Il y avait beaucoup de questions justifiées avant que le Canadien se présente à son camp d’entraînement avec l’intention bien arrêtée de faire oublier une saison pour le moins misérable.

- Le genou de Carey Price, de qui dépend l’avenir de l’équipe, allait-il tenir le coup? L’entraîneur Stéphane Waite essayait-il de se faire rassurant durant la période estivale quand il affirmait haut et fort que son élève était rétabli à 100 %? Or, depuis son premier match, Price a fait clairement la démonstration que Waite ne mentait pas.

- Shea Weber allait-il pouvoir faire taire rapidement la grogne engendrée par le départ de P.K. Subban? Sans rien enlever à Subban, qui n’a surtout pas l’air d’un pied de céleri à Nashville, beaucoup de gens seraient aujourd’hui en désaccord avec Marc Bergevin s’il avait le pouvoir de faire marche arrière et d’effacer cette transaction. Même s’il a sacrifié un athlète étoile en Subban, Bergevin a peut-être réussi durant l’été ce qui sera considéré comme la plus grosse prise de sa carrière de directeur général.

- L’investissement de six millions de dollars sur Alexander Radulov en valait-il le coup? Ça semblait beaucoup d’argent pour un athlète énigmatique et controversé qui avait laissé une très mauvaise impression en abandonnant une carrière prometteuse dans la Ligue nationale pour se joindre à la peu rassurante KHL. Le risque avait été calculé avec prudence en vertu d’une entente d’un an seulement, mais on ne doute pas que Bergevin était aussi impatient que les partisans de connaître la réponse.

- Il existait également une certaine incertitude au sujet de Max Pacioretty. Était-il un marqueur de 30 ou de 40 buts? Allait-il pouvoir mieux justifier le C sur son chandail?

- Y avait-il des chances réalistes que Bergevin trouve preneur durant la saison pour Tomas Plekanec, surpayé et sur la pente descendante?

- Quelle chaise allait-on pouvoir attribuer à Andrew Shaw afin de l’aider à justifier l’énorme contrat qu’on lui avait accordé?

- Andreï Markov, qui a la réputation de se renfrogner quand les choses ne se passent pas comme il le désire, allait-il accepter sans bouder que son rôle soit diminué en raison de son âge et du temps de jeu important dont Weber allait profiter?

À l’approche du premier tiers du calendrier, toutes ces questions s’éliminent progressivement d’elles-mêmes. Price est toujours aussi agile. Weber s’est avéré toute une monnaie d’échange pour Subban. On peut sûrement se demander où se situerait le Canadien avec Subban, compte tenu de l’harmonie qui existe dans le vestiaire et qu’on a été incapable de créer quand il était là.

Pour sa part, Radulov livre la marchandise d’une façon spectaculaire. Même si ses statistiques font de lui le deuxième marqueur de l’équipe, elles ne disent pas tout sur sa réelle contribution à l’équipe. Radulov se lève quand ça compte. Il rend ses partenaires de trio meilleurs. Combien de joueurs de la ligue - même parmi les meilleurs - sont capables de battre un gardien comme il l’a fait en tirs de barrage dans le dernier match? Quel superbe talent!

Markov, de son côté, a été jusqu’ici tout ce qu’on attend de lui, c’est-à-dire un professionnel dans toute l’acceptation du terme, malgré le temps sacrifié en supériorité numérique et la perte de son statut au sein du premier duo de défenseurs. Shaw, lui, commence à peine à démontrer son utilité, même s’il n’en donnera jamais suffisamment pour pouvoir défendre le salaire qu’on lui a octroyé. Quant à Pacioretty et Plekanec, les réponses ne sont pas encore concluantes, surtout dans le cas du deuxième.

Néanmoins, malgré les facteurs les plus positifs, ceux de Price, Weber et Radulov, le Canadien n’est certainement pas à sa place au sommet du classement général de la ligue. Il n’a pas les ressources pour trôner à cet endroit. Seule une très grande constance de sa part pourrait lui permettre de s’accrocher au premier rang dans l’Est. Alex Galchenyuk vient de tomber au combat. Toute une tuile pour l’équipe qui s’est écroulée à pareille date, l’an dernier. On devrait donc pouvoir en savoir un peu plus sur le caractère supposément supérieur de l’équipe cette saison. Les meilleures formations, c’est bien connu, ne baissent pas les bras au premier coup dur.

À ceux qui rêvent d’une coupe Stanley, est-il nécessaire de rappeler que pour la gagner, il faut pouvoir battre quatre fois en finale les champions de l’Ouest, plus costauds et souvent mieux équilibrés. Essayons juste d’imaginer une série 4 de 7 contre les Sharks ou contre les Kings avec Jonathan Quick dans sa forme des beaux jours. Un avertissement sérieux vient d’être servi au Canadien durant ce voyage, car on doit uniquement à l’absence de Quick le fait que l’équipe n’a pas été lavée complètement en Californie.

Jacob qui?

Quand on analyse les ressources de l’organisation dans les circuits mineurs, on constate que ce n’est pas la mer à boire. L’un de ceux qui devraient être en train d’éclore est l’attaquant Jacob De La Rose qui ne va nulle part.

Quand De La Rose est venu donner ses premiers coups de patin au Centre Bell, la direction de l’équipe, qui reproche souvent aux médias d’exercer de la pression sur les jeunes qu’on est pressé de voir débarquer à Montréal (allo Guillaume Latendresse), a fait déferler sur lui un véritable concert d’éloges. Vraiment, les fleurs ont débordé du pot pour le deuxième choix de l’équipe en 2013. Je n’ai jamais vraiment compris pourquoi on a autant insisté pour nous le vendre.

Il ne serait pas étonnant d’apprendre éventuellement que le joueur suédois, bien servi par une solide charpente, a constitué une autre bévue au repêchage. Son cas rappelle celui d’un autre suédois, également réclamé en deuxième ronde en 2012, Sebastian Collberg. Cet ailier droit, nous a été présenté comme une valeur sûre. Pourtant, on s’en est vite débarrassé en le refilant aux Islanders dans la transaction pour Tomas Vanek, supposément parce que son développement ne progressait pas assez rapidement. Il aurait été plus simple d’avouer qu’il n’avait pas le talent requis pour être là. Collberg, qui n’a disputé aucun match avec les Islanders, joue actuellement chez lui, en Suède.

Quant à De La Rose, dont le problème semble se situer entre le coeur et la volonté, il n’a pas encore marqué à St. John’s cette saison. Il a cinq passes à son crédit. Dommage pour lui et le Canadien, car à six pieds, trois pouces et plus de 200 livres, il aurait pu être utile en ce moment. À sa troisième saison professionnelle, le moment n’aurait pu être mieux choisi pour frapper à la porte, mais ce gros joueur de centre semble être son plus grand ennemi.