageaient aussitôt.

Les uns après les autres, tous les trios envoyés par Michel Therrien lors de ces attaques massives n’ont rien généré. N’ont pas menacé. Malgré leur passivité évidente, Thomas Vanek – deuxième attaquant le plus utilisé avec 7:01 en avantage numérique, 12 secondes de moins que David Desharnais et 28 secondes de plus que Max Pacioretty – et Rene Bourque (5:38) ont obtenu des chances de se reprendre. Par moment, on se demandait pourquoi Michel Therrien s’entêtait à faire appel à eux plutôt que de faire signe aux Tomas Plekanec (1:28), Alex Galchenyuk (1:38), Lars Eller (12 secondes), Michael Bournival (32 secondes), voire Dale Weise (00 :00) qui auraient difficilement pu faire pire.

Mais bon !

À la ligne bleue, Alexei Emelin qui jongle avec la rondelle comme s’il avait au bout du bâton une grenade dégoupillée a aussi obtenu du temps loin d’être mérité avec l’avantage d’un homme.

Cela dit, avec le temps passé par P.K. Subban – 12 minutes 51 s d’utilisation sur les 14 minutes 33 s obtenues par le Canadien – et Andrei Markov (10 :33) il fallait leur offrir du répit de temps en temps. Mais Francis Bouillon, voire Josh Gorges, n’auraient certainement pu faire pire qu’Emelin qui, même en y mettant toutes ses énergies, ne pourrait pas disputer un plus mauvais match que celui qu’il a disputé dimanche.

Encore une fois outrageusement dominé par les Rangers, le Canadien était loin d’être dans le coup dimanche. Mais toutes les pénalités décernées aux Rangers – des pénalités méritées qui n’offrent pas aux Rangers le droit de se plaindre du travail des arbitres – ont faussé la donne et le Canadien n’a pas été foutu d’en profiter.

Indulgent à l’endroit de Tokarski 

Après avoir flotté au-dessus de la mêlée avec sa victoire de jeudi et durant les deux jours qui ont suivi, Dustin Tokarski et tous ceux qui étaient prêts à faire de lui le prochain gardien d’impact à faire le saut dans la LNH ont été ramené sur la terre ferme hier.

Pas question de blâmer le jeune gardien pour la défaite. Ça non ! Car sans lui, il n’y aurait pas eu de match une fois encore tant ses coéquipiers ont manqué de générosité devant lui le laissant sur à lui-même bien trop souvent. Tokarski s’est permis des arrêts solides sur les 26 qu’il a réalisés au cours du match. Il s’est même permis un autre vol – avec la mitaine – aux dépens de Martin St-Louis et un arrêt très solide de la jambière aux dépens de Derick Brassard pour ne relever que ceux-là.

Mais sur le premier but – une longue échappée offerte au rapide Carl Hagelin pendant que le Canadien évoluait à cinq contre quatre – Tokarski s’est montré généreux en offrant une ouverture béante entre ses jambes sur la première feinte du rapide joueur des Rangers.

Sur le deuxième but, encore sur une échappée généreusement offerte par la défensive, Tokarski n’y pouvait rien alors que Brassard – qui effectuait un retour au jeu après avoir été blessé lors de sa deuxième présence dès le premier match – l’a déjoué avec un puissant tir frappé.

Sur le but de la défaite, Tokarski a cédé sur le côté rapproché ce qui n’est jamais bon. Agenouillé encore un brin ou deux trop vite, il a offert la lucarne à Martin St-Louis. Bon ! Après avoir été volé trois fois plutôt qu’une par Tokarski du côté de la mitaine, tout le monde croyait que St-Louis changerait de cible. Eh bien non. Avec un tir puissant et précis, il s’est vengé à son tour.

Faible Tokarski sur ce but et sur le premier ?

Non ! Mais si Carey Price avait accordé ces deux buts, il faudrait les classer sans la catégorie des vilains buts ou encore des arrêts qu’un gardien de son statut aurait dû réaliser.

Ces deux buts ont donc rappelé des points importants dans l’analyse des performances de Tokarski. Le petit gars – car il est vraiment petit à 5’ 11’’ – sort tout juste de la Ligue américaine. Il n’a pas le gabarit et surtout l’expérience pour l’aider à se dresser devant des joueurs de la LNH, surtout s’ils sont invités à se rendre jusqu’à lui par des défenseurs qui ne font rien, ou n’en font pas assez, pour aider la cause de leur jeune gardien.

Henrik Lundqvist a été généreux hier sur le but de Francis Bouillon. Ça arrive donc aux meilleurs de la Ligue nationale. Mais il a su se reprendre et ses coéquipiers devant lui l’ont bien mieux appuyé que les joueurs du Canadien ont appuyé Tokarski.

Tenez : sur le but gagnant de St-Louis on pourra souligner tant qu’on voudra le fait que Tokarski s’est fait déjouer sur le côté court. Et c’est vrai. Mais il est impératif de souligner que dans les secondes qui ont précédé ce tir de St-Louis – complètement oublié à la gauche du gardien du Canadien en passant – David Desharnais a raté une sortie de zone ; Alexei Emelin en a raté deux et il a placé Andrei Markov dans le gros pétrin le long de la bande sur le flanc droit alors qu’il avait deux Rangers sur le dos. Markov s’y est pris par une fois, par deux et presque trois avant de perdre la rondelle qui s’est vite retrouvé sur la lame du bâton de St-Louis et plus vite encore dans le but.

Parce qu’il est le dernier rempart, le gardien est souvent, trop souvent, facilement identifié comme coupable s’il se montre un brin généreux, laissant les autres coupables – et souvent bien plus coupables que lui – se rendre au banc heureux d’échapper aux critiques.

C’est en plein ce qui s’est passé sur le but de la victoire… ou de la défaite selon que vous soyez partisans des Rangers ou du Canadien.

Quand un jeune arrive de la Ligue américaine pour aider son équipe à sortir de la finale d’association et obtenir une place en finale de la coupe Stanley, il doit obtenir l’appui de l’équipe qui joue devant lui.

Cet appui, Tokarski ne l’a pas eu dimanche. Il ne l’a pas eu jeudi non plus. Il ne l’a pas encore eu depuis qu’il est venu en relève à Carey Price dans le deuxième match de cette série. Et s’il ne l’obtient pas mardi, le Canadien sera vite éliminé.