CHICAGO - Le gros coup tant attendu, le grand coup tant espéré, n’est donc pas venu.

Du moins, il n’est pas venu du côté de Montréal où le Canadien, malgré mille et une rumeurs, s’est sagement contenté de sa sélection en première ronde pour mettre la main sur Ryan Poehling. Américain, âgé de 18 ans, Poehling est un gros joueur de centre « bon dans les deux sens de la patinoire ».

Est-ce qu’il sera bon un jour? Peut-être. Peut-être pas. Seul le temps le dira.

Comme seul le temps nous dira si le Canadien a eu la main heureuse où il se sera trompé avec les cinq jeunes qu’il sélectionnera samedi : deux en deuxième ronde; deux autres en troisième ronde; et un en cinquième ronde. Les autres choix? Celui de 4e ronde est allé à Dallas dans la transaction qui a amené Jordie Benn à Montréal. Celui de 6e ronde a suivi Jonathan Racine à Tampa en retour de Nikita Nesterov. Celui de 7e ronde est à Winnipeg, qui a donné son choix de 7e ronde l’an dernier au Canadien qui en avait profité pour repêcher Arvid Henrikson.

Le repêchage est important. Il est crucial même. C’est le repêchage qui multiplie les munitions dont un club a besoin pour composer avec les nouvelles réalités économiques du hockey. Avec la nouvelle réalité point.

Mais le repêchage, aussi productif soit-il, ne réglera rien à court terme. En fait, il ne réglera pas tout. Il ne réglera pas ce que le Canadien a besoin de régler pour composer avec la progression certaine des Maple Leafs de Toronto, au fait que les Sénateurs d’Ottawa semblent mieux nantis que lui, que Steven Stamkos sera de retour à Tampa Bay, que les Panthers de la Floride seront sans l’ombre d’un doute bien meilleurs après leur saison misérable de l’an dernier, que les Bruins... seront toujours les Bruins.

Les besoins sont immédiats. Et s’ils ne sont pas comblés, le Canadien, malgré Carey Price, malgré Shea Weber, malgré Max Pacioretty et oui, malgré Jonathan Drouin pourrait avoir de la difficulté à se tailler une place en séries l’an prochain.

Comme tout le monde, je suis convaincu que Drouin donnera un nouveau souffle à l’attaque du Tricolore, mais on l’a dit et écrit plusieurs fois, le petit gars ne comblera pas toutes les lacunes à lui seul.

Peut-il être le premier centre dont le Canadien a cruellement besoin?

Poehling n'a pas été surpris d'être choisi par le CH

En point de presse à Chicago vendredi avant le repêchage, Claude Julien a dit qu’il était prêt à le faire jouer au centre et à le laisser jouer d’une manière offensive. Tout ça est bien beau. Et une fois encore, j’insiste sur le grand talent de Drouin, sur ses mains, sa vitesse et sa vision et je repose la même question : peut-il vraiment être le premier centre dont le Canadien a tant besoin?

Encore une fois, le temps nous dictera la réponse.

Mais le Canadien n’a plus le temps de simplement faire confiance au temps. Il a besoin de souffler dans le dos du temps. Il a besoin de bouger. Il a besoin de continuer à bouger, car on ne pourra jamais reprocher à Marc Bergevin de ne pas bouger. Mais il faudra plus que David Schlemko – il devrait s’installer au sein du troisième duo de défenseurs du Tricolore l’an prochain – pour secouer le temps.

Beaucoup d’action loin de Montréal

Si le Canadien est demeuré sage vendredi, plusieurs de ses rivaux ont bougé. Ils ont pris des chances.

Les Coyotes de l’Arizona, qui manque cruellement de tout, à commencer par des contrats pour se rendre au plancher salarial, par un gardien de premier plan et par un parrain à la ligne bleue, ont comblé quelques lacunes.

Derek Stepan – assis sur un contrôle ridicule qui gruge 6,5 millions $ sous le plafond jusqu’en 2021 – permet aux Coyotes de gaspiller des millions et de renflouer un brin l’attaque. Antti Raanta donnera aux Coyotes leur gardien numéro un. C’est dommage pour Louis Domingue, mais son patron le DG John Chayka a indiqué vendredi que le poste était non seulement comblé par Raanta, mais que le gardien québécois avait besoin de retrouver tous ses moyens pour assurer sa place au sein de son équipe.

ContentId(3.1236261):Repêchage LNH : un résumé de la 1re ronde
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Les Rangers, qui se sont libérés du contrat de Stepan et qui dépenseront peut-être ce magot pour surpayer Kevin Shattenkirk, en plus de donner Raanta ont obtenu le jeune défenseur Anthony DeAngelo et le premier choix des Coyotes vendredi soir (7e sélection).

Les Coyotes ne sont pas arrêtés là. Ils ont acquis Niklas Hjalmarsson des Blackhawks qui avaient besoin de se donner un peu de place sous le plafond salarial et qui ont aussi l’intention de se donner un peu plus de caractère. J’aime beaucoup Hjalmarsson. Je trouve d’ailleurs que les Hawks jettent leurs choux gras en laissant partir ce défenseur qui joue dans l’ombre de Keith et Seabrook et qui ne reçoit pas assez de reconnaissance pour ce qu’il fait à Chicago. Qu’il faisait...

Les Hawks ne se sont pas arrêtés là eux non plus : ils ont corrigé une erreur du passé – une erreur nécessaire pour composer avec leurs ennuis financiers – en rapatriant Brandon Saad.

Ok! Les Hawks ont donné beaucoup en cédant Artemi Panarin – deux autres joueurs et deux choix s’ajoutent – aux Blue Jackets. Mais avec la perte de Marian Hossa pour les raisons médicales que l’ont connaît, les Hawks retrouvent en Saad un joueur plus complet que l’excellent marqueur qu’est Panarin.

Arizona a bougé, New York aussi, tout comme Chicago et voilà qu’en soirée les Blues de St Louis ont eux aussi bougé.

Ils ont donné Ryan Reaves – du poids, des poings et aussi des points il faut le dire – aux Penguins qui cherchaient muscles et caractère pour protéger leurs deux coupes Stanley. Pittsburgh a donné sa 31e sélection au repêchage d’hier en a obtenu la 51e des Blues aujourd’hui.

Les Blues avaient déjà acquis Brayden Schenn des Flyers de Philadelphie en cédant Jori Lehtera et deux choix de première ronde (2017 et 2018).

Cette transaction a fait sursauter les fans du Canadien qui auraient bien aimé voir Schenn à Montréal.

Je les comprends. Schenn est un joueur attrayant. Il est rarement blessé et a marqué 26 et 25 buts et ajouté 33 et 30 passes à ses deux dernières saisons. Il peut jouer au centre aussi.

Ma première impression est que les Blues ont donné beaucoup en cédant deux choix de première ronde. Ce que le Canadien aurait refusé net de donner.

Mais quand on y regarde bien, les Blues ont donné un premier choix pour se départir du contrat de Lehtera (4,7 millions $ sous le plafond pour les deux prochaines années) et un autre pour mettre la main sur Schenn.

Ça rend la transaction plus intéressante. Et là on peut vraiment se demander si le Canadien n’aurait pas dû entrer dans la danse pour mettre la main sur un gars comme Schenn qui aurait aidé dès l’an prochain le Tricolore.

Bon : Schenn n’est pas Wayne Simmonds. On va s’entendre là-dessus. Mais il aurait quand même certainement aidé le Canadien. Est-ce que Bergevin aurait nécessairement dû imiter les Flyers et éponger le contrat de Lehtera? Je ne sais pas.

Mais les Blues ont acquis un joueur qui aurait aidé le Canadien.

Galchenyuk, Radulov, Markov

Pendant ce temps, l’incertitude persiste autour d’Alex Galchenyuk, Andrei Markov et Alexander Radulov en ce qui a trait à leur avenir à Montréal.

Le premier est sur le marché des échanges. S’il faut en croire les rumeurs, il est offert au plus offrant à tous les clubs de la LNH. En plus, il apprécierait un changement d’air.

Tout ça est bien beau, mais le Canadien ne reçoit pas de grandes offres pour Galchenyuk. Et si je suis convaincu que les fans du Canadien surévaluent la valeur de Galchenyuk en réclamant deux joueurs importants en retour, il n’en demeure pas moins que le Tricolore doit être prudent avec lui.

Tu ne donnes pas un gars qui peut venir te hanter avec des saisons de 30 buts sans avoir une bonne compensation en retour.

Mais voilà, s’il est sur le marché et que ça fait son affaire, comment Galchenyuk réagira s’il doit jouer à reculons à Montréal l’an prochain et qu’en plus il est contraint de signer un contrat à court terme alors qu’il visait la lune et les millions $.

Pas évident.

Surtout que le commentaire de l’entraîneur-chef Claude Julien à l’effet que « pour l’instant » Galchenyuk faisait partie de son équipe ne laisse entrevoir rien de bon sur son avenir à Montréal.

Radulov?

Avec T.J. Oshie qui a reçu huit ans et 46 millions $ des Capitals de Washington, Alexander Radulov devient l’attaquant tout en haut de la liste des joueurs autonomes intéressants.

Les Caps ont été généreux sur les années pour garder Oshie qui aura 39 ans à la fin de son contrat. Sera-t-il encore capable de jouer à 39 ans? On verra. Mais le surplus d’années consenti a fait baisser sa moyenne salariale à 5,75 millions $.

Cette moyenne serait très correcte dans le cadre d’un contrat offert à Radulov. Mais pour trois ans, peut-être quatre, et non pour huit comme l’ont fait les Caps.

L’ennui pour le Canadien, et il est de taille, c’est que des clubs se rendront sans l’ombre d’un doute à six ans le 1er juillet.

Aussi bien dire que Radu est parti de Montréal.

Et voilà que le Canadien semble aussi réticent à garder Andrei Markov au salaire de l’an dernier. Bon 5,75 millions $, c’est peut-être un brin trop, mais j’irais à 5 millions $ sans problème pour celui qui a été le meilleur allié de Shea Weber l’an dernier.

Le « on verra » de Marc Bergevin en marge des négociations avec Markov me fait peur. Car à moins que Bergevin ait des plans qu’il garde bien secrets, je ne vois pas comment le Canadien pourrait se passer de Markov l’an prochain.

Si Radulov s’en va et que Markov le suit au marché des joueurs autonomes, si Galchenyuk est échangé lui aussi, il faudra bien plus que le repêchage pour faire du Canadien un club capable de se battre pour une place en séries.

C’est pour cette raison que je m’attendais à beaucoup d’action de la part du Canadien à Chicago en fin de semaine. Je suis convaincu que Marc Bergevin travaille. Qu’il travaille très fort. Qu’il négocie ici. Qu’il le fasse aussi là-bas!

Mais pour le moment, moi, vous, tous les partisans de son équipe attendons encore.

Et le temps pourrait finir par manquer...