MONTRÉAL - Avec Phillip Danault blessé plutôt que collé aux fesses d’Auston Matthews pour tenter de lui compliquer la vie, avec Price, Weber, Gallagher, Byron et Drouin à Montréal plutôt qu’à Toronto pour y affronter les Leafs, les chances de victoire du Canadien, samedi soir, étaient, disons le bien franchement, très minces.

 

Personne ne se surprendra donc du score final de 3-2 favorisant les Leafs qui ont, du coup, remporté un premier championnat de division depuis la saison 1999-2000.

 

La plus grosse surprise associée au 10e et dernier affrontement Montréal-Toronto cette saison – d’ici un éventuel face-à-face en première ronde bien sûr – est que le Canadien a trouvé le moyen de s’offrir une avance de 2-0 dans cette partie.

 

La fougue et l’efficacité en échec avant d’Alex Belzile – rappelé par mesure d’urgence pour remplacer Phillip Danault – d’Artturi Lehkonen et de Jake Evans a pris les Leafs par surprise en début de match. Brett Kulak en a profité pour inscrire son deuxième but de la saison.

 

Ce but a donné un élan que le Canadien a maintenu tout au long du premier tiers. Un premier tiers au cours duquel il a donné le ton, semblant plus efficace et impliqué – j’oserais même écrire plus motivé – que ses adversaires.

 

Non seulement le Canadien méritait l’avance de 1-0 dont il profitait après 20 minutes, mais il méritait tout autant l’avance de 2-0 qu’il s’est offerte 31 secondes après la mise en jeu lançant la période médiane.

 

Malgré tous ses blessés, malgré le calendrier difficile avec lequel il doit composer, le Canadien était en voie de lancer un avertissement aux Leafs à l’aube des séries.

 

C’est là que le Canadien est passé de surprenant à décevant. Car une fois en avant 2-0, le Canadien devait prendre les moyens pour garder le contrôle de ce match.

 

En séries, une avance de deux buts doit suffire pour gagner un match. Surtout pour le Tricolore qui, outre Tyler Toffoli et Josh Anderson lorsqu’il n’est pas ralenti par une léthargie comme celle qui le paralyse en ce moment, ne compte pas sur des tas de marqueurs de premier plan.

 

Le Canadien peine à marquer des buts. Tout le monde le sait. Cette lacune se reflète par des statistiques qui sont loin d’inspirer confiance : cinq victoires seulement (5-15-2-3) dans les 25 matchs au cours desquels il a accordé le premier but ; six victoires seulement (6-20-4-3) dans les 33 matchs au cours desquels il s’est retrouvé avec un recul d’un but sur les bras ; quatre victoires seulement (4-16-1-1) dans les 22 matchs ou il tirait de l’arrière après 40 minutes de jeu, dont trois gains seulement (3-6-1-0) alors qu’il ne tirait pourtant de l’arrière que par un but.

 

Comme samedi à Toronto!

 

Inversement, le Canadien nous a habitués en cette saison écourtée à maximiser les avances qu’il s’était offertes.

 

Des preuves :

 

Avant de donner le contrôle du match et finalement l’avance dans ce match aux Leafs, le Canadien n’avait perdu que 5 fois en temps réglementaire (19-5-3-1) après avoir marqué le premier but.

 

Sa fiche était de 12-1-0-0 lorsqu’il avait pris les devants 2-0.

 

Non seulement affichait-il 16 victoires dans les 18 matchs au cours desquels il s’était offert des avances de deux buts (16-1-1-0), mais il avait laissé ses adversaires combler des reculs de deux buts quatre fois seulement. Et deux fois, il s’en était tiré avec la victoire (2-1-1-0).

 

Mais samedi, tout a basculé.

 

Staal devait s’imposer samedi soir

 

Pas question ici de lapider le Canadien de critiques. Comme mentionné en début de texte, avec les blessures, avec un manque à gagner en matière de talent et de force de frappe, les meilleurs ont gagné.

 

Mais cette conclusion est un brin trop facile.

 

En dépit toutes les qualités des Leafs, et elles sont nombreuses, le Canadien devait faire plus que ce qu’il a fait pour éviter de laisser la crème remonter aussi facilement sur le petit lait.

 

Protéger cette avance pour signer une victoire inattendue, voire récolter un point dans le cadre d’un revers encaissé en prolongation ou en tirs de barrage aurait permis de rejoindre ou de se rapprocher des Jets au troisième rang dans la division canadienne.

 

Car oui! Les Sénateurs et Tim Stützle, qui a réalisé son premier tour du chapeau en carrière, ont encore donné un coup de main au Canadien.

 

Mais le Tricolore n’a pas su en profiter.

 

Malgré tout le talent des Leafs, malgré ses effectifs minés par les blessures, le Canadien devait pourtant prendre tous les moyens pour protéger son avance. On aurait dû voir des joueurs se sacrifier pour fermer les lignes de tir. Pour bloquer des rondelles au lieu de les laisser se faufiler pour surprendre Jake Allen qui ne pouvait rien sur deux buts, mais qui aurait dû être plus vigilant – du moins, il me semble – sur le but de Pierre Engvall, le premier des trois buts des Leafs en période médiane.

 

On aurait dû voir des joueurs se défoncer en défense au lieu de se retrouver trop souvent sur les talons.

 

On aurait dû voir les canons offensifs profiter du fait que les Leafs devaient ouvrir le jeu pour aller ajouter un but qui aurait pu faire la différence.

 

Mais on n’a rien vu de tout ça. Ou si peu... Ou trop peu!

 

C’est là qu’un gars comme Eric Staal aurait dû s’illustrer pour donner raison à Marc Bergevin d’avoir fait son acquisition avant la fin de la période des transactions. S’il n’est plus en mesure de remplir le filet adverse – et ce n’est pas ce qu’on attendait de lui à Montréal de toute façon – Staal doit être encore capable de s’imposer sur la glace dans quelques facettes de son jeu.

 

À commencer par les mises en jeu. Surtout en l’absence de Phillip Danault.

 

Staal a fait pitié samedi soir gagnant seulement deux des 13 mises en jeu qu’il a disputées. Il a été le pire des quatre centres utilisés. Et de lui. Jesperi Kotkaniemi – il a été effacé une fois encore – a gagné trois des neuf mises en jeu disputées. Jake Evans : quatre des neuf. Nick Suzuki s’est très bien défendu avec une efficacité de 50 %. Il a aussi été fort occupé par 24 mises en jeu disputées.

 

Presque le double du nombre de duels livrés par Eric Staal. Tant mieux pour Suzuki, mais si Staal ne peut rien offrir de plus, il faudra sérieusement songer à y aller avec Jake Evans à la place du vétéran une fois en séries.

 

À moins que KK soit si embourbé dans la « bouette » que ce soit lui qui écope. Du moins pour le premier match.

 

On verra.

 

Mais Staal doit donner bien plus qu’il ne donne jusqu’ici au Canadien. Et pas seulement aux cercles des mises en jeu. Vrai qu’il est maintenant un joueur de soutien. Mais un joueur de soutien doit soutenir. Et Staal ne soutient rien de rien en ce moment. Je veux bien croire qu’il est rendu lent, mais il a dû être un brin ou deux gêné lorsque Cole Caufield est passé à côté de lui comme s’il était arrêté sur un repli défensif.

 

En passant, ce repli a permis à Caufield d’offrir un autre signe à l’état-major qu’il mérite d’amorcer les séries, car en plus d’être menaçant à l’attaque, il est conscient de ce qu’il doit faire en défense.

 

De retour à Montréal pour y disputer ses deux derniers matchs de la saison régulière, il sera intéressant de voir comme l’état-major abordera le doublé face aux Oilers.

 

Ira-t-il le tout pour le tout afin de mousser ses chances de victoires aux dépens de la bande à Connor McDavid pour faire d’une pierre deux coups : se hisser au troisième rang et semer le doute dans l’esprit des Oilers?

 

Ira-t-il plutôt avec la prudence pour donner plus de temps aux blessés de retrouver la forme et couper le temps d’utilisation des joueurs les plus en vue afin de leur donner la chance de prendre un peu de souffle avant les séries.

 

On le saura bien assez vite...

 

Entre les lignes

 

-      Note positive dans la défaite de samedi, les spécialistes du désavantage numérique ont blanchi les Leafs en trois occasions en dépit l’absence de Phillip Danault...

 

-      Le Canadien a d’ailleurs été parfait en 16 occasions à ses six derniers matchs, dont trois face aux Leafs (10 en 10)...

 

-      Nick Suzuki a marqué son 13e but en 54 matchs égalant du coup sa production de l’an dernier en 71 rencontres. Suzuki a besoin de deux mentions d’aide pour égaler sa récolte de passes obtenues dans le cadre de sa saison à titre de recrue...

 

-      Des 13 buts qu’il a enfilés jusqu’ici cette saison, Nick Suzuki a marqué le premier but du match six fois – dont lors du premier match de la saison à Toronto le 13 janvier –, a donné une avance d’un but une septième fois en enfilant le but gagnant dans une victoire de 5-3 contre Winnipeg le 30 avril en plus de donner deux fois des avances de 2-0 dans le cadre de matchs opposant le Canadien aux Leafs...

 

-      Mitchel Marner a atteint le plateau des 20 buts pour une troisième fois depuis son arrivée dans la LNH. Il a terminé son année recrue avec 19 en 77 matchs et s’acheminait vers une saison de 22 buts l’an dernier alors qu’il en affichait 16 en 59 parties lorsque la saison a été stoppée en raison de la pandémie. Le but de la victoire marqué samedi était son 19e en cinq saisons avec les Leafs...

 

-      Bien que le Canadien présente une fiche plus qu’intéressante de 19-6-3-1 lorsqu’il marque le premier but, trois des six revers en temps réglementaire ont été encaissés lors des cinq dernières parties que le Tricolore a amorcées en s’inscrivant le premier au pointage : 19 avril à Edmonton (4-1), 24 avril à Calgary (5-2), samedi à Toronto (3-2)...

 

-      Le Canadien a accordé trois buts rapides à ses adversaires pour la quatrième fois cette saison. Il a encaissé la défaite chaque fois. Les Leafs ont signé trois des quatre victoires avec des séquences de trois buts en 6 min 28 s le 20 février (gain de 5-3), de trois buts en 10 min 22 s le 6 mai (gain de 5-2) et de trois buts en 11 min 31 s samedi dans la victoire de 3-2. Des statistiques qui augurent mal si les deux clubs se croisent en première ronde. L’autre revers a été encaissé aux mains des Oilers...

 

-      Acteur de premier plan dans la séquence qui a précédé le premier but du match, Alex Belzile a récolté sa première passe de la saison. C’était, de fait, son tout premier point « officiel » en carrière dans le cadre de son premier match « officiel » puisque les six rencontres qu’il a disputées l’été dernier, dans la bulle, et le point qu’il a obtenu en se faisant complice d’un but, étaient des matchs de séries éliminatoires et ne comptaient donc pas dans les statistiques officielles de la LNH qui se limitent aux matchs de saison régulière...

 

Bon dimanche...

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