MONTRÉAL - Comme tous ceux et celles qui peinent à imaginer le Canadien sans lui, je dois admettre que le départ de Carey Price vers Seattle aurait créé un grand vide à Montréal.

 

Un grand vide devant le filet c’est clair.

 

Mais un plus grand vide encore dans les discussions, les débats et les « gueguerres » aussi irrationnels qu’inutiles opposant ceux et celles qui vénèrent le gardien responsable de qui tout ce qui se passe de bien, de moins bien, de mauvais et de très mauvais autour du Canadien à ceux et celles qui le déteste et trouvent démesurément exagérée la place qu’il occupe au sein du club et de la masse salariale du Tricolore.

 

Bien que j’aie, au fil des ans, beaucoup plus défendu que critiqué Carey Price, bien que je fusse convaincu – et le suis toujours aujourd’hui – que le Canadien a pris la meilleure décision quand il a préféré Carey Price à Jaroslav Halak en 2010, je dois admettre candidement que je n’aurais pas crié au scandale si Price avait pris la direction de Seattle mercredi. Et encore moins réclamé que Marc Bergevin soit lapidé de critiques devant le Centre Bell comme plusieurs partisans s’apprêtaient à le faire.

 

J’aurais même vu d’un bon œil un tel départ même si le Tricolore n’avait rien obtenu en retour en guise de compensation pour la perte de son meilleur joueur. De sa pierre d’assise. De son joueur le mieux payé.

 

Car au-delà les vides béants que son exil vers l’autre bout de la planète hockey aurait créés devant le filet, sur les médias sociaux et les tribunes téléphoniques, le vide créé sous le plafond salarial aurait pu grandement profiter au Canadien.

 

Carey Price est encore un gardien exceptionnel. Un des meilleurs de la LNH. Il l’a prouvé au cours des séries éliminatoires alors qu’il a volé la première ronde des mains des Maple Leafs de Toronto avant d’être le meilleur joueur de son équipe en deuxième ronde, en finale de l’Ouest et ensuite en grande finale.

 

Un Carey Price pleinement reposé, en grande forme et en parfaite santé pourrait sans doute répéter les exploits des dernières séries au fil des prochaines années.

 

Mais Price sera-t-il à nouveau pleinement reposé, en grande forme et en parfaite santé? Aura-t-il devant lui l’équipe qui l’aidera à se rendre une fois encore en grande finale?

 

Le spectre que les blessures aux genoux et aux hanches qui le tenaillent depuis un bout de temps l’obligent à bientôt passer sous le bistouri et le forcent à rater le ou les premiers mois de la prochaine saison démontrent à quel point Price, aussi bon soit-il, commence à être usé.

 

Comme il l’a candidement reconnu il y a déjà deux ou trois ans, Carey Price parcourt maintenant le neuf de retour quand on dresse une analogie entre sa carrière amorcée avec son repêchage en 2005 et une ronde de golf. Et ça n’ira pas en s’améliorant. Le poids des saisons qui s’accumulent et des déplacements répétés vers la gauche et vers la droite, de ses chutes sur les genoux pour multiplier les arrêts ne feront qu’empirer les choses.

 

Les 10,5 millions $ qu’il empoche sur une masse salariale maximale de 81,5 millions $ coûtent déjà cher aux sens propre et figuré. En fait ils coûtent très cher. Dans un an ou deux, ils coûteront trop cher.

 

C’est pour cette raison très « business » que la présence de Carey Price au sein de la liste des joueurs offerts au Kraken par le Canadien et la possibilité qu’il soit réclamé ne m’a pas donné de l’urticaire.

 

Loin de là.

 

De fait, j’aurais beaucoup aimé voir comment, une fois Price en voie de déménager à Seattle, Marc Bergevin et ses adjoints de l’état-major auraient utilisé ces 10,5 millions $ soudainement disponibles pour améliorer l’équipe. Pour lui donner les outils nécessaires afin de mousser ses chances de soulever la coupe Stanley lors d’une éventuelle prochaine présence du Canadien en grande finale au lieu de la voir sillonner la patinoire au bout des bras de ses adversaires.

 

À cause de son 34e anniversaire de naissance qui s’en vient, à cause des blessures qui le minent et pourraient mettre en péril le début de sa prochaine saison, à cause surtout de la ponction de 10,5 millions $ en vigueur pour les cinq prochaines années dont il sera responsable sur une masse salariale qui stagnera autour des 81,5 millions $, je n’ai jamais cru que Ron Francis et le Kraken délogeraient Carey Price du trône qu’il occupe à Montréal pour lui offrir celui qui est disponible à Seattle.

 

Le repêchage d’expansion et surtout la philosophie qui a semblé guider Ron Francis dans ce processus, une philosophie qui lui offre une marge de 29 millions qu’il pourra maintenant utiliser pour améliorer son équipe qui en a besoin après plusieurs sélections timides, a donné raison à tous ceux et celles qui étaient convaincus que Price demeurerait à Montréal.

 

Oui Price, son épouse Angela et leurs belles petites filles auraient pu devenir des outils de marketing pour la nouvelle équipe de la LNH. Oui ils auraient attiré l’attention sur le Kraken. Incité des amateurs de sports qui n’y connaissent pas grand-chose ou très peu au hockey à sauter dans l’aventure du Kraken.

 

Mais le poids du contrat de Price aurait ralenti l’ascension de cette équipe qui n’aura peut-être pas l’impact immédiat des Golden Knights, mais qui devra offrir une progression constante au fil des premières années. Et pour progresser, il faut compter sur des bons jeunes, sur des choix au repêchage à la tonne – et éviter de les gaspiller – sur des vétérans beaux, bons et pas chers et sur des millions à dépenser lorsque des occasions se présentent. Mais pour dépenser ces millions $, il est primordial d’avoir de l’espace sous le plafond.

 

Ce que le Kraken a toujours.

 

Ce que le Canadien aurait eu si Price avait levé les voiles. Ce que le Tricolore n’a pas beaucoup maintenant qu’il est clair que le gardien sera ancré au port de Montréal pour le reste de sa carrière.

 

Plus j’y pense, plus je jongle avec les 10.5 millions $ que Price accaparera sous le plafond la saison prochaine et quatre qui suivront et plus je me dis que le Kraken aurait fait plus de bien que de mal au Tricolore en profitant du repêchage d’expansion pour mettre la main sur son gardien vedette.

 

Maintenant qu’il reste avec le club qui l’a hissé dans la LNH, Price devra retrouver sans santé et maintenir sa forme pour tenter de justifier le plus possible l’imposant salaire qu’il commande.

 

Un défi qui sera très difficile à relever. Un défi imposant même si Marc Bergevin lui avait offert la même équipe que celle qu’il a menée en finale de la coupe Stanley il y a quelques semaines. Un défi qui deviendra démesuré avec l’absence de Shea Weber, les départs de quelques joueurs clés et le manque de marge de manoeuvre sous le plafond pour aider à les remplacer.

 

Un défi qui assurera Carey Price d’être encore et toujours au centre de tous les débats et les « gueguerres » aussi irrationnels qu’inutiles opposant ceux et celles qui le vénèrent à ceux et celles qui le détestent et trouvent démesurément exagérée la place qu’il occupe au sein du club et de la masse salariale du Tricolore. Une place qu’il occupera encore longtemps.

 

Oublions Seth Jones

 

Si, comme moi, vous aviez identifié Seth Jones comme candidat numéro un du Canadien pour venir remplacer Shea Weber comme ancrage à la ligne bleue du Canadien, il semble que nous ayons raté la cible.

 

Jones est un défenseur exceptionnel. Il veut et va quitter Columbus. Mais si le Canadien arrivait à l’obtenir par le biais d’une transaction – ce qui coûterait très cher en joueurs, en espoirs et/ou en choix au repêchage offerts en guise de compensation pour convaincre les Blue Jackets – il semble acquis que le défenseur américain refuserait toute offre de contrat de la part du Tricolore.

 

Il semble acquis à Montréal comme dans tous les autres marchés canadiens que c’est au sud de la frontière que Seth Jones tient à évoluer.

 

Tant qu’à vider sa banque d’espoirs et de choix pour faire l’acquisition d’un joueur, aussi bon soit-il, qui ne passerait qu’une saison avec l’équipe, la direction du Tricolore aurait fait son deuil de Seth Jones.

 

C’est dommage…

 

Danault : ligne dure maintenue

 

Si la direction du Canadien est maintenant convaincue que Shea Weber ratera la saison 2021-2022 et peut-être même le reste de sa carrière en raison des blessures aussi nombreuses que sérieuses en dépit desquelles il évolue depuis quelques années, elle est tout aussi convaincue de maintenir la ligne dure avec Phillip Danault.

 

Le centre québécois qui a connu des séries éliminatoires exceptionnelles en muselant les meilleurs marqueurs des Leafs, des Jets et des Golden Knights avant de contenir ceux du Lightning en grande finale, n’a pas été protégé par le Canadien. Il profitera des prochains jours qui le mèneront à l’autonomie complète pour se laisser courtiser par tous les clubs de la LNH.

 

Est-ce que Danault recevra plus que les 30 millions $ sur six ans offerts par le Canadien l’automne dernier? Trente millions $ sur six ans qu’il a balayés du revers de la main.

 

C’est bien sûr ce qu’il souhaite.

 

Chez le Canadien, l’offre de l’an dernier n’est plus sur la table. Et elle ne reviendra pas. Selon ce que je comprends, il serait hors de question pour le Tricolore de dépasser le plateau des 5 millions $ annuellement. Et encore.

 

L’une des bases de comparaisons sur laquelle le Canadien s’accroche dans ce dossier s’appelle Adam Lowry. Le centre des Jets de Winnipeg, un gros bonhomme qui donne aux Jets ce que Danault offre en matière de jeu défensif, vient de signer un contrat de cinq ans d’une valeur de 16,25 millions $. Un contrat qui occupe donc 3,25 millions $ annuellement sur la masse salariale des Jets.

 

En plein le genre de contrat que le Canadien voudrait obtenir pour son troisième centre.

 

Tout ça est bien beau, mais Danault a plus de hockey à offrir que Lowry. Entouré de bons joueurs, il est capable de mousser leur production offensive comme il l’a fait il y a deux ans avec Tomas Tatar et Brendan Gallagher.

 

À Winnipeg, Lowry est précédé par deux solides joueurs de centre au sein des trios de tête. À Montréal, Danault a été surpassé par Nick Suzuki. C’est indéniable. Mais Jesperi Kotkaniemi est loin d’avoir prouvé sur une base régulière qu’il peut contraindre Phillip Danault à se contenter d’un rôle de troisième centre.

 

Sans oublier que derrière Danault, personne ne pourrait – ou pourra s’il quitte – le remplacer pour le moment dans son rôle défensif. Jake Evans n’est pas prêt et Ryan Poehling devra d’abord faire le saut de la Ligue américaine vers la LNH avant qu’on puisse être convaincu qu’il pourra un jour y arriver.

 

Autre facteur qui milite en faveur de Danault : le fait qu’il soit Québécois et francophone. Deux caractéristiques que bien peu – trop peu – de joueurs du Tricolore peuvent brandir pour justifier un petit extra dans le contrat le liant aux « Flying Frenchmen ».

 

Comme je l’ai dit et je l’ai écrit très souvent, il y a certainement un îlot quelque part sur lequel le Canadien et le clan Danault pourraient faire la paix.

 

Mais pour ça, il faudrait que le clan Danault tienne vraiment à demeurer à Montréal et à jouer au Canadien plutôt qu’à simplement miser le plus riche contrat possible, peu importe l’endroit où il l’obligera à s’installer.

 

Drouin : un retour avec le CH?

 

Parlant de Québécois francophone évoluant au sein du Canadien, on est toujours sans nouvelle officielle de Jonathan Drouin.

 

Il semble que l’ailier qui a quitté le Canadien en fin de saison régulière et n’a pas été revu depuis pour reprendre des forces physiques et mentales va mieux. Il a d’ailleurs effectué quelques présences publiques. Au golf notamment.

 

Il aurait aussi eu quelques contacts avec la direction du Canadien. Ce qui doit être bon signe.

 

Est-ce que Jonathan Drouin a disputé son dernier match dans l’uniforme du Tricolore? Est-ce que son retour dans la LNH passe nécessairement par un déménagement qui lui permettrait de se retrouver dans un marché où il ne serait pas l’objet d’une attention de tous les instants à ses moindres gestes sur la patinoire et hors de la glace?

 

J’ai toujours cru que la réponse à ses questions était oui! Je le crois encore.

 

Mais le fait que le Kraken soit demeuré loin de Drouin malgré sa présence sur la liste des joueurs offerts par le Canadien et le fait qu’aucune équipe ne fera de cadeau à Marc Bergevin pour obtenir les services du jeune homme qui ne produit pas à la hauteur des attentes et de sa sélection au troisième rang de la cuvée 2013 pourraient retarder son départ.

 

Et qui sait : cela pourrait même contribuer à son retour dans le vestiaire du Canadien.

 

La possibilité que Drouin jouisse d’une couverture médiatique moins étouffante et d’une trêve en matière de critiques publiques en raison du fait que les médias et les partisans ont compris que cette attention et ces critiques l’ont conduit à une forme de « burnout » pourrait l’aider à revenir avec le Canadien.

 

L’emploi du conditionnel est impératif ici, car il est difficile, voire impossible, d’être tranchant quant à l’avenir de Drouin avec le Canadien.

 

Mais déjà qu’il commencera la saison sans Price, qu’il devra se passer de Shea Weber pour l’année et que Phillip Danault défendra les couleurs d’une autre formation la saison prochaine tout comme Tomas Tatar, le Tricolore doit éviter de perdre Drouin sans rien obtenir en retour.

 

À suivre comme on dit!