J'aurai mis un certain temps avant d'écrire mon premier texte de la saison, mais cette fois les circonstances ne me permettent pas de passer à côté de l'occasion. Certes il y a eu

les classements de gardiens et les analyses. Il y aura aussi les statistiques avancées. Mais un vrai texte, du coeur, ceux qui sont thérapeutiques aussi. Pas vraiment par manque d'inspiration, assurément pas par paresse, peut-être pour ne pas répéter ce qui a déjà été publié, probablement pour attendre le bon moment afin de demeurer pertinent.

Je ne connaissais pas personnellement M. Gilles Tremblay, mais j'aurais aimé. Avec tout ce que j'ai lu et entendu sur lui lors des 24 dernières heures, encore plus. Je ne l'ai rencontré officiellement qu'une seule fois. C'était dans le salon Jacques-Beauchamp du Centre Bell, avant un match. Pierre Houde s'est occupé des présentations, et tel qu'annoncé il était sympathique, chaleureux. La conversation a été courte. Mais je m'en souviendrai à jamais. «En passant, tu fais du bon travail. »C'est sur ces mots qu'il l'a conclue. Venant de celui qui a pavé la voie dans le domaine pour tous les athlètes francophones, comment ne pas se souvenirdu compliment.

À l'ère des réseaux sociaux, de l'information en continu et de la nécessité de l'instantanéité, il s'agissait du compliment suprême venant du seul homme qui pouvait avoir un tel impact en le prononçant.

Passer de la patinoire à la passerelle sans période de transition avec les standards élevés de Radio-Canada aux côtés de M. René Lecavalier n'était pas une mince tâche. Je ne l'ai pas entendu à ses débuts, mais d'avoir fait fi des difficultés pour se retrousser les manches et travailler d'arrache-pied pour s'améliorer ne me surprend pas d'un ancien joueur qui avait le coeur gros comme le Forum. J'ai grandi avec ses analyses. J'ai compris le travail «le long de la clôture », je craignais, comme gardien, les attaquants «droitiers qui rentraient à gauche afin d'améliorer leur angle de tir »et j'admirais les joueurs «d'expérience ».

Bien des choses ont changé en télédiffusion des matchs de hockey, mais quelques-unes demeurent : la rigueur est d'ordre, la passion se ressent et le travail est récompensé. M. Tremblay l'avait bien compris et il nous a obligé tous un chacun, qui tente, jour après jour, de suivre ses traces, à se préparer adéquatement. Par son humilité et son respect de l'auditoire, il nous force aujourd'hui à nous dépasser pour améliorer notre offre chaque soir. Il prenait son travail au sérieux mais ne se croyait jamais au-dessus de la mêlée.

M. Tremblay n'a jamais officiellement passé le flambeau à qui que ce soit et de toute façon, je ne suis pas certain qu'un de nous, ayant joué et faisant ce travail aujourd'hui, eut été assez grand pour pouvoir le prendre de sa main.

Je n'aurai jamais la prétention d'accomplir mon travail comme lui, mais j'aurai toujours l'intention de le faire. Je ne porte pas le flambeau, je n'en suis pas digne, mais demain, quand j'analyserai le match entre les Canadiens et les Sabres, il y aura un peu de M. Tremblay avec moi.

À sa famille et ses proches amis, mes plus sincères sympathies.