MONTRÉAL - Alain Vigneault assurait ne pas avoir été en mesure de trouver la moindre faille dans le jeu du Canadien depuis le début des séries. Il a dû faire une méchante découverte pendant l’envolée entre New York et Montréal vendredi après-midi, ou au cours de la nuit de vendredi à samedi. À moins qu’il nous contait simplement des histoires afin d’endormir le Canadien et ses partisans. Ce qu’il ne faudrait pas le moindrement exclure comme scénario.

Car en jouant avec une vitesse qui a paralysé le Canadien, en multipliant les passes, en étant les premiers sur les rondelles libres et en effectuant un solide échec avant, les Rangers donnaient nettement l’impression d’avoir compris ce qu’ils devaient faire pour profiter des faiblesses du Tricolore. Ce qu’ils devaient faire pour neutraliser ses forces.

Les Rangers ont marqué sept buts dans une victoire de 7-2 qui leur permet de sortir des blocs avec confiance en finale de l’Est. « Ils nous ont ramenés sur terre », a d’ailleurs candidement et justement fait remarquer l’entraîneur-chef Michel Therrien après le revers cuisant encaissé par le Canadien.

Les Rangers ont marqué quatre buts aux dépens de Carey Price au cours des 40 premières minutes de jeu. Ils en ont ajouté trois aux dépens de Peter Budaj qui est venu en relève au dernier tiers alors que l’issue de cette première partie était déjà pas mal décidée.

Price blessé, puis remplacé

Pourquoi remplacer Price?

Parce qu’il n’était plus dans sa zone. Price ne pouvait pas faire grand-chose sur les deux premiers buts marqués contre lui. Trop rapides pour les défenseurs du Canadien, les Rangers ont marqué à la suite de très beaux échanges autour de la cage du gardien du Canadien. Des échanges qui ont suivi des reprises de rondelle après de l’échec avant efficace. Dominic Moore a mystifié la défense tricolore sur ces deux buts marqués par Martin St-Louis et Mats Zuccarello.

Au terme d’une très bonne deuxième période du Canadien – Bourque a marqué un but chanceux sur les dix tirs décochés par le Tricolore – les hommes de Michel Therrien ont tout bousillé.

Alexei Emelin, incapable de composer avec la vitesse des Rangers du début à la fin de la rencontre, a été débordé par Chris Kreider à qui Rick Nash a offert une échappée à la suite d’une passe parfaite. Kreider a déjoué Price avec un bon tir bas pour redonner une avance de deux buts aux BlueShirts avec 61 secondes à faire à la période. Puis, alors que tout le monde se préparait en vue de l’entracte, Brad Richard a scié les jambes du Canadien et de ses partisans.

Sur le but de Richards, P.K. Subban s’est fait prendre deux fois sur la même séquence. Il s’est rendu coupable d’un revirement en sortie de zone à sa ligne bleue et a mal couvert Richards à la droite de Carey Price. À la décharge de Subban, il faut dire que Mats Zuccarello a mystifié le défenseur du Canadien en effectuant une passe parfaite alors que tout le monde dans le Centre Bell croyait que le Norvégien irait contourner le but.

Sur ce quatrième but, Carey Price a donné l’impression de peiner dans son déplacement latéral. Il n’en fallait pas plus pour soulever des doutes à l’effet qu’il soit blessé. Des doutes qui ont pris plus d’ampleur lorsque la pierre angulaire du Canadien a été gardée au banc en troisième.

En début de période médiane (3 min 15 s) Chris Kreider a percuté Price au terme d’une glissade à haute vitesse. La jambe droite du gardien du Canadien a encaissé la majorité de l’impact. Après être demeuré étendu sur la patinoire quelques secondes, Price s’est relevé et a patiné en donnant de signes évidents qu’il tentait de chasser la douleur.

« Ça n’a rien à voir », a indiqué Michel Therrien lorsqu’on lui a demandé si sa décision de garder Price au banc était reliée à cette blessure.

« On a gardé Carey au banc pour le protéger. Parce qu’on ne jouait pas bien devant lui », a ajouté l’entraîneur-chef du Canadien qui n’a pas confirmé sa présence devant le but lundi. Ce qui a soulevé des tas de questions chez les journalistes. Remarquez qu’il n’a jamais indiqué que cette présence était douteuse non plus.

Ce qui est clair, c’est que si Price n’est pas en mesure d’être devant son filet lundi, les rêves de victoire aux dépens des Rangers, les rêves d’une présence en finale de la coupe Stanley et ceux associés à une éventuelle 25e conquête du précieux trophée seront terminés.

Dominé physiquement et mentalement

Certains observateurs et partisans diront que perdre 7-2 dans le cadre du premier match d’une série quatre de sept n’est pas pire que de perdre 4-3 en prolongation. Qu’encaisser une dégelée comme celle que les Rangers ont infligée au Tricolore hier est plus susceptible de fouetter le club que de l’anéantir.

Je suis entièrement d’accord sur ce point.

Après un match misérable comme celui qu’ils ont disputé samedi, les joueurs du Canadien ne peuvent se réfugier derrière quelques bons jeux relevés ici et là. Ils ne peuvent tenter de se convaincre qu’ils ont simplement joué de malchance. Et s’ils tentent de chercher des excuses, les joueurs du Tricolore pourront facilement être rappelés à l’ordre par les commentaires tranchants de leur coach.

« Nous n’étions pas prêts physiquement et mentalement à disputer ce match. Et quand tu n’es pas prêt mentalement ou physiquement, tu ne peux pas compétitionner. Ils nous ont ramenés sur terre », a bien résumé le coach du Canadien.

Après sa victoire surprenante aux dépens des Bruins de Boston, on pouvait s’attendre à un certain relâchement du Tricolore. En fait non : pas à un relâchement, mais à une forme d’excès de confiance reliée au fait qu’il venait d’éliminer les champions de la saison régulière.

Tout ça était bien beau. Mais ça ne comptait plus. Plus du tout. Et ça compte encore moins maintenant que le Canadien se retrouve en arrière 1-0. Maintenant qu’il s’est fait jouer le même tour qu’il a joué au Lightning d’abord et aux Bruins ensuite en gagnant la première partie de la série sur la route.

Secoué samedi, le Canadien devra vite retrouver ses esprits dimanche et s’assurer de disputer un bien meilleur match dès lundi pour niveler les chances.

Comment y arriver? En patinant avec les Rangers au lieu de les regarder aller.

En patinant comme ils l’ont fait hier, les Rangers ont démontré à quel point les Bruins étaient lents. Gros, bien sûr. Solides, évidemment. Mais lents.

Contre les gros Bruins, Alexei Emelin, Andrei Markov, Josh Gorges, Mike Weaver et Douglas Murray pouvaient rivaliser. Contre les rapides Rangers samedi, ils étaient incapables de le faire.

Emelin a été particulièrement mauvais. Le pire défenseur du groupe. Incapable de suivre, même de loin, les joueurs des Rangers, le défenseur russe a été d’une complète inutilité. Il a été débordé des deux côtés. Le fait qu’il n’ait été en mesure d’asséner qu’une seule mise en échec démontre à quel point il n’a jamais été à la hauteur de ses adversaires.

Emelin n’est toutefois pas le seul à avoir connu sa part d’ennuis. Que non.

S’il est en mesure de rivaliser sur tous les aspects du jeu avec les Rangers, P.K. Subban a toutefois connu un match plus difficile que lors de la série face aux Bruins. Il a réalisé quelques montées enlevantes dont l’une s’est soldée par une très bonne occasion de marquer. Mais en raison de l’ineptie générale de son équipe à générer quoi que ce soit en attaque, Subban s’est mis à vouloir tout faire seul. Ce qui n’est jamais bon. Ce qui n’est jamais productif.

Mais bon, le match de samedi entre dans la catégorie des matchs à oublier. En fait non : pas à oublier, mais à étudier afin de relever ce qui n’a pas bien été pour ensuite corriger les points à corriger. Ce qui devrait être bien facile à faire – du moins dans l’étude du dossier – car le Canadien n’a pas fait grand-chose de bon.

Dans une cause gagnée d’avance, les Rangers ont ajouté trois buts rapides en début de troisième période. Trois buts marqués en avantage numérique alors que Brandon Prust et plusieurs de ses coéquipiers se sont mis à écoper des pénalités d’indiscipline.

En plus de hacher finement le Canadien, les Rangers l’ont fait sans les services de Derick Brassard. Victime d’une mise en échec de Mike Weaver dès sa deuxième présence, Brassard a retraité au vestiaire et n’est pas revenu au jeu ensuite.

Croisé dans le vestiaire des Rangers après la rencontre, le Gatinois a indiqué qu’il ne pouvait confirmer sa présence en vue du match de lundi.

Remarquez que de la façon dont ses coéquipiers ont dominé le Tricolore samedi, sa présence ne semble pas essentielle.

Mais bon! On verra quel genre d’opposition le Canadien offrira lors de cette deuxième partie.

Chiffres du match

1 : Rick Nash a marqué son premier but des séries, le 7e des Rangers en début de troisième période. Le Canadien ne peut qu’espérer que ce premier but ne sera pas suivi par un tas d’autres...

2 : avant d’accorder quatre buts en 40 minutes de jeu, Carey Price avait limité les Rangers à seulement deux buts lors de ses cinq derniers matchs entre les deux équipes, réalisant trois jeux blancs au cours de cette séquence…

4 : avec un but et trois passes, Ryan McDonagh a une fois encore fait mal au Canadien et à ses partisans qui n’en peuvent plus de se faire rappeler le fait qu’il ait été échangé en retour de Scott Gomez. Imaginez le duo du tonnerre qu’il compléterait avec P.K. Subban...

5 : Dan Girardi a dominé les joueurs des deux équipes avec cinq tirs bloqués...

7 : les sept buts enfilés samedi représentent un record pour les Rangers aux dépens du Canadien en séries...

8 : les sept buts accordés par le Canadien samedi représentent le plus haut total de buts encaissés à domicile en séries depuis le revers de 8-2 aux mains des Hurricanes de la Caroline en 2002...

10 : Brad Richards a marqué sur l’un des quatre tirs cadrés obtenus lors du match. Il a toutefois vu les joueurs du Tricolore bloquer six des dix tirs qu’il a tentés...

27 : Les Rangers ont porté à 27-1 la fiche des équipes qui marquent le premier but depuis le début de la deuxième ronde...