Marc Bergevin s’est adressé aux médias pour faire le bilan de la première moitié de saison chez les Canadiens de Montréal dimanche. C’était une surprise pour moi de l'entendre aller aussi loin dans ses propos dans l’affaire entourant Jonathan Drouin, mais j’ai trouvé que c’était un point de presse mené avec plus d’humilité que d’habitude. Il a avoué que le plan de trouver un joueur qui distribue bien la rondelle et qui a un potentiel offensif très élevé pour évoluer avec Max Pacioretty n’a pas marché. En théorie, c’était bien, mais en pratique, ce l’était moins. J’ai apprécié le fait qu’on n’a pas essayé de raconter des mensonges en disant que ça va venir... Non, ça ne marche tout simplement pas.

Ce qui me déçoit le plus dans la transaction, ce n’est pas d’être allé chercher Drouin. Le kid est bon, il a le potentiel d’être un joueur étoile dans la LNH. C’est juste qu’on a sacrifié notre meilleur espoir en Mikhail Sergachev pour aller chercher quelqu'un qu’on espérait transformer en joueur de centre. Le meilleur atout qu’on avait pour aller chercher un vrai centre, on l’a perdu et on n’a tout de même pas réglé notre problème. Drouin a une énorme pression sur les épaules. La Ligue nationale, ce n’est pas une place pour apprendre à devenir un centre no 1, et surtout pas à Montréal. Tu peux apprendre à devenir un joueur de centre, mais pas sur le premier trio. Dans une équipe qui va moins bien, c’est une pression énorme et une tâche difficile à accomplir.

Le point de presse de Marc Bergevin

Je crois qu’il est temps de piler sur son orgueil et de donner une autre chance à Alex Galchenyuk. Je sais que ce n’est pas la chose idéale, mais il faut permettre à Drouin de prendre de l’air un peu. Je pense qu’il a la tête en dessous de l’eau : il n’a pas de production offensive, il commence à être frustré et il commence à perdre confiance. Je sais que Galchenyuk a des lacunes et je ne suis pas son plus fidèle partisan au centre, mais à un moment donné, à ce que je sache, il a quand même été parmi les 10 meilleurs marqueurs de la ligue la saison dernière avant sa blessure au mois de décembre 2017. Tout ça, il l’a accompli au centre. Il faut laisser Drouin respirer un peu et donner une autre chance à Galchenyuk de montrer ce qu’il a gagné en maturité et comment il s’est développé. Présentement, on semble juste s’entêter. Comme si on n’avait tellement pas confiance ou qu’on a tellement pas apprécié ce que Galchenyuk a fait qu’on ne veut même pas lui donner la chance de se reprendre.

Outre Pacioretty ou le cas Drouin, Karl Alzner est également une déception. Comme il l’a dit hier, il est le premier à reconnaître qu’il n’a pas une saison à la hauteur de ses attentes personnelles. On s’attendait à un défenseur beaucoup plus fiable, beaucoup plus solide. Il connaît une période d’adaptation qui se fait difficilement depuis le début de l’année et qui s’étire. Pour l’avoir vu jouer ailleurs, je sais qu’il est capable de faire mieux que présentement et je pense que ça va venir, mais on avait besoin de lui dès le départ vu qu’on avait perdu nos trois premiers défenseurs gauchers durant l’été. Il avait de grands souliers à chausser dans ce rôle et à mes yeux il n’a pas réussi.

Drouin au centre ou à l'aile? Bergevin a relancé le débat

Dans le cas de Galchenyuk, pour toutes sortes de raisons la production offensive est aussi une déception. Bref, tous les joueurs sur qui on s’appuie offensivement sont une déception. On peut penser à Jeff Petry même s’il a bien répondu par moment quand Shea Weber s’est maintenu à l’écart de la formation. En bout de ligne, on place des joueurs dans des positions peu favorables présentement par manque d’effectif. On manque de joueurs de talent, on manque de défenseurs gauchers, un défenseur no 2, un centre no 1… Sans oublier qu’on n’a pas vu Carey Price qui s’est remis d’une blessure. Il y a trop d’éléments qui font en sorte que l’équipe se trouve dans cette position actuellement.  

Les insuccès peuvent s’expliquer de plusieurs manières. Ce serait difficile de blâmer ça simplement sur un manque de constance comme Bergevin a mentionné. C’est sûr qu’il manque de talent et d’effectif. C’est évident depuis le camp d’entraînement, quand tu es obligé de mettre Victor Mete, âgé de 19 ans seulement, à gauche de Weber. En partant, on voyait que c’était problématique. Cela dit, je ne veux rien enlever à Mete, il a eu un excellent camp et un excellent début de saison au-delà des attentes qu’on pourrait avoir envers un jeune de 19 ans. Ça reste que ce n’est pas la position dans laquelle tu veux placer un jeune comme lui.

Il y a des joueurs qui doivent prendre leurs responsabilités. C’est bien de répondre aux attentes, mais quand tu es un grand joueur ou un leader, il faut aussi les dépasser. Mis à part Brendan Gallagher qui a surpassé ce qu’on pouvait attendre de lui, peu peuvent prétendre la même chose.

Les joueurs d’avenir… quel avenir?

Si on espère relancer l’organisation, ce n’est pas en regardant la banque de jeunes qu’on trouvera la solution. Il n’y en a déjà pas beaucoup d’avenir prometteur d’après moi. On avait un bon espoir en Sergachev et il est parti. Maintenant, on tombe dans une deuxième couche d’espoirs de premier plan quand on pense à un Charlie Lindgren ou à Ryan Poehling, notre dernier premier choix au repêchage. Je ne vois pas qui que ce soit qui a une grande valeur et qui va nous apporter un centre no 1 ou un défenseur no 2.

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Il va donc falloir prendre des décisions qui vont nous faire mal au cœur, soit se départir d’un joueur de notre noyau, peu importe de qui il s’agit. C’est comme ça qu’il faut faire pour mieux s’outiller à nouveau, mais c’est un processus qui va prendre du temps et de la patience. Ça prendra aussi un peu de chance au repêchage, ce dont on n’a pas beaucoup bénéficié au cours des huit ou neuf derniers encans. On peut dire qu’il y a eu quelques bons coups des recruteurs, mais quand on se compare, on en a moins en banque que plusieurs autres organisations. C’est problématique, on n’a pas de relève qui ne coûte pas cher, des jeunes à leur premier contrat qui peuvent s’intégrer progressivement au grand club une année après l’autre, qui sont capables de jouer un rôle intéressant, et ce, tout en étant capables de suivre le rythme face aux meilleures équipes.

Pour moi, le projet de faire les séries, c’est terminé. Par contre, affirmer qu'on garde espoir est le message que tous doivent véhiculer, pour ne pas que les joueurs lâchent. Il reste une certaine fierté, tu joues soit pour ton prochain contrat ou pour faire partie de la solution à moyen terme. Tu veux démontrer que tu as l’équipe à cœur et que tu veux garder ta place l’année prochaine. Il y a trop d’équipes à surpasser, on est à sept points d’une place qualificative. En plus, le CH passera presque une semaine sans jouer et l’écart risque de se creuser encore un peu plus. Pour moi, mathématiquement c’est possible, mais j’ai vécu trop souvent cette situation, et je suis assez humble et posé pour dire que c’est une montagne quasi insurmontable. À moins d’un miracle, mais je ne sais pas si on a les éléments nécessaires pour réaliser un miracle.

*Propos recueillis par Audrey Roy