MONTRÉAL - Loin de moi l’intention de manquer de respect à l’endroit de Dominique Ducharme et encore moins à ses joueurs qui ont tous, ou à peu près, disputé un très fort match de hockey, jeudi soir, à Ottawa.

À commencer par Phillip Danault, Brendan Gallagher et Tomas Tatar qui ont été rien de moins qu’excellents. Sans oublier Jake Evans qui a sans doute disputé le meilleur match de sa jeune carrière avec le Canadien.

Mais à l’image des Oilers d’Edmonton, mardi soir, au Centre Bell, les Sénateurs ont disputé un match de hockey affreux.

Est-ce que les performances pitoyables des Sens et des Oilers diminuent la valeur des deux victoires du Canadien?

Pas du tout.

C’est d’ailleurs tout le contraire que je tiens à souligner dans la foulée de ces deux victoires « faciles ».

De fait, après avoir vu leurs favoris gaspiller bien trop souvent des points que l’adversaire offrait généreusement, les partisans du Canadien devraient être rassurés de voir que leur club a su profiter de la situation encore jeudi soir. Qu’il a su prendre les moyens pour se simplifier la vie au lieu de se la compliquer.

Car c’est en s’assurant de ramasser les points qui traînent sur la patinoire au lieu de les échapper que le Canadien a signé sa troisième victoire consécutive. Un « exploit » qu’il n’avait réalisé qu’une fois depuis le début de la saison. C’est en ramassant les points qui traînent sur la patinoire que le Canadien a su mettre deux points en banque au lieu de se contenter d’un seul après avoir laissé un club qu’il était en voie de battre revenir de l’arrière et gagner en prolongation.

C’est en profitant de ces matchs « faciles » que le Canadien a prolongé à six sa série de matchs sans défaite en temps réglementaire. Le genre de séquence nécessaire pour maximiser les matchs en mains dont il dispose sur ses adversaires de la division canadienne. Des matchs en mains qui aideront à solidifier sa place en séries tout en moussant ses chances de l’améliorer. Pourvu que le Canadien les gagne bien sûr...

Aller chercher le gros but

Battre des Sénateurs et des Oilers qui offrent peu ou pas d’opposition, ce n’est certainement pas aussi flamboyant que de culbuter les Maple Leafs de Toronto dans le cadre d’un match chaudement disputé.

Mais c’est tout aussi important. Peut-être même plus, car cela évite d’avoir à composer avec les critiques et les maux de tête qui te guettent quand tu « perds » ces matchs faciles au lieu de les gagner.

Contre des jeunes Sénateurs qui lui en avaient fait baver un coup en signant trois victoires lors des cinq premiers matchs entre les deux équipes, le Canadien ne pouvait donc pas prendre les choses à la légère jeudi soir. Même après une première période qu’il a terminée avec une avance fragile de 1-0.

Et c’est en début de deuxième période que le match s’est joué selon moi. À court d’un homme en raison d’une pénalité écopée en fin de premier tiers par Jeff Petry, le Canadien ne s’est pas contenté de se défendre en début de deuxième.

Il a plutôt été l’agresseur :

Phillip Danault a gagné la mise en jeu initiale. Le travail en échec avant d’Artturi Lehkonen a poussé Thomas Chabot à la faute. Venu en relève à Danault, Jake Evans a continué à presser les Sénateurs. Il s’est non seulement permis d’obtenir un tir, mais il est allé récupérer la rondelle ensuite, a attiré quatre adversaires vers lui en fond de territoire ennemi avant de repérer Paul Byron qui s’amenait en renfort, de lui refiler la rondelle pour permettre à Ti-Paul de doubler l’avance du Canadien.

Les Sénateurs ne se sont jamais remis de ce but. De ce gros but. Le genre de but que le Canadien a peiné à aller chercher très souvent, voire trop souvent, avec les conséquences décevantes qui ont suivi.

Comme il l’avait fait mardi en ajoutant les gros buts qui ont enlevé à Connor McDavid et Leon Draisaitl la conviction qu’il était possible de revenir de l’arrière dans le match, le Canadien a éteint les Sénateurs avec le but en désavantage numérique de Paul Byron.

Car après ce but, les Sens n’ont pas généré la moindre occasion de marquer en période médiane. Et n’eût été la pénalité écopée en fin de match par Lehkonen et du tir raté qui a mené au but en attaque massive avec moins de deux minutes à faire, les Sénateurs auraient été blanchis pour la première fois de la saison. Et le Canadien aurait réalisé un deuxième jeu blanc consécutif.

En toute justice, c’est d’ailleurs ce qui aurait dû arriver jeudi : car les Sénateurs méritaient d’être blanchis et le Canadien méritait plus encore de les blanchir.

Mais bon ! Il a gagné.

«Nos gars agissent au lieu de réagir», que Dominique Ducharme a tenu à préciser dans son point de presse après le match. Le genre de commentaire qui permet au coach de récompenser des joueurs qui adhèrent à la philosophie qu’il est en train d’inculquer depuis qu’il a pris la relève à Claude Julien.

Les sceptiques diront qu’il est plus facile d’agir que de réagir contre les équipes faibles ou les clubs qui n’ont pas de jambes un soir donné.

C’est vrai. Mais quand tu évites de gaspiller les matchs « faciles », tu réduis les conséquences négatives des points perdus dans les matchs difficiles.

Le retour du premier trio...

Journalistes et partisans font souvent tout un plat avec la classification des trios. Bon quand tu as un McDavid, un Matthews, un MacKinnon ou un Crosby dans ton club, il est facile d’établir quel trio est ton premier.

Chez le Canadien, c’est différent.

Les performances en cours de partie dictent très souvent la qualité et la quantité du temps d’utilisation que les trios obtiennent.

De la façon dont ils jouent depuis quelques matchs, de la façon dont ils dictent le rythme des parties quand ils posent les patins sur la glace, il ne fait pas de doute que le trio de Phillip Danault (1 but, 1 passe) flanqué de Brendan Gallagher (1 but, 1 passe) et Tomas Tatar (2 passes) est le premier trio du Canadien par les temps qui courent. Il l’était clairement jeudi en tout cas alors que les trois joueurs ont terminé la saison avec deux points chacun.

En passant, Phillip Danault, malgré tous les ennuis offensifs qu’il a connus en début de saison, domine maintenant le Canadien avec huit matchs de deux points. Un de plus que Tyler Toffoli et Jeff Petry qui partagent le deuxième rang pour le plus grand nombre de parties avec deux points ou plus cette saison. Comme quoi Danault a quand même trouvé une façon de contribuer offensivement depuis le début de la saison tout en étant solide défensivement et aux cercles des mises en jeu.

Cela dit, peu importe la classification accordée au trio de Danault, il semble clair maintenant que c’est encadré de Tatar et Gallagher que Danault doit jouer.

Evans et Byron s’accrochent

Pendant que Danault, Gallagher et Tatar forcent la même de l’état-major de les garder ensemble, Jake Evans et Paul Byron tentent de convaincre le même état-major qu’ils méritent leur place au sein de la formation régulière.

Des places qui seront en péril lorsque Tyler Toffoli sera remis de sa blessure et qu’Eric Staal aura complété sa quarantaine de sept jours. Je pourrais ajouter le nom de Joel Armia, mais à mes yeux, Armia devrait être obligé de se battre pour sa place au sein de la formation autant que Paul Byron, Jake Evans, Artturi Lehkonen et même Michael Frolik qui a bien fait dans le cadre de ses deux premiers matchs avec le Tricolore.

L’ennui pour Byron et Evans, c’est qu’ils sont plus faciles à glisser au sein de l’équipe de réserve que les autres. Byron a déjà survolé le ballottage à deux reprises. Il peut donc être envoyé au «taxi squad» sans avis afin de permettre au Canadien de récupérer 1,075 million $ sous le plafond salarial. Et s’il y est soumis une troisième fois – ce qui arrivera s’il doit retourner au sein de l’équipe de réserve une fois qu’il aura disputé encore cinq parties – il sera sans l’ombre d’un doute boudé une fois encore en raison de son contrat qui l’assure d’un salaire de 3,4 millions $ pour encore deux saisons.

Quant à Evans, il n’a pas, comme les autres jeunes (KK, Suzuki et Romanov) à être soumis au ballottage. Pas plus que Michael Frolik. Du moins pas avant qu’il n’ait disputé 10 matchs

Ce qui n’est pas le cas pour les autres joueurs de soutien. Je veux bien croire que Corey Perry a été boudé au ballottage en janvier. Mais il serait réclamé illico si le Canadien prenait la chance de le glisser au club de réserve pour faire une place à Byron ou Evans. Armia, Lehkonen tout comme Mete à la ligne bleue, seraient aussi réclamés selon moi s’ils étaient offerts à tous les clubs par le biais du ballottage.

Ce qui pourrait jouer des tours à Byron et Evans.

Mais de la façon dont ils ont joué jeudi, à Ottawa, et dont ils jouent depuis quelques matchs, Paul Byron et Jake Evans font ce qu’ils doivent faire pour mousser leurs chances de demeurer avec le grand club : ils se défoncent et s’accrochent en jouant du gros hockey.

Entre les lignes

• Carey Price aurait facilement pu affronter les Sénateurs jeudi soir. Il était bien reposé après la pause Covid et ce n’est pas comme s’il s’était tué à l’ouvrage mardi face aux Oilers qui ont tiré 17 fois sur sa cage. Mais je comprends la volonté de Dominique Ducharme et du nouveau patron des gardiens Sean Burke de vouloir éviter de garder Jake Allen loin de l’action trop longtemps...
   
• Allen n’avait pas joué depuis le 19 mars. Il n’avait disputé qu’une partie depuis le 12 mars. En plus, il était en quête d’une première victoire après six revers de suite (02-4-0). Tous des motifs valables pour lui donner le match de jeudi qu’il a gagné facilement en stoppant 22 des 23 tirs des Sénateurs. Il a perdu son premier jeu blanc de la saison et son 22^e en carrière avec moins de 2 minutes à faire en troisième alors que les Sens ont marqué un but chanceux dans une cause perdue depuis longtemps...
   
• Thomas Chabot a connu un match très difficile jeudi soir. Non seulement at-il terminé la rencontre avec un différentiel de moins-3, mais il a été directement responsable de deux des quatre buts du Canadien...
   
• Les Sénateurs n’avaient pas joué depuis jeudi dernier. L’entraîneu-rchef D.J. Smith n’a pas cherché à excuser l’affreux match de ses joueurs par cette semaine d’inactivité. « C’est notre intensité qui était rouillée ce soir. Nous sommes à notre mieux quand nous prenons d’assaut l’enclave en zone ennemie et que nous protégeons la nôtre. Ce soir, on ne s’est jamais rendu au but du Canadien qui a passé la soirée autour de notre gardien ».
   
• Phillip Danault (3^e but), Paul Byron (3e but), Brendan Gallagher (14e but) et Corey Perry (7e but) ont d’ailleurs tous marqué alors qu’ils étaient à moins d’une longueur de bâton du filet défendu par Filip Gustavsson. Le gardien recru a encaissé sa première défaite en temps réglementaire cette saison après deux victoires et un revers en prolongation…

• Le but de Paul Byron était le huitième marqué par le Canadien à court d’un homme cette saison. C’est bien sûr un sommet dans la LNH. Le Canadien avait enfilé ses sept premiers – quatre contre Vancouver, deux contre Edmonton, un contre Ottawa – lors des 11 premiers matchs de la saison. Il a enfilé le huitième dans le cadre de la 33^e partie...
   
• Tyler Toffoli et Artturi Lehkonen ont marqué deux fois chacun en désavantage numérique cette année. Les autres buts ont été enfilés par Joel Armia, Jake Evans, Paul Byron et Josh Anderson...
   
• Parlant de Josh Anderson, il n’a pas marqué à ses cinq derniers matchs et n’affiche que deux buts à ses 17 dernières parties. Une séquence tout à l’opposé de son début de saison alors qu’il a marqué neuf fois à ses 13 premières rencontres dans l’uniforme tricolore...
   
• Canadien et Sénateurs se croiseront à nouveau samedi, mais cette fois au Centre Bell. Il s’agira du septième des dix duels prévus entre les deux formations. Le Canadien a un dossier de 31-1-1 et les Sens une fiche de 3-3-0-0 après les six premières rencontres...