Therrien doit apprivoiser Subban
Canadiens jeudi, 23 janv. 2014. 20:34 vendredi, 13 déc. 2024. 17:51Depuis que sa place est assurée au sein de l’équipe qui représentera le Canada aux Jeux de Sotchi, P.K. Subban n’affiche pas vraiment des statistiques olympiennes.
En six matchs, il n’a amassé que deux points et accuse un gênant différentiel de -7. Mercredi contre les Penguins de Pittsburgh, il a écopé de deux mauvaises pénalités, dont une qui a mené à un but de Sidney Crosby.
Le lendemain, Subban est arrivé en retard à l’entraînement en raison d’une rencontre qui s’est étirée avec le directeur général Marc Bergevin. La nature de l’entretien ne sera probablement jamais divulguée publiquement, mais dans le contexte de la période difficile que traverse présentement l’équipe, je crois qu’on peut déduire que le rendement et/ou le comportement du flamboyant défenseur ne fait pas l’affaire des dirigeants du Canadien présentement.
Plus Subban évolue sous nos yeux et plus il devient clair que pour s’installer avec stabilité dans un climat gagnant à Montréal, l’entraîneur du Canadien devra trouver une façon de devenir le plus grand allié de son fougueux quart-arrière. Si Michel Therrien ne trouve pas une façon d’être chum avec P.K., il ne gardera pas son poste longtemps. Ce n’est pas compliqué.
Therrien doit traiter Subban comme il a traité Sidney Crosby à l’époque où il dirigeait les Penguins. Il n’a pas le choix! C’est lui son king et il va perdre son job s’il n’est pas capable de le faire. C’est son rôle. D’ailleurs, lors de son embauche, il nous avait promis qu’il avait pris de l’expérience et qu’il était meilleur que jamais pour diriger les jeunes joueurs.
Maintenant, il doit le prouver.
Je ne dis pas que Therrien doit donner des passe-droits à son défenseur étoile, mais plutôt qu’il est de son devoir de trouver une façon d’être assez proche de lui pour pouvoir lui faire comprendre le bon sens sans avoir à lui donner une tape sur les doigts. Parce que si tu le punis, tout le monde va le savoir et ça va faire une grosse histoire, le genre d’histoire qui n’est jamais bonne pour une équipe.
À son âge et avec toute l’expérience qu’il a acquise dans la Ligue nationale, Therrien est rendu à une étape de sa carrière où il doit réaliser qu’il est temps pour lui de passer par-dessus son orgueil pour aider son protégé à atteindre un autre niveau. Subban n’a pas atteint le niveau de Crosby, mais Therrien doit être assez rusé pour lui faire comprendre qu’il est capable de l’y emmener.
Ce rapprochement ne doit pas se faire sous le signe de la confrontation, mais de la collaboration. C’est présentement le plus grand défi du coach.
En mode panique?
Mais Therrien a aussi d’autres chats à fouetter que l’agile félin qui patrouille sa ligne bleue.
Je n’ai jamais vu autant de changements de trios que j’en ai observés depuis le début de la saison à Montréal et je suis convaincu que c’est une réalité qui doit agacer terriblement le groupe d’attaquants. Dans la majorité des clubs de la LNH, les entraîneurs ne changent pas aussi drastiquement les petites étiquettes aimantées sur le tableau de leur bureau. À moins d’une vague de blessures, il n’y a que les équipes en difficulté, celles qui passent leur temps à piger dans leurs réserves de la Ligue américaine, qui brassent autant leur alignement.
Ici, c’est pourtant la routine quotidienne. À part quelques duos qui sont demeurés intacts, personne n’évolue avec les mêmes compagnons de trios qu’en début de saison et ça, je pense que ça crée un climat d’incertitude au sein de l’équipe. En tout cas, ce n’est certainement pas comme ça que tu crées une chimie entre tes joueurs.
Je suis convaincu que Michel est d’accord avec ce point, mais présentement, ses décisions m’incitent à dire qu’il est en mode panique. À chaque jour, ses gars doivent arriver à l’aréna en se demandant quelle nouvelle surprise l’entraîneur leur réserve cette fois-ci.
Récemment, on a rappelé quelques jeunes de Hamilton, mais on ne les fait même pas jouer. Comment devrait-on interpréter cette décision? Louis Leblanc était bel et bien à Pittsburgh, mais on l’a à peine vu, même quand l’équipe perdait par quatre buts en troisième période. Pourquoi? Montrez-moi ce qu’il a dans le ventre, n’est-ce pas le temps idéal pour faire des expériences?
Mais non, on ne l’a pas fait. Personnellement, je pense que Michel sent la soupe chaude.
Le mot « congédiement » commence même à être lu et entendu de plus en plus fréquemment sur les différentes tribunes. Personnellement, je pense que ce serait une vraie farce si Marc Bergevin considérait cette option. Après tout ce qui a été dit lorsque Therrien a été ramené dans la grande famille du Canadien et de la façon dont les choses se déroulent depuis la fin de la saison dernière, je crois que le DG doit se sentir aussi concerné, sinon plus, que l’entraîneur par les insuccès du club.
Pour cette raison plus que n’importe quelle autre, je crois que le poste de l’entraîneur n’est pas en jeu. Du moins pas pour le moment. En fait, je crois que Bergevin devrait bouger rapidement afin d’épauler son complice et de solidifier sa poigne sur ses troupes.
Je ne parle pas d’amener un prétendu sauveur par le biais d’un échange, mais il y a des problèmes dans ce vestiaire et ils doivent être réglés. Je pense qu’il y a des gars qui doivent partir et parmi eux, Rene Bourque vient en tête de liste. Je sais que ça fait longtemps qu’on en parle, mais il est temps qu’il parte. C’est un gars qu’il faut constamment pousser dans le dos pour en soutirer le maximum et ça, c’est fatiguant pour un entraîneur.
Je crois aussi que tout le monde dans cette équipe a besoin de se parler dans le blanc des yeux. Ça se fait, ça! Il n’y a rien d’anormal à ce qu’une poignée de vétérans aille voir l’entraîneur pour jaser, pour offrir quelques recommandations. « Coach, on en a assez de tous les changements de trios... » Je me souviens qu’on l’a fait il y a quelques années à Ottawa. Les joueurs se sont rencontrés, on a résumé les conclusions à Paul MacLean et aussitôt, les effets bénéfiques ont suivi. Chez le Canadien, on a besoin d’un mouvement semblable pour unifier l’équipe.
Si j’étais le directeur général, je ne mettrais pas le leadership de mon entraîneur en doute. Au contraire, je ferais tout pour le renforcer. La fin de saison sera cruciale pour le Canadien et deux scénarios sont envisageables : on va monter ou on va descendre. Pour que le résultat soit positif, Bergevin doit s’interposer et agir comme le gars d’expérience qu’il est.
On l’a décrit comme un homme patient, ouvert, facile d’approche. Un homme avec un plan. C’est le temps de le montrer.
Un escadron cloué au sol
Le Canadien connait présentement de gros ennuis défensifs. À ses 19 derniers matchs, il a accordé 60 buts, une moyenne de 3,16 par rencontre. C’est beaucoup trop.
On peut bien blâmer le groupe de défenseurs, mais je pense que cette générosité découle d’un problème collectif. Parce que la brigade défensive n’est pas assez imposante et robuste pour gagner les batailles à un contre un le long des rampes, on doit demander aux attaquants – généralement aux joueurs de centre – de constamment créer des surnombres sur la rondelle dans leur territoire. Résultat : l’adversaire se retrouve inévitablement avec un joueur laissant surveillance.
C’est ce qui fait en sorte que le Canadien donne autant d’opportunités à l’adversaire.
Therrien doit demander à ses joueurs d’être plus agressifs sur le porteur du disque afin d’étouffer efficacement les élans adverses. C’est une commande exigeante qui peut rebuter les paresseux ou ceux qui ne seraient pas dans une assez bonne forme. Therrien disait il y a un mois que ses joueurs étaient fatigués. Ce n’est pas une bonne nouvelle, parce que je ne vois pas pourquoi on serait soudainement plus frais aujourd’hui!
Je crois aussi que le numéro 31 a camouflé bien des carences chez cette équipe depuis le début de la saison. Carey Price a mis un masque devant le vrai visage du Canadien et tant que le noyau de l’équipe sera le même, un gardien dominant sera son seul espoir.
Le Canadien est victime de son style de jeu et de sa composition. C’est une équipe bâtie pour voler, mais qui se fait présentement écraser avant même de pouvoir décoller.
*Propos recueillis par Nicolas Landry.